L’annonce de la démission de Sepp Blatter, patron du football mondial, a mis sous pression Doha, en relançant les spéculations sur l’organisation du Mondial-2022 au Qatar, entachée de soupçons de corruption.
La démission surprise de Sepp Blatter de la présidence de la Fifa, annoncée mardi 2 juin, à peine quelques jours après sa réélection pour un cinquième mandat sur fond de scandale de corruption, peut-elle, par ricochet, priver le Qatar de sa Coupe du monde ? Il est encore très tôt pour s’avancer, mais toujours est-il que cet évènement, qui a ébranlé la planète foot, a relancé les spéculations sur l’organisation du Mondial-2022 dans le Golfe.
Et pour cause : depuis qu’il a remporté, en 2010 et contre toute attente, le droit d’accueillir cet évènement planétaire, l’Émirat gazier est constamment accusé d’avoir "acheté sa Coupe du monde". Cependant Doha a toujours catégoriquement rejeté de telles accusations avancées, notamment, par la presse britannique et française.
"Le dossier du Qatar a gagné parce qu’il était, et de loin, le meilleur de toutes les autres candidatures", a rappelé, mardi, Khalid Ben Mohammed al-Attiyah, ministre qatari des Affaires étrangères, interrogé par France 24 sur les allégations de corruption qui visent son pays. Et d’ajouter : "Visiblement, certains pays, certaines entités et quelques personnes œuvrent contre le notre et lui portent préjudice car ils ne veulent pas qu’un pays arabe et musulman du Moyen-Orient puisse accueillir une compétition de cette importance".
Sauf que ces accusations ont pris un peu plus d’épaisseur depuis la semaine dernière. En effet, parallèlement à la procédure en cours aux États-Unis, le parquet suisse a annoncé avoir ouvert une enquête pour soupçon "de blanchiment d'argent et gestion déloyale" entourant les attributions des Coupes du monde de football de 2018 à la Russie et 2022 au Qatar, et saisi des documents électroniques au siège de la Fifa à Zurich.
L’Angleterre veut récupérer le Mondial-2022
Très vite après le séisme provoqué par l’annonce de la démission de Sepp Blatter, les détracteurs de la candidature qatarie ont lâché leurs premières attaques contre Doha. La première salve a été lancée par Greg Dyke, président de la fédération anglaise de football, qui n’a jamais caché son désir de voir son pays récupérer l’organisation du Mondial-2022. "À la place des organisateurs qataris, je ne dormirais pas très bien", a-t-il indiqué à des médias britanniques. "S'il y a des preuves suggérant que le processus de désignation des candidatures a été corrompu, il faut un nouveau processus, c'est aussi simple que cela."
Ensuite, c’est au président de la Fédération australienne de football, Frank Lowy, de déclarer que la course à l'organisation du Mondial-2022, à laquelle avait participé son pays, n'a "pas été propre". "Nous avons proposé une candidature propre. Je sais que ça n'a pas été le cas pour d'autres (…), je resterai à jamais amèrement déçu du résultat", a-t-il écrit dans une lettre ouverte, publiée mercredi.
Alors concrètement, le Qatar peut-il être recalé ? Si la justice parvient à prouver que la procédure d’attribution de l’organisation de la compétition est entachée de corruption et qu’elle a été viciée, Doha risque gros. Surtout s’il est démontré que l'opération a été orchestrée par l’Émirat gazier. Si la réglementation de la Fifa n’a pas prévu un tel cas, ce vide juridique pourrait justement permettre une interprétation des règles en défaveur du Qatar.
Rien n’empêche en effet, mis à part des considérations financières et des pressions diplomatiques intenses, les nouveaux dirigeants de la fédération, qui ne seront pas connus avant fin 2015 et qui auront à cœur de montrer patte blanche pour se démarquer de la vague de scandales qui a frappé l’instance, d’ordonner l’organisation d’un nouveau vote. La Russie, qui accueillera le Mondial-2018, conformément à un vote lui aussi entaché de soupçons de corruption, pourrait échapper à une telle déconvenue, faute de temps pour permettre à un éventuel remplaçant de préparer le tournoi.
La Bourse de Doha dévisse
Au Qatar en tous cas l’heure n’est pas à la sérénité. Signe de l’inquiétude qui prévaut sur place, la Bourse qatarie a fortement baissé après l’annonce de la démission de Sepp Blatter, qui jouissait du soutien indéfectible de l’Émirat. Ainsi, l’indice Qatar Exchange a plongé de 3,2 % à 11.800 points, après l’ouverture du marché. "La démission de Blatter a suscité une certaine incertitude concernant la Coupe du monde 2022. Il y a des craintes qu’elle n’ouvre la boîte de Pandore concernant l’organisation du mondial", a expliqué à l’AFP Sébastien Henin, responsable de la firme National Investor, basée à Abu Dhabi.
De son côté, le cheikh Hamad Ben Khalifa Bin Ahmed Al-Thani, président de la fédération de football qatarie, a sèchement répliqué à son homologue anglais, Greg Dyke.
"L'instinct de M.Dyke de mettre tout de suite l'accent sur la possibilité de retirer la Coupe du monde au Qatar en dit long sur son opinion de ce qui sera la première Coupe du monde de la Fifa à être organisée au Moyen-Orient", a-t-il indiqué dans un communiqué. "Nous exhortons M.Dyke à laisser le processus juridique suivre son cours et à se concentrer sur sa promesse de livrer une équipe anglaise capable de gagner la Coupe du monde au Qatar en 2022."
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