Je ne peux faire autrement que d’interrompre momentanément ma série concernant le congrès du PQ (ici et ici) pour commenter le cafouillage de proportion épique auquel nous assistons dans la partielle de Louis-Hébert.
Ou plutôt les deux cafouillages.
Parce que c’est bien de ça qu’il s’agit, alors que, dans une situation qui ne connaît pas de précédent historique, non seulement un, mais deux candidats en position de l’emporter se sont retirés à quelques heures d’intervalle.
Pour découvrir les détails de l’affaire — et quelques confidences de coulisses — je vous enjoins d’aller lire les textes de mon collègue Spin Doctor Jonathan Trudeau, qui est «chaud-bouillant» ces temps-ci. (C’est ici et ici.)
Erreur d’aiguillage
En premier lieu, la situation relève de l’échec personnel et prend un caractère un peu tragique pour les deux principaux intéressés (encore que des plaintes en harcèlement psychologique... Gérez donc vos nerfs, Seigneur!).
Ça révèle également un gros problème d’aiguillage de la part des deux partis qui ont fait imprimer des affiches arborant le visage de ces deux malcommodes monsieurs.
Tout le monde s’entend, dans Louis-Hébert, c’est entre la CAQ et le PLQ que ça se passe. Les deux ont des chances de l’emporter, dans ce qui prend l’allure d’un match préparatoire en vue de la bataille de Québec prévue à l’automne 2018.
Dans un tel contexte, voulez-vous bien me dire comment ça se fait que le PLQ s’est retrouvé à parachuter un candidat de la Rive-Sud de Montréal, qui avait trainé ses savates chez Alfonso Gagliano, Jean-Marc Robitaille et Jean Charest? Ça en laisse plusieurs perplexes.
Du côté de la CAQ, qui semblait avoir mis la main sur un profil atypique après un rigoureux processus d’évaluation, comment a-t-on pu passer outre la récente et turbulente mise à la retraite d’un bénévole bien implanté dans sa structure? J’ai agi dans une formation politique pendant 15 ans et je peux vous le dire : dans un parti organisé, on sait ce qui arrive à nos militants.
Manque d’intelligence émotionnelle et stratégique
Du côté des libéraux de Philippe Couillard, ça surprend toujours quand ils l’échappent, tant leur réputation d’organisation politique ultime est forte. Ici, manifestement, le processus de validation de candidature (le «vetting», comme on dit) a connu des lacunes.
Ça démontre, encore une fois si c’était nécessaire, le manque d’intelligence émotionnelle et stratégique qu’il y a dans l’entourage du premier ministre, dont une des fonctions fondamentales est justement de compenser les carences de l’homme qu’il sert.
On me raconte que mardi soir, dans le local électoral qu’on avait rempli d’attachés politiques pour accueillir le chef libéral et son candidat, on se permettait même de faire des blagues sur la nouvelle qui allait sortir le lendemain.
Manifestement, les libéraux se sentent trop sûrs de gagner et ça les rend pas bons.
Enthousiasme et amateurisme
Du côté de la CAQ, ça rappelle que pour une formation politique qui demeure inexpérimentée, le chemin qui lui permettra de maintenir son momentum jusqu’aux élections du 1er octobre 2018 sera incroyablement ardu.
On va très vite, du côté de François Legault, pour annoncer de nouveaux candidats, ces jours-ci. Charlesbourg, Portneuf, Estrie, Montérégie, Laval... Les rumeurs et les conférences de presse se succèdent à un rythme affolant pour les adversaires.
Essaie-t-on de faire trop vite? Dans l’enthousiasme causé par les bons sondages, l’image d’amateurisme que dégage trop souvent ce parti ne risque-t-elle pas de ressortir?
On serait porté à le penser. Parce que si chaque couac commis par le PQ permet toujours au commentariat de remettre en question sa capacité à gouverner, il faudra bien un jour se demander si des partis qui ne sont même pas capables d’évaluer un candidat doivent être placés en contrôle du Secrétariat aux emplois supérieurs du gouvernement.
On mérite mieux
Depuis mercredi, je vois plusieurs personnes se demander si on ne vise pas trop la perfection. S’il est encore possible de se présenter en politique en ayant déjà vécu, tant il faudrait aujourd’hui se montrer blanc comme neige.
Écoutez, là-dessus, vous ne me ferez pas brailler. Faire l’objet d’une enquête en harcèlement psychologique, ce n’est quand même pas quelque chose de banal dans une vie professionnelle. Ce n’est pas la norme et ça ne doit pas le devenir.
D’autant plus que ce qu’on attend d’un élu, c’est justement d’être capable de travailler avec les autres, notamment les employés qui seront à sa charge en vertu du budget que nous lui confierons pour nous représenter. On ne veut quand même pas encourager une culture malsaine du travail.
À la fin, ce n’est pas vrai que ça fait partie de la vie de monsieur-madame Tout-le-Monde de faire l’objet de plaintes de ses collègues, de se présenter saoul à un engagement professionnel ou de développer une réputation de prédateur sexuel au travail, pour prendre d’autres exemples récents. Ce ne sont pas des choses courantes.
On mérite mieux de nos élus, qui ne sont justement pas tous blancs comme neige. Aussi, on peut leur pardonner bien des affaires, ça se fait souvent. Mais ça commence par la transparence et le refus de la victimisation.
On espère que le PLQ et la CAQ l’auront compris.
Encore.
Rumeurs
En terminant, un mot sur les rumeurs concernant les frappeurs qui viendront en relève, parce que ce n’est pas la CAQ et le PLQ qui se retirent de Louis-Hébert, mais bien leur candidat. (J’ai vu un militant de QS et d’autres du PCQ rêver de victoire mercredi. MDR. Les péquistes ont au moins le mérite de rester modestes.)
Plusieurs personnes imaginent Paul Shoiry se porter candidat. Certains le voient au PLQ, d’autres à la CAQ.
Ce qui est sans doute la démonstration que se serait mauvais tant pour le PLQ que pour la CAQ. Voir «le cas Éric Tétrault». (Puis en passant, Sillery, où M. Shoiry a ses assises, ce n’est pas Louis-Hébert, c’est dans Jean-Talon.)
J’ai entendu un autre nom, pour le PLQ : Ihssane El Ghernati. Ancienne attachée politique de Sam Hamad, bien implantée dans la circonscription, proche de la communauté arabo-musulmane durement éprouvée du coin.
Les libéraux préféreraient probablement une candidature de notoriété, mais à leur place, je me la jouerais plutôt «cou couche panier», avec tout ce qui vient de leur arriver.
Mes deux sous...
**AJOUT 14h16** Quelqu'un peut expliquer à Agnès Maltais qu'avant une partielle où on est loin d'être sûr de l'emporter, on est supposé baisser les attentes? Pas les monter.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé