François Legault et l’art de la franchise

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Qui remplacera Legault pour un troisième mandat caquiste ?



Lorsqu’un premier ministre démissionne avant la fin d’un mandat, c’est souvent parce qu’il y a du psychodrame dans l’air. D’où l’étonnement de voir François Legault, en pleine lune de miel prolongée, télégraphier déjà son éventuel départ. Si la CAQ est réélue en 2022, lance-t-il avec franchise en entrevue à l’agence Presse canadienne, il ne terminera pas son deuxième mandat. Mémo aux dauphins et dauphines...




Remarquez qu’il a toujours dit ne pas être un « politicien de carrière ». Or, si l’on combine son long passage au PQ à ses années à la tête de la CAQ, s’il partait en 2025, ça lui ferait tout de même 24 ans en politique active. Il en rejoindrait presque Jean Charest et ses 28 années au fédéral et au Québec.




Le premier ministre Legault précise aussi que le « pouvoir » n’est pas sa première motivation. Ce qu’il veut, dit-il, est de pousser les Québécois à être « meilleurs » et « plus fiers ». Il est vrai que la « fierté » est son thème central depuis longtemps. Elle l’était aussi dans ses années péquistes comme dauphin de Lucien Bouchard, ministre aux multiples chapeaux, souverainiste « pressé » et « progressiste ».




Départ




Malgré ce qu’il en a dit, le sommet du pouvoir, il le visait pourtant déjà. La raison est un grand classique : sans pouvoir, pas d’action ni changement. D’où son départ du PQ en 2009. Après que la chefferie fut allée tour à tour à Bernard Landry, André Boisclair et Pauline Marois, le constat devenait incontournable. À 52 ans, si jamais François Legault en devenait un jour le chef, l’attente risquait d’être encore longue.




L’heure était donc venue de sauter la clôture. Un saut qui, là aussi, misait sur une prise rêvée du pouvoir. Cette fois-là, l’entrepreneur en lui créa son propre véhicule avec l’ex-recruteur libéral Charles Sirois : la Coalition avenir Québec. De fait, jamais un nom de parti politique n’aura été aussi prémonitoire.




La « coalition » se bâtirait en effet par un recrutement actif chez les péquistes, libéraux et conservateurs. Le côté « Québec » de la CAQ s’inscrirait dans son « virage nationaliste » opéré en 2015 avec son nouveau logo bleu-Québec. L’« avenir », il le redessinerait carrément en 2018 en mettant fin à un demi-siècle d’alternance PLQ-PQ.




Prémonitoire




Pour le faire, il a su profiter de deux tendances lourdes dans le Québec postréférendaire. Primo, le recul constant du PQ et de son option depuis 20 ans. Deuxio, l’abandon par le PLQ de sa fibre nationaliste sous messieurs Charest et Couillard. La nature abhorrant le vide, François Legault et la CAQ ont pu occuper le terrain nationaliste laissé vacant par ses deux adversaires. Ce terrain, ils l’ont même grugé tôt.




Dès sa toute première élection générale en 2012, la CAQ raflait 27 % des voix. Ce qui n’en laissait plus que 32 % au PQ et 31 % au PLQ. Comme premier avertissement, c’était du très sérieux. À leurs risques et périls, les deux vieux partis l’ont ignoré. Comme disent les Anglais : the rest is history.






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