Les nouvelles concernant la course à la chefferie du PQ se font de plus en plus nombreuses, et on apprenait hier que certains candidats pensent s’allier pour former une alliance anti-PKP. En soi, la chose ne surprend. Une candidature forte suscite inévitablement un front du refus et celle de Pierre-Karl Péladeau est évidemment singulière. Plus tôt cet été, Réjean Hébert se montrait candidat pour jouer ce rôle. Désormais, Véronique Hivon et Sylvain Gaudreault pensent se présenter en tandem pour lui faire obstacle. Qui sait, peut-être quelqu’un d’autre jouera-t-il cette carte? La question est de savoir qui en prendra la tête, qui sera capable de coaliser, si la chose est appelée à se concrétiser, les forces de barrages qui redoutent l’arrivée de PKP à la direction du PQ. On devine que le système médiatique aura grand plaisir à décerner à ce candidat du refus le titre de l’outsider. Reste à voir quelle sera la réaction des membres.
Il est normal qu’une diversité de points de vue s’exprime dans une course à la direction, d’autant qu’il s’agit de la course la plus importante dans l’histoire du PQ. Il est aussi normal que les ambitions s’y fassent valoir: la modestie est rarement pratiquée en politique, pour le meilleur et pour le pire, et chacun se sent aisément appelé à de plus grandes fonctions. C’est bon signe aussi: qui voudrait la tête d’un parti auquel il ne croirait plus? Par définition, le candidat à la chefferie d’une formation politique est le contraire d’un défaitiste. Cette course posera ouvertement la question de la survie du PQ, ou du moins, de sa marginalisation, car la CAQ pourrait bien le remplacer comme principal parti nationaliste. Elle posera aussi, et de manière tout aussi brulante, la question de l’avenir du projet souverainiste. Comment assurer sa renaissance? Ces questions, quoi qu’en pensent les militants les plus convaincus, on ne saurait y répondre d’une seule manière dans le contexte actuel.
Dès, lors, la question se pose: l’opposition à PKP se jouera-t-elle sur le mode de la guerre civile idéologique, comme s’il fallait départager ceux qui sont les bienvenus et ceux qui ne le sont pas au PQ? Ce serait suicidaire, car cela créerait les conditions d’un éclatement du PQ après la course s’il venait à la remporter: comment ceux qui auront diabolisé PKP pourraient-ils travailler ensuite sous sa direction? C’est pourtant ce que suggère un Marc Laviolette toujours aussi caricatural, maintenu en vie artificiellement par les médias pour incarner le péquiste de l’ère glaciaire, à la manière d’un repoussoir particulièrement efficace, et qui entend faire barrage à la «droite», comme s’il s’agissait d’une peste qu’il fallait combattre à la vie à la mort. Les candidats sérieux, et ceux qui s’annoncent pour l’instant le sont, devront éviter une chose: l’absolutisation de leurs désaccords. Avant toute chose, ils participent à la grande aventure souverainiste. Qu’ils expriment leurs différences. Qu’ils n’oublient pas ce qui les rassemble.
Qu’en pense le principal intéressé? La question se pose car à la différence des autres candidats pressentis, il joue étonnamment profil bas ces temps-ci. Il se refuse à envoyer un signal à ceux qui souhaitent sa candidature, comme s’il se familiarisait encore avec le milieu politique et ne voulait pas brusquer les choses. L’évidence voudrait qu’il se présente, d’autant qu’il se distingue des autres candidats par un profil tout à fait particulier et représente un personnage public hors du commun, difficilement comparable au personnel politique actuel. Il devra plus tôt que tard se mouiller, en précisant sa vision du Québec et en définissant la nouvelle coalition qu’il prétend rassembler. Tant que la chose n’arrivera pas, la course à la chefferie aura une allure étrangement spéculative. Qu’on le veuille ou non, elle tournera autour de lui et des peurs et espérances qu’il peut susciter.