N’enfermons pas les Québécois dans leur couleur de peau

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Frédéric Bastien, cofondateur d’un organisme pour combattre le racialisme



Nous sommes des Québécois de différents horizons et nous prenons la plume aujourd’hui pour annoncer la création de l’Association des Québécois unis contre le racialisme (AQUR). Notre objectif est de dénoncer les dérives racialistes qui se multiplient et de promouvoir un vivre-ensemble propre à notre réalité distincte. 


Depuis plusieurs années, des idéologues divisent les Québécois selon la couleur de leur peau, tentant de nous convaincre que l’identité raciale des individus devrait primer sur leur identité collective et leur condition socioéconomique. Pour les uns, le «privilège blanc» expliquerait leur situation avantageuse. Pour les autres, le «racisme systémique» serait à la base de leur parcours difficile.


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Ce courant rétrograde découlant de la «politique des identités» vient des États-Unis et a imprégné le Canada anglais. Ce n’est donc pas surprenant que ces dérives soient importées au Québec.


Voilà comment, par exemple, le Programme des chaires de recherche du Canada, avec la complicité des universités, octroie des postes de professeur-chercheur en imposant des quotas fondés sur la race, l’orientation sexuelle et le genre. Plus tôt cette année, l’Université Laval a été critiquée pour cette approche qui excluait l’embauche d’hommes blancs.


Notre premier geste comme organisation a justement été de porter plainte dans ce dossier, à la Commission canadienne des droits de la personne, contre le Programme des chaires, et à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) contre l’Université Laval.



  • Écoutez l'entrevue de Murielle avec Richard Martineau via QUB radio :



Un traitement raciste


Le racialisme, qui sous-entend que ceux qui ont la peau foncée sont incapables de réussir par eux-mêmes, devient une forme de racisme. Aux yeux de certains obsédés de la race, ces concitoyens auraient moins de capacités que les autres et il leur faudrait un passe-droit pour réussir dans la vie. Ce traitement de faveur ne déprécie-t-il pas les efforts et le talent de milliers de Québécois dont la peau n’est pas blanche et qui ont travaillé d’arrache-pied pour prendre leur place dans la société?


Cette idéologie est également incompatible avec une société réellement équitable qui vise une égalité des chances et une réduction des inégalités sociales. Pensons par exemple à ces citoyens issus de milieux défavorisés qui doivent déployer plus d’efforts pour grimper dans l’échelle sociale. Désormais, certains critères d’embauche les empêchent d’accéder à des postes intéressants, puisqu’ils ont la peau blanche. Ironiquement, ce processus d’exclusion vise notamment des groupes qui ont eux-mêmes été victimes de discrimination au Canada jusqu’à tout récemment, comme les Canadiens français et les Juifs.


Une autre avenue


Le racialisme constitue par ailleurs une négation de notre nation. Plutôt que de miser sur ce qui nous rassemble, il encourage les Québécois qui n’ont pas la peau blanche à ne pas s’identifier au Québec, même quand ils ont adopté notre culture. Au sein de l’AQUR, nous regroupons des Québécois de toutes les origines qui partagent la même langue, les mêmes valeurs et une vision universaliste. Nous refusons de nous définir par la couleur de notre peau et de nous enfermer dans des communautés ethniques.


Nous devons nous inspirer de la vision de l’ancien président des États-Unis, Barack Obama, qui fustige les idéologies identitaires. «Je vois des Américains de tous les partis, de toutes les origines, de toutes les religions qui croient que nous sommes plus forts ensemble, Noirs, Blancs, Latinos, Asiatiques, Autochtones, jeunes, vieux, gais, hétéros, hommes, femmes, handicapés, tous prêtant fièrement allégeance au drapeau», a-t-il dit, lors d’une convention démocrate en 2016. Pour lui, la nation américaine élève chacun au-dessus de ces particularismes.


Nous pensons exactement la même chose du Québec. Faisons tous front commun pour mettre fin aux silos identitaires qui nuisent au vivre-ensemble. Une autre avenue est possible.


Murielle Chatelier, Frédéric Bastien et Stephan Fogaing,

de l’Association des Québécois unis contre le racialisme


 




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Frédéric Bastien167 articles

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Titulaire d'un doctorat en relations internationales de l'Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, Frédéric Bastien se spécialise dans l'histoire et la politique internationale. Chargé de cours au département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal, il est l'auteur de Relations particulières, la France face au Québec après de Gaulle et collabore avec plusieurs médias tels que l'Agence France Presse, L'actualité, Le Devoir et La Presse à titre de journaliste. Depuis 2004, il poursuit aussi des recherches sur le développement des relations internationales de la Ville de Montréal en plus d'être chercheur affilié à la Chaire Hector-Fabre en histoire du Québec.