Le mariage industriel franco-allemand entre Alstom et Siemens, annoncé le 26 septembre, provoque peu de remous outre-Rhin mais fait fortement grincer des dents en France : politiques et syndicats déplorent une perte pour l'industrie hexagonale.
Alors que l'annonce de la fusion entre le constructeur ferroviaire Alstom et la branche ferroviaire du groupe allemand Siemens reçoit un accueil plutôt favorable en Allemagne, elle suscite des réactions pour le moins mitigées en France.
Le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a beau assurer au micro de BFMTV le 28 septembre que le gouvernement a «les moyens d'exercer la pression nécessaire» pour que Siemens tienne ses engagement sur l'emploi, les opposants à la fusion, de droite comme de gauche, n'ont que des mots durs pour qualifier ce rapprochement industriel.
Sur la même ligne, le patron d'Alstom, Henri Poupart-Lafarge, qui sera maintenu à son poste dans l'entreprise, a déclaré le 28 septembre que ce choix stratégique permettrait de créer des emplois et a déploré le «patriotisme mal placé» des opposants à la fusion.
La France vendue à l'encan ?
Concrètement, la fusion annoncée le 26 septembre se traduira par une prise de contrôle de la société française par le groupe allemand, qui sera majoritaire au conseil d'administration. C'est ce point tout particulièrement qui fait froncer les sourcils dans la sphère politique française.
En marge d'une conférence de presse, Bernard Accoyer, secrétaire général des Républicains (LR), a regretté les récentes fusions industrielles françaises : «STX aux Italiens, Alstom aux Allemands, passent aux mains étrangères ! Emmanuel Macron avait pourtant dit qu'il n'y avait pas de grand pays sans grandes industries.» Il faisait ainsi référence à la reprises des chantiers navals STX basés à Saint-Nazaire par l'italien Fincantieri.
«La France industrielle bradée», pour Woerth
Eric Woerth, président de la commission des finances, s'est également «étonné», estimant que contrairement à STX, dans le cas de la fusion d'Alstom, «la France industrielle» était «bradée».
L'ancien ministre du Budget de François Fillon a également tenu à clarifier : «Alstom ne devient pas franco-allemand, Alstom devient allemand.»
Pour Arnaud Montebourg, en revanche, «il n'est pas trop tard pour nationaliser Alstom.» Dans une tribune publiée dans Le Monde, l'ancien ministre de l'Economie est revenu sur son amour du made in France et a dit toute sa «tristesse» face à ce projet qu'il qualifie de «désastre national annoncé», tout en assurant «qu'il pourrait en être autrement». «Il n’est pas trop tard pour reprendre les négociations jusqu'à une alliance entre égaux», assure-t-il.
Macron en ligne de mire pour Le Pen et Lienemann
La présidente du Front national (FN) Marine Le Pen évoque, quant à elle, «une éviscération de l'industrie française» par le président Emmanuel Macron.
Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice socialiste, a également mis en cause directement le chef de l'Etat : «Macron abandonne des pans majeurs de l'industrie française. Discours pipeau, réalité : la perte de contrôle de la France.»