Dans son numéro de Novembre-Décembre 2011 L'Action nationale propose 11 essais destinés à envisager la suite des choses.
Bilan… prospectif
_ André Poupart
Gérard Chaliand, fin connaisseur des peuples émergeants, écrit dans ses mémoires, parlant du nationalisme québécois, qu’il lui manquait : « une élite éclairée et politiquement avisée et une population décidée à prendre des risques. » (La pointe du couteau, Robert Laffont, 2011, p. 318)
Qu’il est difficile…qu’il est difficile
_ Pierre-Paul Sénéchal
Impensable au lendemain du référendum de 1995, alors qu’un sondage indiquait qu’une majorité de Québécois prévoyait la souveraineté au terme d’une période de cinq ans, la longue marche du Québec semble brusquement interrompue. En mode offensif depuis plus de quarante ans et croyant avoir réalisé une avancée irréversible, le mouvement souverainiste se retrouve maintenant sur la défensive avec un soutien populaire oscillant entre 30 % et 35 %.
Les chantres du ratatinement
_ Pierre Serré
Dans Le Devoir du 13 septembre dernier (« Embardées suicidaires »), Claude Morin, père de l’étapisme (la stratégie d’accès à l’indépendance adoptée par René Lévesque), aussi père des échecs référendaire et post-référendaire de 1980, a qualifié d’« affirmation nationale » la voie d’action qu’il proposait, laquelle ressemblait à la « gouverne souverainiste » défendue par Pauline Marois, chef du Parti québécois (PQ). La lecture commune de ces derniers de l’évolution politique du Québec repose sur une interprétation inadéquate des rapports de force au Québec. Celle-ci en ignore notamment les acteurs principaux, les deux groupes linguistiques, pour aboutir à une série de propositions interprétatives aussi décalées les unes que les autres, couvrant autant le début des années soixante (dont le sens de la Révolution tranquille) que les décennies suivantes jusqu’à aujourd’hui. Il en ressort une impression de ratatinement des horizons politiques québécois, l’absence de perspectives tant du côté de l’indépendance que d’ouverture du côté du Canada anglais. Or l’origine du cul-de-sac tient essentiellement de la politique interne du Québec.
La restructuration politique au Québec et la question nationale
_ Michel Roche
Depuis le début des années 2000, le Québec se trouve en pleine restructuration politique. Les partis traditionnels s’érodent, de nouveaux partis apparaissent, l’électorat devient plus imprévisible. Historiquement, le système politique québécois a été caractérisé par le bipartisme, qui se traduit par l’alternance de deux partis et des gouvernements majoritaires. Le bipartisme a vu les libéraux affronter les conservateurs pendant plusieurs décennies, puis les libéraux et les unionistes, enfin, les libéraux et les péquistes. Les tiers partis réussissaient parfois à faire élire quelques députés, mais sans réellement menacer la majorité ministérielle.
Que faut-il faire maintenant ?
_ Michel Seymour
Le peuple québécois cherche depuis la conquête de 1759 à obtenir la reconnaissance dans le Canada. Cette démarche a tout d’abord abouti à la révolte des Patriotes. On a cru ensuite l’avoir obtenue avec le pacte fédératif canadien de 1867 consacrant le fédéralisme canadien. Le journal La Minerve faisait alors état d’une union entre « nos deux races ». C’était la doctrine des deux peuples fondateurs. Mais il s’est progressivement avéré que le Canada n’y adhérait pas.
Revisiter la démocratie de représentation au Québec
_ Denis Monière
Les institutions politiques diffèrent d’un pays à l’autre, ces différences reflétant l’expérience historique et les traits culturels de chaque communauté politique. Régimes parlementaires ou présidentiels, confusion ou séparation des pouvoirs, mode de délégation de l’autorité et de la légitimité, système de partis se sont institués en fonction de conjonctures historiques particulières afin de répondre aux besoins d’efficacité et de stabilité des peuples.
Changer la conjoncture ! Changer de cap !
_ Gilbert Paquette
La conjoncture n’est pas très bonne actuellement, mais une conjoncture, cela se change ! Et peut-être est-elle en train de changer ! Laissons parler Hélène Pedneault qui écrivait dans le numéro de mai 2003 de L'Action nationale :
Il n’y a pas de conjoncture favorable ou défavorable. Il n’y a que la force et la clarté du désir, qu’il s’agisse d’un individu ou d’un peuple. […] Une conjoncture n’existe pas en soi, c’est une vue de l’esprit. Ce n’est pas un complot organisé, ni un groupe de pression puissant, ni une fatalité. Une conjoncture, ce n’est rien d’autre qu’un ensemble de facteurs qu’on peut analyser à son gré selon son désir profond, des pièces de Lego qu’on bouge sans arrêt, des faits qu’on nourrit ou qu’on décide d’ignorer pour qu’advienne le rêve caressé. […] À partir de maintenant, il faudra faire de la place pour le désir de pays. Personne ne peut résister à une telle énergie cumulée. Les plus incertains se laisseront porter par la vague, les adversaires n’auront d’autre choix que de nous laisser passer (p. 196).
Retrouver le chemin de la souveraineté
_ Anne Legaré
Le désarroi est grand, le pessimisme est lourd à porter. Tous ressentent que quelque chose s’est abîmé au cours des derniers mois. Le rêve ? Mais lequel ? Tous, ou presque tous, diront que c’est le rêve d’un pays dont l’objet semble de plus en plus leur échapper. Chacun s’était laissé enfermer dans une logique étatiste au lieu de cultiver son appartenance à une société libre, seul ferment de démocratie et d’avenir. Le moment demande de revenir sur soi, de redevenir le sujet éclairé de nos actes. Le moment demande de s’interroger sur les représentations plus ou moins conscientes que nous avons de l’objectif poursuivi et des moyens privilégiés pour y parvenir. Le moment est celui d’une conscience réflexive critique de soi-même, celui d’un mouvement qui s’est perdu de vue.
Demain l’indépendance
_ Richard Le Hir
Il ne faut pas s’y tromper, les événements dont nous sommes présentement les spectateurs sur la scène internationale vont avoir d’importantes répercussions ici même au Québec, ce n’est qu’une question de temps, et à en juger par leur accélération depuis le mois de juillet, ce temps ne sera même plus très long. En effet, les douze à dix-huit mois qui s’en viennent vont modifier radicalement toutes nos perspectives, et des choses qui peuvent paraître encore invraisemblables aujourd’hui vont littéralement se transformer en évidences sous nos yeux au fil des jours.
Un monde qui se défait, un monde à reconstruire
_ Benoît Lévesque
Les raisons d’être déprimé aujourd’hui sont nombreuses et sérieuses. Sans être exhaustif, mentionnons le fossé qui s’élargit entre les plus riches et les plus pauvres, y compris dans les pays de l’OCDE, le réchauffement climatique et la dégradation de l’environnement combinée à l’épuisement des ressources naturelles, les politiques aveugles qui conduisent au désastre, sans oublier des pratiques politiques relevant d’une intégrité trop souvent douteuse, les réductions dans les services publics alors que la redistribution a été amendée en faveur des plus riches depuis trois décennies : réductions d’impôt, progressivité réduite, exemptions avantages fiscaux et autres cadeaux fiscaux qui expliquent en partie la croissance de l’endettement public. À ces facteurs plus structurels, il faut ajouter la cupidité et l’arrogance d’une grande partie de l’élite financière, l’impuissance et souvent le silence des dirigeants politiques à l’égard des dérives financières, l’absence de vision des partis politiques dont les programmes ne suscitent guère d’enthousiasme, une société civile de plus en plus active et même imaginative, mais de plus en plus fragmentée et faiblement organisée.
Penser la politique spectrale
_ Dominic Desroches
Résumé – Cet article pose l’urgence d’une politique attentive aux fantômes qui affolent le peuple québécois dans l’écriture de son histoire. Il situe le retour de certains revenants pour montrer que les fantômes, sous différentes formes, sont parmi nous. Loin de la paranoïa, attentif aux faits, il montre que le Canada est une Haunted House coresponsable de politiques d’horreur et de peur qui nous oblige à envisager une spectropolitique à la hauteur de notre destin historique. Il est écrit en deux parties. S’il présente tout d’abord notre histoire à travers le prisme des revenants, cet article s’achève sur un point positif : le Québec doit former une jeune élite capable de rencontrer les fantômes, interpréter leur message afin de les affoler dans le but ultime de persuader le peuple de l’importance de sa liberté.
Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es.
_ Don Quichotte, Cervantès
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