Lorsque le gouvernement Harper a récemment annoncé son intention de commémorer en 2012, le bicentenaire de la « guerre » de 1812 et le jubilé de diamant du règne d’Élizabeth II, il s’est trouvé beaucoup de gens dans l’espace public francophone pour critiquer chacun de ces choix, jugés à des années-lumière des sensibilités québécoises. On y a même vu une entreprise globale de « nation building » et d’appropriation partisane du patriotisme canadien. On aurait pu aussi noter dans l’idée de célébrer en 2017 le 150e anniversaire du Canada une contradiction avec la prétention du même Stephen Harper qui en 2008, soutenait que la fondation de Québec il y a 400 ans équivalait à la naissance du Canada.
Mais là n’est pas le seul cas de double langage. En effet, alors qu’on veut nous dépeindre - de façon hautement contestable - la victoire de la « British North America » contre les États-Unis en 1812 comme une œuvre collective d’anglophones, de francophones et d’autochtones unis pour la même cause, il y aurait lieu de porter plus attention à un autre vœu exprimé par Ottawa. Il s’agit du désir passé inaperçu de célébrer la même année les 150 ans de l’établissement de Selkirk, ce lord britannique qui convainquit une centaine de colons de s’installer en permanence sur les rives de la Rivière Rouge, dans ce qui deviendra le Manitoba.
Or, c’est l’expansionnisme brutal et autoritaire de cette colonie anglo-protestante qui poussera les Métis, francophones et catholiques, spoliés des meilleures terres dont ils étaient chassés, à se révolter. Mais les soulèvements de 1870 et 1885 contre les Anglais de Selkirk se concluront par le massacre des insurgés métis et la condamnation à mort de leur chef, Louis Riel. Incidemment, le procès de Riel, qui scandalisa les Québécois à l’époque et qui est considéré aujourd’hui comme un honteux simulacre de justice, est l’œuvre de John A. MacDonald, dont le gouvernement Harper veut célébrer le 200e anniversaire de naissance en 2015. « [Riel] sera pendu même si tous les chiens au Québec aboient en sa faveur », trancha le premier ministre conservateur. Et de majoritairement francophones qu’ils étaient lorsqu’ils ont joint la « Confédération », les Manitobains sont aujourd’hui moins de 2% à parler la langue de Riel à la maison.
Tiens! C’est justement ce 22 octobre le 167e anniversaire de naissance de l’infortuné chef métis. Bonne fête quand même, Louis Riel!
Christian Gagnon
Montréal
En ce 22 octobre
Bonne fête quand même, Louis Riel
Alors que Harper veut célébrer tes bourreaux
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CHRISTIAN GAGNON, ing.
_ L’auteur a été président régional du Parti Québécois de Montréal-Centre d’octobre 2002 à décembre 2005
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3 commentaires
Laurent Desbois Répondre
22 octobre 2011Entre 1870 et 1930, l’exil de millions de Québécois aux États-Unis (13 millions sont recensés en 1980)
Lors du recensement américain de 1980, les personnes qui se déclaraient d’origine Française constituaient le cinquième groupe ethnique aux États-Unis, juste avant les Italiens et ils représentaient 13 millions d’habitants. Si le sujet vous intéresse, il est exploité dans le livre « The French-Canadian Heritage in New England » écrit par le franco-américain Gerard J. Brault, University Press of New England, Hanover, 1986. On peut y lire : « Many Franco-Americans also have Acadian ancestors, but an overwhelming majority are descended from Quebecois. Emigration to the United States occurred mainly from 1870 to 1930, peaking in the 1880s. ».
Effectivement, il y a deux fois plus de Québécois aux Etats-Unis, qu’au Québec!!!!!
Cette émigration était aussi motivée par les mêmes raisons économiques.
Après la pendaison de Louis Riel et le génocide des métis dans l’ouest canadien, le gouvernement canadien appliqua une politique de colonisation dans l’ouest canadien, en y distribuant des subventions et en y donnant des terres. Il y eu une vaste campagne de promotion en Europe. Il est important de noter que ces privilèges n’étaient pas disponibles pour les Québécois, qui manquaient de terres à cultiver. C’est ce qui explique leur exil aux États-Unis, plutôt que vers l’ouest canadien.
Il y a environ 7 millions de francophones au Québec et un million de francophones hors Québec. Si le Canada avait permis aux Québécois de coloniser l’ouest canadien plutôt que de s’exiler aux États-Unis, on peut supposer qu’il y aurait 21 millions de canadiens dont la langue maternelle serait le français. La population totale du Canada est d’environ 32 millions d’habitants.
Les francophones seraient, et de loin, le groupe majoritaire dans ce beau Canada, n’eut été des lois du gouvernement d’Ottawa.
Est-ce que la politique d’exclusion des Québécois dans ce beau Canada, tout comme celle de rendre le français illégal dans tous les autres provinces à la même époque, était préméditée ou un pur hasard???
Serait-ce l’application du rapport Durham, qui préconisait la disparition ou le génocide des Québécois?
Que de se poser la question, c’est d’y répondre!!!!
Archives de Vigile Répondre
22 octobre 2011Tout simplement ceci pour l'instant:
http://www.vigile.net/Francophones-hors-Quebec,29627
Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre
22 octobre 2011Très opportun.
Il faut s'affairer à produire la liste la plus exhaustive possible des manoeuvres autoritaires qu'exerce de plus en plus le Canada pour l'extinction du français d'un océan à l'autre.
Cela pourrait être l'instrument le plus efficace pour secouer tous les votants indifférents qui prétextent: il faut passer à autre chose, il y a plus important dans le monde, il faut s'ouvrir au monde, nous sommes multiculturels...
...faut dire qu'on subit une vilaine influence, à Mont-Réal (Royal), en marchant sur le plateau Mont-Royal, empruntant la rue Mont-Royal, vers le parc du Mont-Royal, sous la croix du même nom avec vue sur l'Oratoire du Mont...