Une conseillère municipale de Blainville, qui fait déjà l’objet d’une enquête pour des questions éthiques, a voté pendant 10 ans sur des contrats en faveur de la firme de génie-conseil dont son mari était l’un des dirigeants.
Marie-Claude Collin fait l’objet d’une enquête de la Commission municipale du Québec (CMQ) depuis le 28 juillet, après que notre Bureau d’enquête eut dévoilé qu’elle avait voté en faveur d’un important constructeur de la région qui lui réclame maintenant de l’argent.
Depuis, nous avons aussi découvert que l’élue de la Rive-Nord avait également voté sur 217 résolutions au conseil de ville concernant la firme de génie-conseil Roche – qui s’appelle maintenant Norda Stelo –, [voir ci-bas] entre 2006 et 2015.
Dans le tiers des cas, Mme Collin a directement proposé ou appuyé la résolution.
Durant la même période, son mari, Jean Gagnier, faisait partie de la haute direction de Roche à titre de directeur santé et sécurité. Un poste qui l’a même amené à quelques reprises à servir de répondant pour la firme lors de soumissions pour des contrats publics.
Au fil des ans, la conseillère Collin a ainsi voté sur plus de 3 M$ en contrats octroyés à Roche ou en extra sur des contrats recommandés par la firme de génie.
Aucune Abstention
Aucun procès-verbal des séances du conseil municipal ne rapporte que Mme Collin s’est abstenue de voter ou qu’elle a fait état de son lien avec la firme qui employait son mari.
La Politique interne de gestion des conflits d’intérêts de la Ville de Blainville indique pourtant clairement qu’il est « interdit » à un élu de prendre part à des décisions s’il est en situation de « conflit d’intérêts ou d’apparence de conflit d’intérêts ».
Elle ne veut pas s’expliquer
Marie-Claude Collin a décliné notre demande d’entrevue, indiquant avoir obtenu dans le passé « une opinion juridique qui confirmait [qu’elle n’était] aucunement en conflit d’intérêts ».
Au moment de publier ces lignes, elle n’avait toujours pas acquiescé à notre demande de nous faire suivre ledit document. Blainville a aussi refusé de confirmer l’existence de cet avis juridique pour des raisons de confidentialité.
La Ville a toutefois confirmé que des discussions ont eu lieu avec la CMQ concernant ces nouvelles informations.
Selon des experts en éthique du milieu municipal, la conseillère s’est placée en situation d’apparence de conflit d’intérêts.
« Ça paraît très mal, surtout après la commission Charbonneau où on a vu qu’il y avait beaucoup d’initiatives qui étaient prises par certaines firmes de génie-conseil. Ces firmes-là pouvaient s’organiser de toutes sortes de façons pour bénéficier d’informations privilégiées », estime Danielle Pilette, professeure à l’UQAM et experte en gestion municipale.
Apparence de conflit
« La conseillère peut continuer à faire son travail, même si son conjoint travaille pour une firme qu’emploie la Ville. Mais sur les dossiers qui touchent cette firme, elle doit se retirer », tranche aussi Étienne Charbonneau, professeur à l’École nationale d’administration publique.
- Avec la collaboration de Marie Christine Trottier et d’Andrea Valeria
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