L'enseignement d'au moins une langue seconde est partie intégrante de tous les programmes scolaires du monde, au même titre que les mathématiques, l'histoire ou la géographie.
Pierre Calvé - L'auteur a été professeur au département de linguistique de l'Université d'Ottawa de 1969 à 2001 et doyen de cette faculté de 1994 à 1997.*
Au sujet du dossier de l'apprentissage intensif de l'anglais pendant la moitié de la 6e année, voici quelques faits difficilement contestables.
1. L'enseignement d'au moins une langue seconde est partie intégrante de tous les programmes scolaires du monde, au même titre que les mathématiques, l'histoire ou la géographie. Et la langue seconde la plus enseignée dans le monde est l'anglais, dont l'utilité, en tant que lingua franca, n'est plus à démontrer. De plus, il a été scientifiquement établi que les personnes bilingues sont moins ethnocentriques, moins xénophobes, et jouissent de plusieurs avantages sur le plan cognitif.
2. Une langue est avant tout un outil de communication, et l'étudier sans arriver à la maîtriser convenablement est une perte de temps. Or l'histoire nous a appris, et de nombreuses expériences sur le terrain l'ont confirmé, qu'enseigner une langue de façon intensive, et avant l'adolescence, est infiniment plus efficace que l'enseignement traditionnel à raison de quelques minutes par jour, étalées sur plusieurs années. Ce n'est qu'une fois franchi, dans le cadre d'un programme intensif, le «seuil du bilinguisme fonctionnel», qu'on peut efficacement, par des approches plus traditionnelles, perfectionner cette compétence, tant sur le plan oral que sur celui de l'écrit.
3. On ne perd pas sa langue maternelle parce qu'on est bilingue ou parce qu'on la saupoudre de mots empruntés d'une autre langue (sur ce point, les Québécois unilingues emploient au moins autant de mots anglais que les bilingues, à cette différence près que bien souvent ils n'en sont pas conscients). Une langue disparaît parce que ses espaces vitaux (famille, école, quartier) et ses fonctions propres (travail, loisirs) disparaissent un à un, et ceux qui «passent à l'autre langue» sont ceux qui subissent de telles conditions. Les francophones ne se mettront pas à parler anglais entre eux parce qu'ils sont bilingues.
4. Cela étant dit, il est très important, dans un contexte nord-américain, que des mesures, telles que la loi 101 et certaines politiques d'immigration, soient maintenues afin de favoriser le maintien des conditions devant permettre au français de survivre et de s'épanouir. Il ne faut toutefois pas succomber à la tentation de la protection à outrance, au point par exemple d'interdire à des étudiants adultes de choisir d'étudier dans l'institution de leur choix.
5. Ce n'est pas un semestre d'anglais intensif qui va accentuer les faiblesses des étudiants en français ou nous empêcher d'y remédier. Autant il est essentiel de revoir nos approches à l'enseignement de l'anglais, autant il serait important de revoir non seulement l'enseignement de la langue maternelle, mais ce monstre qu'est devenu tout à fait artificiellement notre système orthographique, lequel monopolise une partie disproportionnée du temps d'apprentissage des diverses compétences en langue maternelle.
6. Il est évident qu'une telle approche intensive devra être implantée avec discernement, et sans doute progressivement, selon les types de clientèles scolaires (immigrants, apprenants déjà bilingues) et selon les disponibilités des enseignants, dont on devra exiger non seulement une bonne connaissance de l'anglais, mais aussi une formation adéquate.
* L'auteur est détenteur d'un doctorat en linguistique de l'Université Georgetown, à Washington.
L'apprentissage intensif de l'anglais est très efficace
L'enseignement d'au moins une langue seconde est partie intégrante de tous les programmes scolaires du monde, au même titre que les mathématiques, l'histoire ou la géographie.
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