La langue de l’histoire

Le nationalisme civique doit céder au nationalisme identitaire, sans quoi l’indépendance nationale perd tout son sens historico-sociologique

Chronique de Normand Perry

Le titre de la présente chronique doit sa paternité à l’émission radiophonique « Ouvert le samedi » de la Première chaîne de la SRC, où je viens tout juste d’y entendre (7 avril 2007) successivement Jonathan Valois, Denis Vaugeois et Jacques Beauchemin, tous y commentaient la défaite du PQ le 26 mars dernier. Et c’est Jacques Beauchemin qui a eu cette expression qui alimente ma réflexion présente.
Il faut ne pas être à l’affût de tout ce que disent les observateurs de la scène politique québécoise pour croire que les résultas du PQ lors du dernier scrutin sont attribuables à une seule cause. Il y en a plusieurs. Parmi ces causes, il y en a une qui semble se démarquer par rapport aux autres et c’est la place du nationalisme identitaire dans le discours adéquiste, et de son absence totale au sein du PQ, ayant cédé tout l’espace idéologique au nationalisme civique qui fait écho, en somme, au multiculturalisme trudeauiste. Ce qui n’est en fait uniquement qu'un remède pour guérir les plaies ouvertes par la malheureuse déclaration sur le vote ethnique de Jacques Parizeau au soir de la défaite référendaire de 1995.
À ce moment précis de l’histoire québécoise, il est d’une grande importance de prendre un recul intellectuel pour regarder à quelle croisée de chemins nous sommes et de nous poser quelques questions fondamentales à propos de l’enracinement historico-sociologique du mouvement indépendantiste du Québec, des arguments actuels sur lesquels la thèse souverainiste s’appuie et de la façon avec laquelle il est impératif de solidifier nos positions, nos acquis et nos revendications.
Des racines indéniables
Jamais il ne sera possible de nier que les racines même du nationalisme québécois, fil conducteur du mouvement indépendantiste, est situé à la Conquête britannique de 1756-1763, et l’essence même de ce nationalisme identitaire est la préservation de nos souches françaises. Cette minorité de culture francophone d’un coin de terre d’Amérique faisait face à un défi d’ordre existentiel, et la naissance de ce nationalisme s’explique beaucoup plus par l’instinct de survie que d’un fait d’intellectuels. Bien sûr, ce nationalisme s’est ensuite « intellectualisé » au fil des ans et des siècles, mais son enracinement est d’ordre vital.
Lorsqu’une certaine frange du mouvement souverainiste aujourd’hui cherche à se distancier de ce nationalisme identitaire, c’est de sa racine historique qu’elle se coupe, et la substance même du discours souverainiste s’en trouve complètement dénaturée. Peut-on s’étonner de voir une bonne partie de la population se reconnaître en un discours identitaire lorsque développé et exposé par un chef politique, en l’occurrence Mario Dumont ? Que ce discours soit le fait d’un populisme très opportun ou qu’il relève d’un mouvement naturel d’un retour aux sources importe peu : la portée d’un tel discours trouve oreilles attentives, des esprits se reconnaissent et entendent cette voix qui leur est familière.
Au cours de la dernière décennie, force est d’admettre que le mouvement souverainiste a lamentablement échoué dans l’idée d’un nationalisme civique. La réponse du peuple au soir du 26 mars dernier est très claire en ce sens.
Un nationalisme identitaire inclusif
Si le nationalisme civique a lamentablement échoué, il faut cependant prendre garde à ne pas verser en un nationalisme identitaire qui omet d’être inclusif. Il me semble que les leçons de la déviance nazie doivent être éloquentes en ce sens.
Il faut bien admettre que ce discours d’un nationalisme civique s’est enraciné strictement en une peur. La peur de passer pour « politicly incorrect » en évoquant strictement l’appartenance à nos racines canadiennes-françaises. La peur de passer pour ethnophobes en faisant appel à la fierté d’être descendants de sang de cette souche française. Pourtant, l’histoire du nationalisme identitaire canadien-français, devenu québécois, est-il totalement exempt de l’apport et du soutien de membres des communautés culturelles autres ?
Permettez que je cite l’auteur du texte présent en exemple au premier chef. Descendant d’irlandais d’un bord et d’écossais de l’autre, marié à une descendante d’écossais, il n’y a pas une seule goutte de sang d’origine française qui coule en mes veines. Pourtant la langue anglaise aurait été d’un naturel pour moi, et au contraire, c’est en français que je fus élevé à la maison, en français que j’ai reçu mon éducation au cours de toute ma formation académique, à tel point j’arrive à peine à maîtriser la langue de Shakespeare.
Je me fais une fierté pourtant d’appartenir à ce peuple francophone, sans renier mes origines pour autant; je parle cette langue du pays avec autant de conviction, une langue que je veux entendre parfaite dans la bouche de mon fils; même mon épouse qui fut élevée dans la langue anglaise, qui a appris le français à l’âge adulte, parle aujourd’hui la langue de Molière par choix et amour de celle-ci et de manière presque exclusive.
De quoi ai-je fait la démonstration dans le paragraphe précédent ? Qu’il n’y a aucune honte, mais absolument aucune, d’en référer à nos racines sociologiques et culturelles françaises lorsque nous voulons parler du peuple québécois d’aujourd’hui. D’autant plus qu’historiquement, les communautés culturelles au fil du temps, par la contrainte de certaines lois certes, mais beaucoup plus une influence sociétale, se sont intégrées à la majorité francophone en ayant un sentiment d’appartenance aussi solide à ce peuple québécois que les descendants de France. Ce fut le cas de beaucoup d’écossais, d’irlandais, d’italiens, de grecs, de vietnamiens, d’haïtiens ou je ne sais quoi encore.
Il faudra bien en revenir un jour ou l’autre de cette déclaration malheureuse d’octobre ’95 qui, isolément, fut très blessante pour beaucoup d’individus et diverses communautés culturelles. Mais doit-on pour autant se couper de nos racines historiques pour un incident isolé comme celui-là, à tel point que le peuple québécois ne se reconnaît plus dans le discours indépendantiste contemporain appuyé sur un nationalisme civique qui résonne comme une grosse marmite vide ?
Par surcroît, comment nous rendrons-nous attrayants à l’égard des membres des communautés culturelles nouvellement installés au Québec si nous ne savons plus leur parler de notre passé si riche en références de toutes sortes ? Comment allons-nous savoir transmettre la passion de notre Québec à ces néo-québécois si nous ne savons pas leur présenter une identité bien ancrée dans ses racines françaises ?
Il me semble que si je devais demain matin immigrer, pour une raison ou pour une autre, vers le Japon par exemple, que j’aurais envie de connaître l’histoire de cette nation, d’en apprendre la langue et d’en respecter les us et coutumes, surtout face à un peuple aussi fier de son héritage historique. Il me semble que, dans cette nouvelle situation, j’aurais envie de m’intégrer dans ce milieu et devenir membre à part entière de ce peuple. Il me semble que, logiquement, une personne venant de l’étranger pour s’installer ici devrait porter des sentiments semblables.
Mais il est tout aussi logique que si cette soi-disant personne arrive au milieu d’un peuple coupé de ses racines culturelles, sociologiques et historiques, en d’autres termes un peuple qui a perdu la mémoire de ce qu'il est, alors il est très peu enthousiasmant pour le nouvel arrivant de s’intégrer au sein d’un peuple qui ne sait plus qui il est, et qui plus est, parle trop souvent une langue française honteusement massacrée.
Se réapproprier la langue de l’histoire
L’une des plus grandes erreurs que le chef actuel du Parti québécois ait pu commettre depuis qu’il est à la tête de cette formation politique, est d’avoir conservé un mutisme quasi total à l’été 2006, lorsqu’il fut annoncé que le cours d’histoire à l’école secondaire allait subir une profonde mutation.
On se souviendra que sur la place publique, il y avait eu des débats assez féroces entre les tenants d’un cours d’histoire qui faisait référence à des dates précises, et à des événements d’ordre politique, entre autres, contre un cours d’histoire à saveur fortement sociologique. Sauf le souvenir d’un insignifiant communiqué de presse en provenance du chef de l’opposition officielle de l’époque, André Boisclair, je ne me souviens aucunement d’avoir entendu un plaidoyer en faveur du maintien ou d’un renforcement du cours d’histoire à l’école qui fait explicitement référence, entre autres, aux éléments que je viens d’énumérer, de la part d’André Boisclair.
À moins que ma télévision ou mon appareil radio aient mal fonctionné, il ne me semble pas avoir entendu dénoncer vertement la chose. À tout le moins s’il y a eu une prise de position de cette nature, elle ne fut pas criée sur tous les toits. Il est à se demander s’il n’y a pas un lien à faire entre cette absence d’une virulente réaction du chef du PQ et sa position sur le nationalisme civique ?
Il m’apparaît aussi évident qu’une vérité de la Palice que pour tisser un nationalisme identitaire très fort, il faudra nécessairement se réapproprier la langue de l’histoire, celle du peuple canadien-français devenu peuple québécois.
La fibre nationaliste québécoise sait résonner quand on sait la pincer correctement comme une corde de violon. Elle sait donner les beaux accents de chez-nous lorsqu'on sait être en harmonie avec elle, n’est-ce pas la signature même d’un Vigneault de chez-nous ? Mario Dumont a bien démontré lors de la campagne électorale qu’il savait composer les mélodies appropriées pour faire résonner cette fibre, et le mouvement indépendantiste doit y prendre exemple s’il cherche à connaître le chemin du cœur du peuple québécois, et ce, de quelque souche qu’il puisse être.

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Normand Perry126 articles

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On pourrait le décrire comme un grand passionné de communication, de philosophie, de politique, d'histoire, d'astronomie, de sciences, de marketing, de musique classique et d'opéra. Normand Perry mène une vie publique bien remplie, toujours avec des projets plein la tête et des rêves à réaliser.

Après avoir obtenu un premier diplôme universitaire en philosophie au milieu des années ’90, Normand Perry débute sa vie publique comme pamphlétaire, exprimant ses opinions librement, ces dernières étant publiées régulièrement dans les journaux régionaux, les quotidiens et divers sites Web.

Depuis avril 2004, il travaille chez [Soleil communication de marque->http://www.soleilcom.com/], agence de publicité montréalaise, où il est au développement des affaires, en veille stratégique et aux relations publiques.

Depuis juillet 2010, il s’est vu confié un projet radiophonique à [l’antenne de Radio Ville-Marie->http://www.radiovm.com/index.aspx] où il conçoit, réalise, anime et supervise le montage d’une émission portant sur l’orthodoxie chrétienne au Québec : [Voix Orthodoxes->http://www.voixorthodoxes.org/].

Sa plume va le conduire en politique active.

Après s’être fait connaître comme pamphlétaire à partir du début des années 2000 dans sa région du Suroît, il se fait remarquer, et on lui propose la présidence de circonscription au Parti Québecois dans Soulanges au début 2005. Suite à la démission inattendue de Bernard Landry en juin 2005 comme chef de cette formation politique, Normand Perry appuie d’emblée la candidature de Louis Bernard tout en s’opposant farouchement à l’élection d’André Boisclair. Lorsque ce dernier remporte la chefferie du PQ en novembre 2005, Normand Perry démissionne de sa présidence et quitte le PQ sur-le-champ.

A l’automne de la même année il se fait élire au conseil municipal à Les Coteaux dans la circonscription de Soulanges au Québec. Il se voit confier notamment les responsabilités du comité des loisirs, où conçoit et implante un programme de subvention à l’activité sportive pour les jeunes; il occupe la vice-présidence du HLM, il aussi responsable de la sécurité publique et participe activement à la fondation de la Régie inter municipale des Pompiers du Lac-St-François (fusion des services des incendies de Les Coteaux et St-Zotique).

Lors de la création du nouveau parti politique Québec solidaire en février 2006, il en devient membre et participe au congrès de fondation à Montréal. Il se porte candidat aux élections provinciales de mars 2007 pour cette formation politique dans la circonscription de Beauharnois.

Après ces quelques années en politique active, il poursuit son œuvre de réflexion pamphlétaire, notamment sur le [Blogue de Normand Perry->http://normandperry.blogspot.com/] tout comme sur Vigile et bien d’autres médias québécois





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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    17 avril 2007

    "Malheureusement pour nous, cette nette distinction n’est pas présente dans la langue anglaise. Il se trouve que chez les anglophones, même dans la communauté scientifique, on amalgame race et ethnie comme on pouvait le faire dans la langue française jusqu’aux années 60-70 d’après ce que j’ai pu comprendre. Voilà une source de confusion dont nous n’avions vraiment pas besoin..."(Mathieu Gautier Pilote)
    Et pour cause; ce sont les anglais qui lui ont donner cette définition vers 1880.
    Mais même si cette distinction se fait dans la langue française, la réalité sur le terrain est toute différente.
    Le PQ et le PLQ négocient des ententes territoriales avec les Amérindiens sur leurs bases ethniques, dans le plein sens anglais du terme! Du sang!
    Nous sommes loin d'une simple question de sémantiques!
    Le territoire est bien réel, lui!

  • Archives de Vigile Répondre

    16 avril 2007

    Au début de votre texte vous opposez les nations ethniques et civique, puis au milieu de votre texte vous en faites des complémentaires, pour ensuite terminer par nous suggérer que les tenants de la nation ethnique sont contre la civique.

    Non, au début de mon texte j'affirme que les expressions « nation civique » et « nation ethnique » sont généralement opposées par ceux qui se revendiquent d'un nationalisme civique (et probablement par d'autres aussi). C'est la typologie la plus classique du nationalisme. Ce n'est pas la seule typologie. Voyez Pour comprendre le nationalisme au Québec et ailleurs, Denis Monière, 2001. Par nationalisme ethnique, on pense à l'Allemagne qui jusqu'à tout récemment (janvier 2000) n'attribuait la citoyenneté qu'à une personne de descendance allemande d'après une loi datant de 1913.
    Moi je pense que cette typologie est bonne pour la poubelle, mais elle existe encore. Lorsque M. Perry affirme que l'on doit rejeter le nationalisme civique, il est entendu par d'autres, même si ce n'est pas son intention, qu'il y préfère le nationalisme ethnique, entendu au sens évoqué plus haut. C'est une erreur de raisonnement bien sur, il est faux d'affirmer A et B, non A alors B. N'empêche que nos adversaires politiques marques des points avec ça alors que ce n'est pas mérité. Il n'y a pas de partisan du droit du sang chez les nationalistes québécois. S'ils y en avaient, ils se sentiraient assez mal parmi ce segment de la population québécoise qui est responsable de la Charte de la langue française, loi qui fait que presque tous les enfants du Québec grandissent ensemble dans les mêmes écoles de langue française!
    La complémentarité, je la vois entre le nationalisme identitaire et le projet civique. J'ai écrit :
    “Notre nationalisme est humain et identitaire, notre projet politique est civique et inclusif, il n’y a rien de contradictoire : c’est la parfaite complémentarité.”
    Je n'ai donc pas parlé de complémentarité entre le nationalisme dit ethnique (droit du sang) et le dit civique (droit du sol). J'ai affirmer la complémentarité entre le nationalisme dont parle M. Perry et le nationalisme civique, entendu au sens qui n'est pas le sien, mais entendu au sens de droit du sol.
    Vous affirmez : La nation ethnique ne dépend pas de la pureté du sang ou de la pureté génétique.
    Je suis bien d'accord. Dans la langue française, depuis plusieurs années, le concept d'ethnie semble généralement entendu, dans la communauté des sciences de l'homme en tout cas, comme bien distinct de tout ce qui découle de l'hérédité. L'ethnie englobe une ou plusieurs communautés de descendance. Ce qui est partager ne se transmet pas par les liens du sang. Malheureusement pour nous, cette nette distinction n'est pas présente dans la langue anglaise. Il se trouve que chez les anglophones, même dans la communauté scientifique, on amalgame race et ethnie comme on pouvait le faire dans la langue française jusqu'aux années 60-70 d'après ce que j'ai pu comprendre. Voilà une source de confusion dont nous n'avions vraiment pas besoin...
    Ce que j'affirme en mon nom personnel c'est que nous ne devons pas rejeter le nationalisme civique, entendu au sens évoqué plus haut. Lorsqu'il est entendu au sens de M. Perry, une coquille vide, alors je suis 100% d'accord, mais il est préférable de trouver un autre mot pour désigner cette coquille vide, cet État sans la Nation qui refuse toute légitimité aux revendications des peuples non-souverains. Avec ce genre de projets politiques, on fabrique une communauté politique, mais pour une ensemble disparate de peuples amalgamé ensemble pour cause de conquête territoriale passée. On ne respecte pas l'histoire des populations humaines qui a façonné divers peuples, diverses mémoires. On préfère briser les peuples que de briser les États!
    « Les droits de l'homme? Ah!, ce n'est valable que pour ceux qui sont nés dans un pays libre ça monsieur. Les peuples conquis doivent abandonner tout ce qu'ils sont et nous remercier de les accueillir comme des individus égaux au sein de notre État-Nation indivisible. Et si nous nous plaignons? Eh bien nous vous donnerons quelques droits collectifs ici et là, tranquillement, au gré de notre bon vouloir, pour calmer vos ardeurs, en espérant qu'un jour votre communauté soit totalement dissoute et oubliée et que vous nous foutiez la paix. »
    Vous connaissez le discours! :-)
    La nation civique de sol, une fois l’indépendance faite, je veux bien, mais seulement après une reconnaissance du peuple Canadien français et de ses prérogatives en droit sur le sol.
    La seule reconnaissance dont nous avons besoin est celle qui se trouvera inscrite dans les premiers articles de notre constitution républicaine, comme c'est le cas pour la plupart des États-Nations de la planète. Nous, le corps des citoyens québécois formeront le corps constituant et souverain.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 avril 2007

    M. Gauthier-Pilote,
    Au début de votre texte vous opposez les nations ethniques et civique, puis au milieu de votre texte vous en faites des complémentaires, pour ensuite terminer par nous suggérer que les tenants de la nation ethnique sont contre la civique.
    Or, l'opposition entre nation de sol et nation de sang ne tient pas la route. La nation ethnique ne dépend pas de la pureté du sang ou de la pureté génétique. M. Perry en est un parfait exemple, ainsi que la majorité des Canadiens français.
    Si nous nous sommes permis un tel niveau de métissage, c'est que ce qui fait notre identité ethnique n'a rien a voir avec la pureté du sang.
    C'est au contraire une ethnicité au sens le plus moderne du terme, c'est à dire historico-culturelle et linguistique. Donc, ce n'est pas une ascendance mais bien DES ascendances multiples. Ce qui en fait parcontre une ethnie, c'est que ces ascendances sont du même territoire, le Québec. Elles y ont fait l'histoire.
    De nouvelles ethnies arrivent au Québec, mais n'y ont pas encore fait l'histoire. Elles le feront peut-être. Mais on parle ici d'ascendances métissées sur un même territoire avec un même mode de vie unique et propre aux particularités de ce territoire, pendant 400ans.
    Cet échange et transmission d'humeurs bien particulières ont fait de nous ce que nous sommes et que tous peuvent reconnaître. Nous sommes bel et bien un peuple dans le sens ethnique. Nous continuons de nous transformer, mais prétendre qu'on ne se reconnaît plus après la Révollution Tranquille il y a 40 ans est ridicule.
    Vous avez raison de dire que la nation civique n'est possible que pour un État indépendant. Nous le croyons aussi. Car la nation civique embrasse et reconnaît toutes les identités et ethnies sur son sol. Nous ne sommes pas contre la nation civique, mais contre l'idée qu'elle se substitue aux identités ou aux ethnies au lieu de les reconnaître. Et encore pire, si elle renie les ethnies fondatrices de l'État qui travaillent ce sol depuis 400 ans!
    Ces ethnies ont des prérogatives en droit sur ce sol. C'est d'ailleurs le sens des négociations territoriales en cours sur le traité ou entente de l'Approche Commune entre les Amérindiens et les Métis et le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral. Le peuple Canadien français est le seul abscent de ces négociations. Sans doute en partie pour son nouveau statut civique qui le réduit non seulement à sa linguistique mais à un citoyen, individuel, comme les autres, et non une communauté. Donc, le sol appartient à l'État civique, et non au citoyen.
    La nation civique de sol, une fois l'indépendance faite, je veux bien, mais seulement après une reconnaissance du peuple Canadien français et de ses prérogatives en droit sur le sol. Mais d'ici là, si on continue ainsi à renier notre identité ethnique de peuple fondateur du Québec, nous ne seront plus que des locataires de ce sol dont nous payerons le loyer à ceux avec lesquels nous étions autrefois aussi propriétaires.
    L'identité ethnique, historico-culturelle-linguistique, du peuple Canadien français est "intimement" liée au sol Québécois. Il en est, en droit, comme les autres peuples fondateurs, le propriétaire légitime, et non qu'un citoyen d'un État qui le gèrera en association et aux profits d'entreprises privées ou même de "multinationales".

  • Archives de Vigile Répondre

    16 avril 2007

    Bonjour Monsieur Perry,
    Vous en êtes vous-même un exemple. Le nationalisme démocratique concerne une communauté à la fois culturelle et politique. Il s'agit donc de sortir du faux débat ethnique/civique.
    Car pour adhérer à une communauté culturelle et politique comme la Nation québécoise, nous n'avons pas besoin d'avoir tous les mêmes origines ethniques.
    La culture québécoise, l'identité et l'identification au peuple québécois, comme pour les autres cultures nationales des démocraties modernes, ne s'acquierent pas uniquement de manière ethnique.
    L'ethnicisation de l'identité est en fait accentuée par les politiques de multiculturalisme. Au contraire, le nationalisme québécois souverainiste, s'il a gain de cause, permettra à tous les Québécois d'être traités comme des Québécois d'abord dont la culture commune est celle qui descend de la Nouvelle-France et du Canada français, qu'on appelle maintenant québécoise. Il n'y a que quelques exceptions nationales qui confirment la règle : les Anglophones et les Amérindiens et Inuits du Québec. Leur place est reconnue.
    Mais le projet souverainiste est fondamentalement identitaire : permettre à la culture québécoise d'être majoritaire chez elle, et non plus minoritaire au Canada, d'assimiler elle aussi comme ses deux voisines au lieu de subir des pressions assimilatrices.
    En général, il s'agit de permettre l'épanouissement d'un peuple dans toutes ses facettes, à commencer par ce qui est fondamental, l'identité - qui sera même modifiée psychologiquement par cet acte fondateur.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 avril 2007

    Monsieur Perry,
    Vous entendez, si je comprend bien, nationalisme civique comme une coquille vide sans contenu, l'État sans la Nation, Nation comprise au sens d'une communauté identitaire.
    Mais ce n'est pas le sens entendu par la plupart des gens qui s'en réclament. Ils opposent civique et ethnique, ils opposent droit du sol et droit du sang. L'attribution de la citoyenneté qu'au seuls personnes capables de prouver leur filiation ethnique par les liens du sang (ce qui est un non-sens de toute façon). Le Québec, ni dans son héritage français ni dans son héritage britannique, n'a quelque chose de semblable à du nationalisme ethnique. Notre droit est romain et britannique, c'est le droit du sol qui prévaut chez nous depuis toujours.
    Mais le droit du sol, sur un sol envahi par une puissance étrangère, n'est plus source de justice pour tous. Qu'elle identité est-on sensé adopter en débarquant au Québec, si le Québec est dans le Canada? Il y a en a deux de possible comme nous le savons.
    À l'époque où sont débarqués vos ancêtres, il y avait un nationalisme civique et inclusif promu par les chefs politiques. De plus, il n'y avait pas vraiment de nationalisme canadian, donc soit on restait anglais, écossais, irlandais (dans les villes surtout) ou soit on s'ouvrait à notre pays d'adoption, à son combat pour l'émancipation politique et national, très semblable à celui de l'Irlande en particulier. On sait le grand nombre d'immigrants des Iles britanniques qui sont passé du côté de la justice et de l'égalité pour tous les citoyens indistinctement à l'intérieur d'une nation canadienne sur un pied d'égalité face à l'Angleterre. Ce combat là n'est pas terminé, non plus à cause du rapport que nous avons avec les vrais Anglais, mais en raison du rapport d'inégalité découlant de l'Union forcée qui débouchât sur une fausse confédération des provinces et la naissance d'une deuxième nationalité canadienne qu'on opposait à la première. (Déjà à cette époque, on affirmait mensongèrement et fallacieusement que la « vieille » nationalité canadienne (française) n'était qu'une histoire de survie de la « race » française, ce qui était très faux et très mesquin venant d'un Québécois assimilé et colonisé comme l'était Sir George-Étienne Cartier.)
    En passant de Canadiens français à Québécois, nous sommes revenu au nationalisme politique qui prévalait au Bas-Canada après une longue période de survivance culturelle et d'ambiguïté quant à la direction politique qu'il fallait prendre pour notre émancipation. Mais le Québec n'est pas encore indépendant et les nationalismes Québécois et Canadiens s'affrontent très visiblement à Montréal. Ce nouveau nationalisme québécois n'a de sens que dans un Québec souverain ou (théoriquement) dans un Québec reconnu comme nation dans la nation par le Canada anglais.
    On travail très fort chez nos adversaires politiques pour que les non-francophones rejette l'identité nationale québécois et y préfèrent l'identité québécoise provinciale et l'identité nationale canadian, ou identité « quécanadienne » sans trait d'union. Pour les éloigner de nous, ils nous présentent, nous les indépendantistes en particulier, comme des personnes rêvant d'un pays où tous le monde est tenu de se conformer à la seule identité du groupe majoritaire, qui les tolère au pire et qui préfèrent les voir disparaître au mieux. Ils nous accusent d'être partisan d'un nationalisme exclusif pour faire peur aux non-francophones et ça fonctionne très très bien, croyez m'en.
    Notre nationalisme est humain et identitaire, notre projet politique est civique et inclusif, il n'y a rien de contradictoire: c'est la parfaite complémentarité. C'est le dialogue entre l'universel et le particulier, entre l'Humanité en général et chacune des nations. Tous les humains peuvent devenir québécois s'ils le choisissent.
    Zach Gebello a bien raison d'affirmer qu'on ne peut réduire la spécificité culturelle canadienne-française à la seule langue française. Notre héritage est beaucoup plus riche et métissé que ça. Le mauvais enseignement de l'histoire a certainement un rôle à jouer dans cette confusion.
    Ce qu'il faut faire ce n'est pas d'affirmer que nous sommes contre le nationalisme civique, ce n'est pas le cas, mais démontrer que notre nation n'est pas libre et que sur le territoire sur lequel nos institutions québécoises existent légalement, elles se trouvent en concurrence déloyale avec les institutions d'une autre nation, qui ni notre existence et nos droits nationaux. Qui est exclusif ici?
    L'emphase que le PQ accorde à A ou à B, en réaction à l'opinion publique fabriquée par les sondages et les médias, ne doit pas amener à la redéfinition de notre nationalisme, ce serait accorder trop d'importance à une simple parti provincial. N'est-ce pas plutôt le parti qu'il faut redéfinir ou simplement le saborder s'il déconne?

  • Archives de Vigile Répondre

    15 avril 2007

    Le nationalisme civique qu'on nous impose depuis trop longtemps est bien plus pernicieux qu'on le croit. Il se prétend inclusif mais est bien loin de l'être réellement.
    Ce nationalisme civique se veut un identitaire réduit à la langue française. À la francophonie.
    Or, comme vous en témoignez dans votre texte, les Canadiens français portent en eux toutes les identités de la fondation du Québec et qui ne sont pas que françaises. Le nationalisme civique exclue toutes ces identités chez le Canadien français afin de le réduire à son déterminant linguistique. Il y a une recherche de la pureté ethnique ici. Les néo-québécois se voient invités à intégrer un peuple absolument francophone et donc se sentiront toujours des immigrants à cause de leurs identités d'origine. Ils ne pourront jamais être de cette pureté francophone. Leur intégration est impossible sans qu'ils subissent la même réduction que nous. Un idée qui les répugne, avec raison.
    À mon avis, ce penchant à l'épuration ethnique est un vestige de notre passé catholique que dans notre empressement à se laïciser n'avons pas pris le temps de remettre en question. L'Église, qui dominait l'enseignement, s'assurrait de nous montrer une image pure de notre nation. Une image bien blanche française et catholique. Notre métissage avec des protestants et surtout avec les indiens était sytématiquement et fortement nié.
    Les déclarations de savants, tel le grand ethnologue Jacques Rousseau; "Plus de 40% des Canadiens français ont du sang indien. Et à partager leur pays nous avons fini par leur ressembler." ne faisaient pas parti du curriculum chez les frères des écoles chrétiennes.
    C'est en partie pourquoi Gérard Bouchard remonte son concept civique à l'arrivée de Cartier, à la Nouvelle France, en chevauchant complètement nos souches canadiennes française. Notre histoire commence en France et après une longue période catholique et de noirceur nous avons notre petite récolution française bien à nous, grâce à nos "lumières", et ne reste plus qu'à faire la république.
    La francophonie d'Amérique. Une petite France, quoi. Toujours la Nouvelle France.
    Toute notre spécificité canadienne française, nos liens intimes et métissages autant génétiques que culturels entre les autres communautés et surtout les indiens, pendant 400 ans, bref, tout ce qui fait que de Français nous sommes devenu un nouveau peuple unique sur une terre qui n'a rien de la France et un mode de vie qui n'en a pas plus, a été balayé, renié, effacé, pour vouloir refaire de nous des Français. Des francophones.
    Comment s'étonner alors que pas même le PQ ne dénonce de toutes ses forces l'entreprise d'Ottawa de faire du 400eme de Québec, à coup de 100 millions, une gigantesque commandites de propagande célébrant la victoire de la colonisation britannique sur le peuple Canadien français et en poussant l'insulte jusqu'à en remettre la préparation et la création à des institutions anglaises de Toronto qui s'empressent d'envoyer les invitations aux représentants et dignitaires du conquérant!
    Un 400eme ouvert par la Reine de l'Empire colonisateur, suivit d'expositions par les communautés collaboratrices traditionelles, et clôt par un cirque à la gloire du multiculturalisme canadian trudeauiste!
    Le Temps des Bouffons en Haute Définition! Et non pas à l'abri des regards au Queen Elizabeth de Montréal, mais à la face du méprisé et en grandes pompes au coeur même de sa Capitale Nationale!