L’Office national de l’énergie n’a toujours pas décidé si elle exigera qu’Enbridge effectue des tests hydrostatiques sur son pipeline 9B, afin de s’assurer du bon état de ce tuyau vieux de 40 ans. Ces tests sont pourtant réclamés depuis des mois par des dizaines de municipalités du Québec. La pétrolière pourrait être autorisée sous peu à faire couler quotidiennement 300 000 barils de pétrole brut vers Montréal.
Selon ce que l’Office national de l’énergie (ONE) a indiqué au Devoir mercredi, aucune décision n’a été prise quand aux tests hydrostatiques, qui permettent de détecter des signes de corrosion ou encore des fissures dans les pipelines. « L’Office étudie actuellement les documents que lui a transmis Enbridge afin de déterminer si l’oléoduc peut être mis en service », a-t-on répondu par courriel.
« Si Enbridge parvient à démontrer de façon satisfaisante à l’Office que le pipeline est sûr et suffisamment fiable, après l’avoir soumis à des essais utilisant des méthodes autres que les essais hydrostatiques, cette dernière méthode pourrait ne pas être utile ou avantageuse, a ajouté l’ONE. Si l’Office juge insatisfaisants les renseignements fournis par Enbridge, il peut ordonner à cette dernière de procéder à des essais hydrostatiques sur une partie ou la totalité du pipeline. »
Lors d’une rencontre publique tenue à HEC Montréal en février, et à laquelle Le Devoir avait assisté, la vice-présidente de l’ONE, Lyne Mercier, avait affirmé que les tests hydrostatiques ne seraient pas exigés. « À l’aide de nos spécialistes, le comité d’audience a décidé qu’un test hydrostatique n’était pas le meilleur moyen pour voir quel est l’état de la conduite », avait-elle répondu à une question du public.
Le mois suivant, le président de l’ONE, Peter Watson, a plutôt écrit que de tels tests pourraient être exigés. C’est d’ailleurs la teneur de la réponse transmise au Devoir mercredi par le service des communications de l’ONE.
Tests réclamés
Ces propos en apparence contradictoires « sont de nature à semer la confusion auprès du public », estime une coalition de groupes environnementaux qui vient de demander officiellement « des clarifications » à l’ONE. Pour Steven Guilbeault, directeur principal d’Équiterre, « refuser de rendre publique sa décision revient à maintenir le public dans l’ignorance et contribue à saper la confiance de la population envers l’ONE ».
Les groupes ont aussi rappelé que l’organisme fédéral chargé d’étudier ce controversé projet détient les documents d’Enbridge depuis près de six mois. Ils jugent donc qu’une décision devrait être rendue rapidement, faisant valoir que l’inversion du flux pétrolier pourrait être autorisée au cours des prochaines semaines.
Selon eux, il faudrait exiger de la pétrolière albertaine qu’elle mène des tests hydrostatiques. Les groupes environnementaux ne sont pas seuls à formuler une telle demande. La Communauté métropolitaine de Montréal, qui regroupe 82 municipalités, exige aussi de tels tests avant d’autoriser l’arrivée de 300 000 barils de brut de l’Ouest dans la métropole. À cela s’ajoutent plusieurs autres municipalités, des MRC et la Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles du Québec.
Pipeline et CPE
Le pipeline 9B d’Enbridge, construit en 1975, traverse le territoire de plusieurs municipalités. À Terrebonne, il passe littéralement dans la cour de plusieurs maisons d’un secteur résidentiel situé en zone scolaire.
Le pipeline de 30 pouces de diamètre passe également dans la cour du centre de la petite enfance Gamin Gamine. Il traverse une partie du stationnement de l’établissement, à moins de 15 mètres de la porte d’entrée. Un peu à l’ouest du CPE, toujours sur le boulevard de la Pinière, l’oléoduc passe dans la cour du centre d’amusement L’Astuce. Cette entreprise propose notamment des forfaits pour des fêtes d’enfants ou de groupes scolaires.
Outre Terrebonne, le pipeline traverse des secteurs résidentiels de Mirabel, Laval et Rivière-des-Prairies. Pour ces deux dernières villes, il se trouve dans un couloir derrière les cours des résidants. Il passe aussi près de trois écoles primaires de la Commission scolaire de Laval, ce qui inquiète vivement la haute direction.
L’oléoduc 9B traverse en outre plusieurs cours d’eau du sud du Québec. Une rupture du tuyau pourrait menacer directement des sources d’eau potable de la région métropolitaine.
Ce pipeline avait jusqu’à présent une capacité de transport quotidienne de 240 000 barils. Celle-ci sera donc revue à la hausse avec le projet d’inversion. L’ONE a autorisé le projet d’Enbridge en mars 2014. Celui-ci doit servir à alimenter la raffinerie de Suncor située à Montréal, mais aussi celle-ci de Valero, à Lévis. Cela signifie que des navires chargés de brut navigueront sur le fleuve entre Montréal et Lévis.
La pétrolière se veut d’ailleurs rassurante quant à l’état de son pipeline. « En 2012-2014, nous avons réalisé des inspections internes de la canalisation 9 au moyen d’outils les plus perfectionnés pour l’examen de l’intérieur des pipelines et recueillir des données permettant d’évaluer l’état de la canalisation, a rappelé son porte-parole, Éric Prud’Homme. Lorsque les données indiquaient qu’une inspection plus poussée était requise, nous avons réalisé une inspection visuelle du pipeline et nous avons exécuté tous les travaux nécessaires pour que celui-ci puisse continuer d’être exploité en toute sécurité. »
OLÉODUC 9B
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