Une pente très glissante

105742b9ec2c4fc121577350f9616e9e

Le financement politique des Libéraux fédéraux ne passe pas la rampe






La participation de Justin­­ Trudeau à des cocktails lucratifs de financement pour son parti est proprement indéfendable. Au Canada­ anglais, les médias creusent de plus en plus cette histoire. Certains commencent même à la qualifier de «scandale». Et pour cause.


Loin des caméras et en échange d’un don généreux au Parti libéral du Canada, des gens bien nantis se monnayent un accès privilégié au premier ministre par l’achat d’un billet de cocktail à 1500 $. Soit le montant maximal annuel permis pour une contribution politique.


Au fédéral, cette pratique est légale. À l’opposé, sur le plan éthique, elle n’a aucune raison d’être. Étonnamment, le premier ministre Trudeau s’entête lui-même à la justifier.


Or, quand le pouvoir de l’argent rencontre l’argent du pouvoir derrière des portes closes, les conversations sont rarement mondaines. On ne s’achète pas non plus l’oreille atten­tive d’un chef de gouvernement par amour de la démocratie.


Argent et pouvoir — la combinaison est vieille comme le monde. Le problème est que les conflits d’intérêts ou la corruption qu’elle génère le sont tout autant.


Lobbying invisible


Sur cette pente très glissante, il s’agit en fait d’un lobbying invisible cherchant à influer plus discrètement sur les politiques publiques ou les choix budgétaires d’un gouvernement­­.


Et toutes les manières sont bonnes. Selon le National Post, depuis l’élection de Justin Trudeau à la tête du PLC, les contributions privées et corporatives à la Fondation Pierre Elliott­­ Trudeau — sa mission est de promouvoir la recherche — ont également bondi. Y compris même de l’étranger.


La coïncidence est trop parfaite pour être anodine. C’est pourquoi, malgré la longévité spectaculaire de la lune de miel dont profite Justin Trudeau, un voyant jaune s’allume sur son tableau de bord de l’éthique.


Selon un sondage Nanos/Globe and Mail, 62 % des répondants s’opposent en effet à toute activité privée où il est possible de s’acheter un accès privilégié au premier ministre ou tout autre membre du gouvernement.


Résultat: l’inquiétude monte dans le caucus libéral. Le dur souvenir de leur long purgatoire post-scandale des commandites aidant à leur réflexion...


Le ver dans la pomme


La solution crève pourtant les yeux. M. Trudeau doit rétablir les subventions publiques versées directement aux partis. Ces subventions, rappelons-le, furent abolies par Stephen Harper dans le seul but d’étouffer financièrement­ les partis d’opposition.


C’est le ver originel dans la pomme. Idem pour la chasse effrénée aux dons politiques à laquelle les autres partis sont aussi condamnés pour leur propre survie. Le vrai scandale, il est là.


Le besoin d’argent passe de néces­sité à obsession. Même les sites web des principaux partis s’ouvrent sur leur demande insistante à «donner». Les idées viennent après.


Pour mettre fin aux cocktails privés où l’argent coule suffisamment à flots pour attirer un premier ministre, il faut également abaisser le seuil maximal annuel pour toute contribution. Et de beaucoup.


Sans quoi, si béni soit-il encore par les sondages, Justin Trudeau donnera l’impression troublante de confondre l’intérêt du pays avec celui de ses généreux donateurs.



 




Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé