La Coalition avenir Québec (CAQ) refuse de se positionner sur la question nationale, prétextant qu'elle divise et nous empêche de nous attaquer aux vrais problèmes du Québec. Selon son chef François Legault, il faudrait d'abord régler nos problèmes et nous enrichir, ces dix prochaines années, avant de penser reposer la question de notre souveraineté.
C'est absurde.
Tout d'abord, une évidence: un Québec souverain serait très riche. Ainsi, selon un classement établi par l'Institut de la statistique du Québec à l'aide du PIB par habitant, le Québec se situe au 28e rang sur 235 pays dans le monde en 2009, donc parmi les 12 % les plus riches. Les voisins du Québec dans ce classement sont des pays tels que le Japon (27), la France (26), le Royaume-Uni (24) ou encore la Nouvelle-Zélande (32); rien de gênant.
L'idée de la CAQ de s'enrichir encore plus avant de pouvoir devenir souverain apparaît alors absurde. Car si on accepte cette logique, les 207 pays qui nous suivent au classement seraient des imposteurs, qui devraient renoncer à leur souveraineté, le temps de s'enrichir. Ajoutons que les pays nous devançant au classement sont devenus souverains à des niveaux de richesse beaucoup plus faibles que le nôtre aujourd'hui. L'exigence caquiste d'une richesse encore plus élevée est donc sans fondement.
De la même manière, l'idée caquiste qu'il faille régler nos problèmes avant de devenir souverain ne tient pas la route. Un grand nombre de pays, devant et derrière nous au classement, ont des problèmes à régler. Dans de nombreux cas, ces problèmes sont au moins aussi graves que les nôtres, et dans certains cas, ils sont bien plus graves. Ces pays devraient-ils renoncer à leur souveraineté, le temps de régler leurs problèmes? Les nations qui ont accédé à la souveraineté à travers l'histoire l'ont-elles fait dans un moment de grâce, pendant une période où elles n'avaient aucun problème? La réponse à ces questions est évidente et on doit conclure que cette autre idée caquiste n'est pas plus convaincante.
Je crois, quant à moi, que la question de notre souveraineté est plus actuelle et pertinente que jamais. Elle nous permettrait de mettre la main sur les moyens qui nous manquent cruellement pour nous enrichir encore plus et pour régler nos problèmes.
Avec la souveraineté, les Québécois obtiendront des pouvoirs fondamentaux en matière de culture et de télécommunication, de justice criminelle, de propriété intellectuelle, de lutte contre les monopoles, ou encore d'assurance-emploi, tous actuellement entre les mains du Parlement fédéral dans lequel nous sommes une minorité.
Avec la souveraineté, nous cesserons de partager avec ce même Parlement fédéral nos pouvoirs en agriculture, en environnement et en immigration. Avec la souveraineté, ce sera la fin des intrusions du Parlement fédéral dans les secteurs de la santé ou de l'éducation. Avec la souveraineté, le Québec négociera lui-même ses traités avec ses partenaires internationaux alors qu'aujourd'hui, le gouvernement Harper parle en notre nom et défend le plus souvent les intérêts du Canada, à notre détriment.
Avec les moyens et les pouvoirs qu'elle implique, la souveraineté permettra, entre autres, d'atteindre notre indépendance énergétique, de maintenir le registre des armes à feu, de traiter les jeunes contrevenants selon nos valeurs, de mieux protéger notre langue, de ne remplir qu'une seule déclaration de revenus, de donner des dents à la loi contre les monopoles, d'accroître la concurrence dans le secteur des télécommunications, de signer des traités à notre avantage, de faire entendre notre voix et nos valeurs dans les forums internationaux, ou encore de corriger les lacunes du programme d'assurance-emploi et d'y intégrer de véritables parcours de formation pour nos travailleurs.
La souveraineté permettra au Québec de se doter d'une politique industrielle axée sur ses priorités plutôt que de subir la politique canadienne avantageant largement le secteur de l'automobile ontarien et celui des hydrocarbures de l'Ouest. Enfin, la souveraineté permettra au Québec de se porter à la défense de ses secteurs économiques stratégiques. On a vu ce que peut faire un pays lorsqu'Ottawa a bloqué l'achat par des intérêts étrangers de Potash Corp. de la Saskatchewan en 2010. François Legault affirme que le Québec aurait dû faire de même pour bloquer l'achat d'Alcan par des intérêts étrangers. Il s'illusionne, car pour le faire, il faut être un pays. Le Québec ne peut rien faire de tel en tant que province.
Prétendre, comme les caquistes le font, que le statut du Québec n'a pas d'impact sur notre capacité à intervenir dans notre économie, cela n'est tout simplement pas sérieux.
En définitive, je suis convaincu qu'une nation est plus à même de s'enrichir et de surmonter ses difficultés lorsqu'elle dispose de tous les leviers décisionnels. La CAQ offre aux Québécois un cul-de-sac de dix ans alors que le Parti libéral du Québec voudrait que l'impasse dure des siècles. À l'inverse, le Parti québécois propose la souveraineté, laquelle permettra aux Québécois de prendre le véritable contrôle de leur destin, de régler leurs problèmes à leur manière, avec tous les moyens d'une nation normale et libre.
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Nicolas Marceau - Député de Rousseau à l'Assemblée nationale du Québec et porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances et de développement économique
Gare au cul-de-sac caquiste!
2011 - Bilan et perspectives
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Nicolas Marceau - Député de Rousseau à l'Assemblée nationale du Québec et porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances et de développement économique
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