Brigitte Saint-Pierre - Le président général de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SSJBM), Mario Beaulieu, fait valoir que le français connaît un recul dans la métropole. À son avis, la question linguistique est en outre devenue taboue. «Il faut ramener la question de la langue dans le débat public», affirme-t-il. Dans ce contexte, la SSJBM a, selon lui, un rôle important à jouer.
Selon Mario Beaulieu, président général de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SSJBM), il est urgent d’agir pour consolider la place du français dans la métropole. «Les francophones de langue maternelle sont devenus minoritaires sur l’île de Montréal. Les francophones de langue d’usage à la maison sont aussi en déclin rapide», note le président général. La proportion des résidants de l’île de Montréal parlant le plus souvent français à la maison est passée de 56,4 % en 2001 à 54,2 % en 2006, selon les données du recensement.
«Les transferts linguistiques se font encore de façon disproportionnée vers l’anglais», affirme en outre M. Beaulieu. En 2006, les résidants de l’île de Montréal qui avaient une langue maternelle autre que l’anglais ou le français et qui avaient changé de langue d’usage à la maison avaient opté dans une proportion d’environ 55 % pour l’anglais et de 45 % pour le français. Pour l’ensemble du Québec, ces proportions étaient respectivement de 49 % et de 51 %. «Normalement, ça devrait être à 90 % vers le français», estime M. Beaulieu.
Mesures
Selon la SSJBM, plusieurs
mesures pourraient être mises
de l'avant dans le but d'assurer
l'épanouissement du français
au Québec. «On pense qu'il est
essentiel d'appliquer la loi 101
aux cégeps et de s'assurer qu'il y
a un financement équitable des
universités francophones et anglophones», indique par exemple
le président général. M. Beaulieu affirme que les universités
anglophones sont surfinancées par rapport au poids démographique dé la communauté anglophone au Québec.
En 2007-2008, les établissements anglophones ont reçu
près de 23 % des subventions
générales versées aux universités par le gouvernement du
Québec. Lors du recense-
ment de 2006, 8,2 % des Québécois avaient l'anglais pour
langue maternelle, et 79,6 %,
le français.
Selon le président général
de la SSJBM, les allophones
qui ont étudié au cégep ou à l'université en anglais sont
plus susceptibles de se tourner
vers cette langue par la suite.
«Quand les nouveaux arrivants
vont à l'université en anglais,
ils apprennent tout le vocabulaire de leur profession en anglais.
Donc, ça les incite à travailler
en anglais.» M. Beaulieu fait en
outre valoir que les gens formés dans les établissements
d'enseignement anglophones
sont davantage susceptibles de
quitter le Québec.
Le président général déplore également que l'administration publique québécoise
s'adresse en anglais à une
bonne partie des allophones
et il croit que cela diminue le
pouvoir d'attraction du français. Selon des informations
obtenues par Le Devoir l'an
dernier, jusqu'aux trois
quarts des immigrants allophones qui s'établissaient
dans la région de Montréal se
faisaient servir en anglais, à ',
leur demande, par les ministères et les organismes publics québécois. Le gouvernement québécois a par la suite
affirmé que cette situation ne
serait plus permanente.
M. Beaulieu estime que la
SSJBM a un travail de pédagogie à faire, «pour expliquer l'importance d'avoir une langue
commune. C'est le contraire de
l'exclusion. Si le français est la
véritable langue commune de
tous les Québécois, c'est ce qui
permet de rassembler les nouveaux arrivants, lés gens de
toutes origines dans un même espace public.»
Le président général de la
SSJBM inscrit la question linguistique dans celle de la diversité culturelle. «Est-ce qu'on
veut une mondialisation qui va
aboutir à une uniformisation
des cultures ou à l'anglicisation
de la planète, ou est-ce qu'on
veut une mondialisation dans le
respect des langues et des cultures nationales?»
Interventions
La question linguistique est
l'une des priorités de la SSJBM.
L'organisme a par exemple récemment déploré le fait que les
conservateurs et les libéraux
ont voté contre le projet de loi
présenté par le Bloc québécois
pour que les entreprises régies
par le Code canadien du travail
et installées au Québec soient
assujetties à la Charte de la
langue française.
La SSJBM prend également part à une tournée régionale de la coalition pour un seul méga-CHU (centre hospitalier universitaire) à Montréal. Cette coalition invoque «la hauteur excessive des investissements requis» et «l’importance de préserver des fonds pour le développement des services de santé à l’extérieur de Montréal». Elle affirme que les investissements faits dans le Centre universitaire de santé McGill «sont beaucoup plus élevés que ce que requiert le nombre d’anglophones à Montréal, qu’ils sont peu rentables, étant donné l’exode permanent des médecins formés à McGill, et qu’ils perpétuent la division traditionnelle entre anglophones et francophones». Elle s’inquiète enfin des effets de ces investissements sur l’usage du français comme langue de travail, de recherche et d’enseignement au Québec.
La souveraineté du Québec est en outre l’un des chevaux de bataille de la SSJBM, qui cherche à faire en sorte que les efforts des différents groupes indépendantistes soient coordonnés. «Si on veut faire du Québec un pays indépendant, c’est parce qu’on est une nation. Ce qui fait de nous une nation distincte, c’est qu’on a une langue, une culture et une histoire qui nous sont propres, ainsi qu’une spécificité sur le plan économique», affirme M. Beaulieu.
La SSJBM travaille aussi à l’établissement d’une coalition pour la promotion de l’enseignement de l’histoire nationale. «Les cours en 3e et 4e secondaires ont largement évacué l’histoire nationale», affirme le président général. Mario Beaulieu estime qu’il est essentiel que les Québécois connaissent bien leur histoire. «C’est la connaissance du passé qui fonde notre compréhension du présent et nos décisions quant à l’avenir.»
La SSJBM compte à l’heure actuelle environ 3000 membres, indique son président général. «On a fait une réforme en profondeur de toute l’organisation, pour se donner une meilleure capacité d’action. On a commencé à augmenter le nombre de membres de la Société Saint-Jean-Baptiste. On veut aussi rajeunir nos membres. C’est déjà commencé, mais on va intensifier nos opérations de recrutement», affirme M. Beaulieu.
La Société Saint-jean-Baptiste de Montréal organise des activités de francisation pour les
nouveaux arrivants, ainsi que
des conférences sur l'indépendance et sur la situation linguistique. Elle remet notamment
aussi des prix. «Nos objectifs,
c'est de décupler nos actions, de
mieux organiser nos ressources
pour pouvoir avoir une force de
mobilisation plus importante»,
indique M. Beaulieu.
Présidence de la SSJBM
«Il faut ramener la question de la langue dans le débat public»
La SSJBM souhaite intensifier ses actions et avoir une force de mobilisation plus importante
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