«Une cause telle que l’indépendance d’État-Nation exige autre chose qu’une vision simpliste et juridico-fantoche de la démocratie.» (Commentaire de Chrystian Lauzon, 8 février 2016 14h35 Cf. Chronique de Gilles Verrier, 6 février 2016.)
Posons, par hypothèse, que la description de l’État-Nation corresponde à ceci :
Voici une tentative de décrire la nation :
La NATION au sens ÉTATIQUE, juridique
1. C’est-à-dire : l’État-Nation ou l’ensemble d’individus de même origine ou de diverses origines, encadrés de gré ou de force dans un système juridique, constitutionnel, système doté de la souveraineté politique. [P. ex.: l'État fédéral canadien]
2. Dans ce cas, l’accent est mis sur l’État, sur l’aspect politique.
3. L’État-Nation est un groupe de nations ou une seule nation (sens général), le tout soumis à l’action et aux lois d’un gouvernement souverain. [P. ex. : L’union européenne ?]
Supposons que nous voulions expliquer au public ce concept d’État-Nation, comment allons-nous nous y prendre ?
Peut-on admettre que le public veut se faire expliquer par les péquistes ce que veut dire l’indépendance politique du Québec ? Pour une nation indépendante, est-ce que nous pourrions dire simplement qu’elle l’est lorsqu’avec tout voisin plus fort ses relations sont telles qu’elle conserve malgré tout la maîtrise suffisante de sa vie collective (interne et externe), car les nations sont interdépendantes, malgré elles, dans l’univers international. Il s’agit par conséquent de relations interétatiques et non de relations inter-«nationales» (?) intra-étatiques».
Une autre hypothèse de description pourrait être celle-ci :
La NATION au sens sociologique, CULTUREL surtout
C’est un groupe distinct et différent qui semble s’être formé spontanément. Un milieu avant tout culturel qui imprègne, caractérise l’individu. On insiste sur l’unité (et la valeur) de la culture distincte et différente de la communauté. Tous les débats identitaires et multiculturalistes pour les communautés culturelles différentes.
On paraît moins s’intéresser à l’organisation politique. Souvent on admet la nécessité d’une économie nationale mais sans trop s’interroger sur ses rapports avec le politique.
Ce qui ressemble beaucoup aux discours des fédéralistes autonomistes. Il reste qu’un État central existe. Par contre,
LA NATION INDÉPENDANTE
C’est la nation (au sens sociologique (cf. supra) qui maîtrise comme majorité un État souverain.
• Il est exceptionnel de parvenir à cette souveraineté politique…
• Et c’est l’exception de l’exception que d’être une Nation vraiment indépendante (au sens restreint) ayant une maîtrise suffisante de sa vie politique, économique et culturelle.
• L’indépendance et la souveraineté sont toujours limitées ; même la nation la plus forte doit tenir compte des autres nations. Les alliances entre nations sont nécessaires mais entraînent des restrictions.
N. B. La notion de «maîtrise suffisante» correspond à ce « qui a juste la nature, la qualité ou la quantité nécessaires ou satisfaisantes » pour assurer l’indépendance de la vie politique, économique et culturelle de la nation.
La question de la «maîtrise comme majorité d’un État souverain» fait toute la différence.
Serait-ce une hérésie ou de la pensée magique ou unique que de s’entendre les fondamentaux de l’indépendance et de marteler le même discours avec des explications signifiantes communes ? Enfin, le discours se positionnerait vraiment dans l’optique indépendantiste. C’est probablement ce que le public veut entendre des indépendantistes. Y en a marre des discours approximatifs et éculés, autrement dit : «trop rabâchés pour continuer de susciter l'intérêt» (1).
Le 8 juin 2015 paraît cet article dans Le Devoir :
Marco FORTIER, «Le soupir d’un souverainiste fatigué. Pierre Karl Péladeau est «l’homme de la dernière chance»,croit le sociologue Jacques Beauchemin.» Le Devoir, 8 juin 2015. |
Parmi les commentaires, j’ai choisi celui-ci :
Robert LAUZON, «Suggestion d'un processus transparent d'accession à l'indépendance.»
Abonné Le Devoir, 9 juin 2015 05 h 42.
Étape par étape:
1) Convocation de toutes les forces indépendantistes à une assemblée constituante, non-partisane où seront élaborées, de façon consensuelle, les grandes lignes de la nouvelle constitution du Québec-Pays. (Dans les prochains 24 mois)
2) Diffusion la plus large possible de ce projet consensuel de constitution afin de faire connaître le projet de société, les droits et responsabilités des citoyens et des institutions du futur Québec-Pays. (12 mois avant l'élection)
3) Élection sur un MANDAT CLAIR de préparer l'indépendance
4) Campagne de promotion de l'indépendance du Québec. Pédagogie et explication sincère des avantages et réponse précise aux objections et interrogations suscitées.
5) Consultation référendaire et mise en marche du processus d'accession à l'indépendance.
Le Québec devient! [Fin de la citation.]
Nous sommes tous d’accord sur les nécessités de la tactique et des stratégies mais il faut surtout réfléchir en ce moment sur le FAIT de l’indépendance politique. C’est là où le bât-blesse. Le «mandat clair» que réclame Robert Lauzon nous n’y sommes pas parvenus depuis le MSA de René Lévesque. Il y a tout près maintenant de 50 ans. On ne redressera pas cette situation en 24 mois et tout simplement avec une élection générale sans avoir convaincu une majorité démocratique non-équivoque qui va donner son accord sur l’indépendance de la nation québécoise.
Le temps de préparation est très court. Déjà les gouvernements d’Ottawa et du Québec y travaillent à leur façon et à temps plein. N’oubliez pas que dans 16 mois, ce sera le 150e anniversaire de la Confédération, de l’union fédérale très centralisée et de l’unité canadienne. Tout cela a un prix ! Et ils ne sont pas les seules à y coire farouchement. Encore aujourd’hui, une majorité de citoyens et de citoyennes voit les choses à partir des fondamentaux de l’optique fédéraliste teintée plus ou moins fortement par l’optique impérialiste (p. ex. : l’optique impérialiste «n’aime pas trop voir l’idée d’«économie politique» changée en « économie nationale »... (chez les autres)… et insiste sur la «personne» parce que ce qui importe, après tout, c’est l’épanouissement des individus et des familles, etc. ou que l’optique fédéraliste proclame que l’autonomie économique est comprise dans un sens très réaliste, car on sait les liens qui unissent les « Grandes Affaires » dans de vastes ensembles et la nécessité d’un marché étendu... ).
Le libéralisme politique, économique et culturel fait bien l’affaire des impérialistes et des fédéralistes surtout qu’ils sont majoritaires. Finalement, tout nationalisme est «inconsciemment hypocrite» vis-à-vis d’un plus faible… mais pas nécessairement. Par contre, le « principe des nationalités » affirmerait que « chaque nationalité a droit à un État souverain (au sens restreint puisque dans le passé jamais une nation ne s’est complètement suffi à elle-même).
Dans la réalité, toute nation indépendante a besoin absolument d’un État souverain, car c’est la tête du politique, soit l’instrument qui peut mettre l’accent sur le rôle puissant d’intervention, d’organisation du pouvoir politique. La force politique incarnée par l’État est capable de penser, de vouloir, de commander, de déclencher l’action. Autrement dit, la nation possède son agir (par soi) collectif qui lui permet d’exécuter les multiples activités qui constituent la fin de la société comme unité politique indépendante distincte dans le monde.
Par conséquent, toute nation qui ne jouit pas des pouvoirs politiques d’un État souverain subit une oppression par substitution. Autrement dit :
«Le remplacement (ou l’inaction imposée) constitue une oppression.»
(Maurice Séguin, Les Normes.)
Prendre conscience de cette situation collective et réaliser surtout qu’elle nous limite individuellement et collectivement constitue la première étape du «mandat claire» pour un gouvernement souverain au Québec. Vu sur cet angle, je serais d’accord pour dire, comme Robert Lauzon, que la nation indépendante «exige autre chose qu’une vision simpliste et juridico-fantoche de la démocratie.» Puisque la démocratie est l’expression de la souveraineté populaire, alors les indépendantistes doivent persuader la population de la politique publique qui doit conduire à un État français, souverain, jouissant de la reconnaissance internationale.
Êtes-vous pour ou contre ou à moitié, ni chair ni poisson, et toujours à la croisée des chemins?
Un chemin critique s’impose nécessairement aux Québécois afin de cesser d’osciller entre être annexé en permanence ou être indépendant définitivement. La question n’est pas d’ordre imaginaire ou fictif mais pratique. Il faut conduire le Québec à son indépendance nationale et à sa présence au monde par lui-même, d’où le besoin de l’autodétermination collective reconnue par le concert des nations. Seul le chemin de l’unité québécoise peut conduire à cette fin politique.
NOTE
(1) Bruno Deshaies, «Faire du Québec un pays» et réussir n’est pas n’importe quel objectif. Les indépendantistes au tournant des années 1930 et suivantes.» INDÉPENDANCE POLITIQUE DU QUÉBEC 431. Vigile.quebec 23 juin 2015 Visites : 1117 2016-02-11 10:31
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3 commentaires
Bruno Deshaies Répondre
21 octobre 201621-10-2016
J'aimerais vous faire connaître le point de vue de Rémi Cloutier qu'il a mis récemment sur Facebook au sujet de cette Chronique 444 :
Il a complété son point de vue par cette référence aux 1738 études sur l'indépendance du Québec par Miguel Tremblay, Physicien, ancien candidat d'Option nationale dans Laurier-Dorion avec l’appui de son frère bibliothécaire.
Tremblay dixit : «J’ai découvert un corpus important d'études sur l'indépendance publiées dans les années 1990. Il m'a semblé nécessaire de les rendre accessibles gratuitement en ligne.
Puis, il ajoute cette remarque à l’endroit des politiciens indépendantistes :
Je félicite Monsieur Rémi Cloutier d'avoir compris à quel point le statut de «nation annexée» ne correspond pas au statut des nations indépendantes.
Le nouveau discours indépendantiste doit s'atteler à faire comprendre au public la grandeur de ne plus être une nation annexée. Ce changement fondamental concerne la MAÎTRISE DE SA VIE COLLECTIVE à côté d'autres nations, mais en étant indiscutablement maîtresse chez elle (cf. p.j.).
Marcel Haché Répondre
18 février 2016Le mot « indépendance » n’est pas plus difficile à comprendre que le mot Libération ne l’était dans la France occupée.
Les choses sont plus simples qu’il n’y paraît : toute notre nation n’attend pas d’être convaincue de quoi que ce soit. Elle s’accommoderait facilement devant le fait de l’Indépendance. Le goût lui viendrait ensuite, par suite de la détermination d’un gouvernement péquiste décidé. Mais « décidé »…
Un vrai gouvernement, non pas décidé à proposer un autre référendum, poser une question, perdre encore un autre référendum, et puis passer en toute insouciance à une p’tite gouvernance provinciale pépère. Cette avenue-là est désormais bloquée pour toujours. C’est ma conviction que l’électorat ne donnera plus jamais-jamais-jamais pareille occasion au P.Q. pour qu’il procède ainsi. Et c’est bien également le soupçon de la gang à Couillard, qui prévoient tous à l’unisson que le P.L.Q. sera au pouvoir pour une génération.
Que le P.Q. se fasse plutôt élire sur quelque sujet que ce soit. N’importe lequel. Mais qu’ensuite il reste simplement « décidé ». « Décidé » à faire ce qu’il y a à faire, plutôt qu’à dire. Nous sommes plus que fatigués des grands sparages.
La nation s’accommoderait facilement du nouvel état-nation comme les français s’étaient accommodés de la Libération avant d’y avoir pris goût…
Archives de Vigile Répondre
16 février 2016Je défie quiconque de comprendre votre charabia.