Romain Petitjean, en charge de la coordination et du développement de l’Institut Iliade, présente l’exposition Renaissance(s) dans un entretien réalisé par François Bousquet pour le numéro 179 d’Eléments.
Eléments : Pourquoi une exposition ?
Romain Petitjean : Le projet d’une carte blanche artistique a émergé il y a cinq ans au sein de l’Institut Iliade. Ce sont des dizaines d’artistes, toujours plus nombreux chaque année, principalement amateurs, sensibles à notre vision du monde, qui se sont amusés à illustrer les différents thèmes de nos colloques. Le temps était venu d’exposer une sélection des meilleures réalisations en plein cœur de Paris. Ce sera également l’occasion de découvrir les œuvres originales créées sur le thème « Renaissance(s) », ou celles d’artistes invités comme les portraits réalisés par Jacques Terpant.
Eléments : Ça sera un salon des refusés ?
Romain Petitjean : Plutôt celui des enracinés. Les thèmes abordés ne sont pas très en vogue au sein des habituelles coteries qui agitent le monde de l’art contemporain.
Eléments : Pourquoi les beaux-arts sont-ils le parent pauvre du combat culturel ?
Romain Petitjean : Tout l’enjeu est d’éviter d’avoir des militants politiques qui manient le pinceau (comme ils ont pu gratter la guitare ou prendre la plume), mais d’avoir de véritables artistes, courageux, dont les créations entrent en résonance avec notre vision du monde et notre combat politique.
Eléments : Quels sont vos modèles ?
Romain Petitjean : Je peux en citer deux : Camille Saint-Saëns (1835–1921), pianiste, organiste, célèbre compositeur français du Carnaval des animaux, qui offrit l’opéra Déjanire (1898) à la ville de Béziers dont le théâtre des Arènes fut pendant un temps surnommé la « Bayreuth française » par le milieu artistique. Ainsi Saint-Saëns illustre-t-il la façon dont un artiste, dans tout son génie, s’inscrit au milieu de la cité et du peuple.
L’autre modèle, c’est Christophe Charbonnel, un sculpteur contemporain dont j’ai découvert par hasard les œuvres monumentales, traitant notamment des grands mythes européens. Artiste issu de l’école Duperré, il pratique le modelage depuis une vingtaine d’années. On retrouve dans ses sculptures son admiration pour l’Antiquité : figure hiératique, ligne épurée, modelé précis et nerveux. Charbonnel renoue ainsi avec l’art des grands Anciens. Il a compris que le poète n’est que le passeur d’une Beauté et d’une Tradition venues du fond des âges.
Eléments : Fiat lux ou Fiac luxe ?
Romain Petitjean : Indéniablement la lumière plutôt que les ténèbres de l’escroquerie de l’art contemporain qu’est la Fiac. On peut se demander ce que la postérité retiendra d’œuvres aussi absurdes que le Tree (le fameux « plug anal géant ») de McCarthy et quelle trace laissera notre civilisation dans quelques siècles. L’art officiel cache le véritable art dissident.
Eléments : Figuratif ou abstrait ?
Romain Petitjean : Figuratif. L’exaltation de l’image est même une revendication. Entre l’iconoclasme de religions obscurantistes et les délires déconstructeurs des utopies hors-sol, il faut réaffirmer cette spécificité figurative propre à notre civilisation européenne. Nous entendons redonner sa place à un art articulé dont le public posséderait les codes narratifs, dont il a été dépossédé depuis l’avènement du ready-made duchampien.
Eléments : Pourquoi Renaissance(s) ? Elle sera singulière ou plurielle ?
Romain Petitjean : Plurielle évidemment, comme la vie et la nature florissante. Plurielle par la variété des sujets et des techniques utilisées, par la multiplicité des démarches entreprises par ces artistes proches de l’Institut Iliade : certains sont directeurs artistiques, d’autres simples amateurs du dimanche, mais tous sont réunis par l’amour du beau et du juste qui est la raison d’être de l’Institut Iliade.
« Je marche dans l’Antiquité la plus reculée. Je veux relier le passé au présent, reprendre le souvenir, juger et arriver à compléter. »
Faisons nôtres ces mots de Rodin.
Entretien avec Romain Petitjean réalisé par François Bousquet