Bastarache, une distraction?

Commission Bastarache

Il a fait la première page à plusieurs reprises. Régulièrement sa commission ouvrait les bulletins de nouvelles. Pendant des semaines Bastarache a tenu la pôle des actualités. Il avait à se pencher sur le processus québécois de nomination des juges et à vérifier si Jean Charest y avait contrevenu. Après le report du mois d'octobre, son rapport était attendu pour le 1er décembre. Finalement il sera publié au printemps. Mais au bout du compte, se peut-il que ce ne soit qu'un "show de boucane"? Un "show" distrayant, au sens où il aurait attiré l'attention sur une chose pour mieux la détourner de la vraie chose?
Le système juridique canadien est ainsi fait que le Québec ne contrôle que la "basse-cour" pour reprendre l'expression de feu Michel Chartrand. Les vraies décisions et la jurisprudence qui balisent les décisions de la "basse-cour" se font dans les tribunaux supérieurs contrôlés de A à Z par le fédéral sans que le Québec ait quoique ce soit à dire. Et comment sont nommés ces juges? À partir de quels critères? À quelles fins?
Est-il important de rappeler que dans le Canada refondé par Trudeau en 1982, en allant contre la volonté de l'Assemblée nationale du Québec et en réduisant les pouvoirs de cette dernière pour la sanctionner explicitement d'avoir voté la charte de la langue française (loi 101), les tribunaux jouent dorénavant un rôle politique important et sont systématiquement mis à contribution pour le Canadian nation building. On comprendra qu'au fédéral le choix des juges est capital. Rien n'est laissé au hasard.
Bastarache lui-même doit à Jean Chrétien et à sa cour immédiate qu'il avait fréquentée dans un grand cabinet d'avocats de Toronto sa nomination à la Cour suprême du Canada. Lui qui n'avait que très peu siégé dans les tribunaux inférieurs du Nouveau Brunswich où il fut plutôt théoricien et professeur.
Michel Robert, président pendant de très nombreuses années de la Commission politique du Parti Libéral du Canada, connut la même ascension. "Les tribunaux sont devenus une troisième branche du gouvernement" disait-il. C'est pourquoi "un souverainiste n'a pas sa place parmi les juges parce que la magistrature doit adhérer au système fédéral canadien dans le cadre duquel elle opère".
Et qui pensez-vous a nommé juge à la cour d'appel du Québec l'ancien avocat d'Alliance-Québec, Allan Hilton, qui s'est permis d'invalider dans un jugement rendu uniquement en anglais la loi qui bannissait les écoles passerelles, loi qui fut adoptée unanimement par tous les partis politiques présents à l'Assemblée nationale?
Staline avait l'habitude de dire que dans les élections, les personnes les plus importantes sont celles qui comptent les votes. Au Canada, dans les tribunaux, les personnes les plus importantes sont celles qui nomment les juges. Au niveau supérieur c'est le fédéral. À la "basse-cour" c'est le "provincial". Et dans les litiges Québec/Canada c'est le Canada qui nomme les arbitres. D'avance on connaît le résultat. Le reste c'est de la boucane! En attendant qu'une vraie décision se prenne.


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