La feuille de route

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Les spéculations partisanes de Michel David






Au lendemain du référendum de septembre 2014 en Écosse, un consensus semblait s’être dégagé au sein de la famille souverainiste. L’entente sur le libellé de la question négociée avec le gouvernement britannique devait servir de modèle lors du prochain référendum au Québec. Si Ottawa approuvait la question, les résultats ne pourraient pas être contestés, ce qui éliminerait le problème posé par la Loi sur la clarté référendaire.


 

Même si le camp du Non écossais avait eu recours à des arguments fondés sur la peur qui rappelaient beaucoup le débat de 1995, l’entente sur la question en avait rassuré plusieurs sur l’après-référendum, quels que soient les résultats, de sorte que la campagne s’était déroulée dans un climat relativement serein.


 

Ce que propose l’exécutif du PQ en remplacement de l’article 1 du programme semble toutefois écarter un tel scénario, dans la mesure où ça laisse penser que le référendum ne porterait pas sur une question à l’écossaise — « Le Québec devrait-il être un pays indépendant ? » —, mais plutôt sur un projet de constitution.


 

Le libellé de la « proposition principale » qui sera déposée en fin de semaine au Conseil national est le suivant : « Ce travail permettra de présenter, lors de l’élection de 2022 qui se déroulera selon un nouveau mode de scrutin proportionnel mixte régionalisé, une feuille de route commune vers l’indépendance qui mobilisera une coalition encore plus large que celle réunie par le Oui de 1995. Ce rassemblement et cette mobilisation seront essentiels pour l’obtention d’une majorité parlementaire en 2022 et d’une majorité référendaire par la suite. »


 

Il n’est évidemment pas question de formuler la question référendaire des années à l’avance, mais une telle démarche s’inspire nettement moins de l’Écosse que de la « feuille de route » catalane, dont la plus récente mise à jour prévoit un processus d’accession à l’indépendance qui culminerait dans un référendum sur un projet de constitution. Au cours d’une rencontre avec Le Devoir mercredi dernier, Jean-François Lisée a reconnu que ce scénario n’était pas exclu.


 

 


Ce n’est vraisemblablement que sur cette base qu’une entente pourrait intervenir avec Québec solidaire, qui serait un élément essentiel de cette « coalition » qu’on souhaite recréer. L’élection d’une assemblée constituante et la tenue d’un référendum sur la constitution d’un Québec indépendant sont au coeur de la démarche proposée par QS.


 

Le PQ aura déjà fort à faire pour convaincre ses interlocuteurs qu’il serait préférable que cette assemblée constituante ne soit pas élue au suffrage universel, comme cela est prévu dans le programme de QS, qui voit là « un acte réellement fondateur ». Si tel était le cas, l’assemblée risquerait fort d’être composée d’une majorité de fédéralistes à qui il serait pour le moins paradoxal de confier la rédaction de la constitution d’un État souverain.


 

L’expérience enseigne qu’il ne faut pas présumer de la facilité de mener à bien la réforme du mode de scrutin que le PQ souhaite voir terminée à temps pour les élections de 2022, mais l’introduction de la proportionnelle pourrait alors rendre l’appui de QS indispensable à la formation d’un gouvernement péquiste, ce qui renforcerait encore le pouvoir de négociation du partenaire solidaire.


 

 


Un référendum sur un projet de constitution serait tout à fait légitime. Les travaux de l’assemblée constituante, auxquels on s’assurerait sans doute de donner la plus grande visibilité possible, pourraient aussi constituer un exercice pédagogique d’une grande efficacité qui stimulerait la mobilisation souhaitée.


 

Il ne faudrait cependant pas s’attendre à une grande collaboration du gouvernement fédéral, dont la bonne volonté ne saurait être présumée. La condition de l’entente intervenue entre Édimbourg et Londres, en 2014, reposait sur le caractère simple et clair de la question qui allait être soumise aux Écossais, mais Ottawa aurait beau jeu de faire valoir qu’une question portant sur un projet de constitution pourrait créer de la confusion dans l’esprit des électeurs. Si on en arrive là, il se trouvera bien un disciple de Stéphane Dion pour mettre la planète entière en garde contre cette nouvelle « astuce ». À moins que le père du plan B ne reprenne lui-même du service.


 
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