La première analyse de la défaite du Parti québécois se déroulera ce samedi dans un contexte de profond mécontentement au sein du parti. Devant la grogne, le directeur général du PQ a offert sa démission vendredi. Il sera toutefois présent à l’hôtel Sheraton de Laval, tandis que les autres stratèges de la dernière campagne électorale brilleront vraisemblablement par leur absence.
Le « sommet de Laval » réunira 150 participants — surtout les présidents de circonscription et l’exécutif national — pour décanter la dernière campagne électorale. Les responsables devraient notamment pouvoir prendre connaissance d’un rapport de 54 pages préparé par le sondeur interne Pierre-Alain Cotnoir, et dont Le Devoir a obtenu copie vendredi.
On y voit que toutes les analyses internes surévaluaient le vote péquiste, tout en sous-estimant celui des autres partis. Le « cumul des terrains quotidiens » réalisé durant la dernière campagne électorale montre que les stratèges péquistes s’attendaient à obtenir environ 30 % d’appuis le jour du vote. Le PQ a toutefois obtenu cinq points de moins, alors que les libéraux en récoltaient cinq de plus (41,5 %) que ce que le PQ pensait. La Coalition avenir Québec a terminé environ deux points plus haut (à 23,1 %) que dans les sondages internes du PQ.
On remarque aussi que les sondeurs du PQ avaient initialement calculé un effet PKP positif dans les jours suivant l’arrivée du magnat de la presse dans les rangs péquistes. Le sommet des appuis du parti aurait ainsi été atteint vers le 12 mars (environ 36 %), après quoi le PQ a plongé (M. Cotnoir enregistrait 27 % d’appuis le 29 mars).
Autre mauvaise lecture : les sondages internes ont noté une remontée du PQ dans la dernière semaine, combinée à une descente de la CAQ et une stagnation des libéraux. Or, c’est précisément le contraire qui est survenu. Le vote péquiste était au final surévalué partout : dans les segments par langue, par genre, par âge, par option souverainiste-fédéraliste…
Responsables
Les sondages internes trop optimistes seront un des éléments discutés ce samedi. Mais le rôle joué par les principaux stratèges sera davantage au coeur des discussions, indiquent des sources. La grogne à l’égard de l’état-major du Parti québécois aura d’ailleurs eu raison du directeur général de la formation, Sylvain Tanguay. Il a remis sa démission à l’exécutif national vendredi soir, afin de calmer le jeu avant la rencontre de samedi.
Après une rencontre qui s’est échelonnée de 19h à 00h30, le comité exécutif national a finalement fait savoir par communiqué que la démission était acceptée. M. Tanguay restera cependant en poste jusqu’au 30 juin prochain. Mercredi, Le Devoir révélait que l’exécutif était divisé quant au sort de M. Tanguay.
Questionné à savoir si M. Tanguay devait quitter la direction du PQ, le président du PQ, Raymond Archambault, a été évasif. « C’est une décision qui le regarde. Quand on ouvre le journal et qu’on se voit montré du doigt tous les jours comme étant l’un des responsables de la défaite, c’est difficilement supportable », a-t-il répondu.
Selon lui, M. Tanguay « a fait le maximum de ce qu’il pouvait faire » durant la campagne électorale, notamment en recrutant une « très, très belle équipe de candidats ». M. Archambault a réitéré son souhait de terminer son mandat, qui court jusqu’au prochain congrès national. « Je n’ai pas l’intention de fuir les responsabilités de président du Parti québécois. Je veux aller de l’avant. »
Avec Nicole Stafford (directrice de cabinet) et Dominique Lebel (directeur de cabinet adjoint), M. Tanguay a été au coeur des décisions stratégiques de la dernière campagne électorale du Parti québécois, qui s’est soldée le 7 avril avec l’élection de 30 députés (-24) et l’appui de 25,3 % de l’électorat (-6,6 points). Les deux premiers seraient absents samedi. Ainsi, seuls Sylvain Tanguay et Julien Lampron (ex-directeur des communications) feraient face au barrage de questions des militants.
«Ceux qui doivent être là vont être là», a fait valoir vendredi soir le chef intérimaire du PQ, Stéphane Bédard, avant la réunion de l’exécutif au quartier général du PQ à Montréal.
« J’ai personnellement un malaise à penser que les responsables ne seront pas là et que c’est principalement Raymond Archambault qui répondra aux questions, indique un péquiste qui participera à la réunion. M. Archambault n’a pas eu son mot à dire dans la campagne », note-t-il en rappelant que l’ancien journaliste a appris deux heures avant le grand public l’arrivée de Pierre Karl Péladeau.
Les militants devront se rabattre sur des « rapports » préparés par des membres du comité de stratégie électorale, à défaut de pouvoir échanger directement avec ceux-ci samedi. « On va répondre aux questions des militants dans la mesure du possible », a indiqué Raymond Archambault en entretien vendredi. « Si les personnes responsables ne sont pas là, on aura au moins des rapports de ce qui s’est passé. »
Trois députés participeront aux discussions de samedi, soit Dave Turcotte — déjà membre de l’exécutif — et deux nouveaux venus : Nicole Léger et Harold Lebel, deux proches de Pauline Marois. C’est le chef intérimaire, Stéphane Bédard, qui les a nommés sur une base temporaire. Leur désignation doit toujours être entérinée par l’exécutif, a précisé M. Archambault. Normalement, c’est le caucus qui choisit ses trois représentants au sein de l’exécutif.
«Travail serein»
Le plus gros bilan de la campagne aura lieu fin mai ou début juin, lors de la conférence nationale des présidentes et des présidents (CNPP). Tous les candidats, élus et défaits, seront alors aussi invités.
L’examen des causes de la défaite doit se faire « très sereinement », a fait valoir Stéphane Bédard, vendredi soir. « On a un travail serein à faire qui consiste tout d’abord à analyser les raisons [des résultats du 7 avril] », a-t-il affirmé au Devoir. « Ça commence ce week-end. »
Après avoir relevé les « bons et les mauvais coups » du dernier rendez-vous électoral, les militants devront ensuite s’interroger sur les façons de garder l’attention de l’électorat sur les propositions du PQ tout au long d’une campagne électorale, « même lorsque la température monte » entre les partis politiques. Selon lui, le PQ doit impérativement trouver des façons de s’extirper des campagnes électorales « ping-pong » durant lesquelles les chefs de parti s’attaquent et se défendent à coups de points de presse. « Comment véhiculer un message à travers une campagne ? C’est ça le défi », a-t-il souligné, précisant que « la faute » de la dégringolade du PQ n’appartient pas aux médias.
PARTI QUÉBÉCOIS
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