Les arrestations du député Amir Khadir et de sa fille illustrent avec force la nouvelle forme d’activisme politique plus contestataire mené par les mouvements sociaux, en lien avec Québec solidaire (QS), qui agit comme leur porte-parole dans les institutions de l’État.
Monsieur Khadir n’est pas que le député du Plateau. Il est le lobbyiste en chef de la société civile organisée à l’Assemblée nationale. QS est une fédération de mouvements sociaux issus des syndicats, du tiers secteur, de la lutte contre la pauvreté, du féminisme et de l’environnement. Le mouvement social porté par les étudiants au printemps dernier a spontanément rencontré dans le député de QS à l’Assemblée nationale un allié à l’intérieur du système politique.
Cette forme d’institutionnalisation de la contestation n’a pas la force de menacer les autorités et la stabilité sociale. Mais elle fait du bruit. Elle fait une différence politique. Avec un député de QS au parlement, les étudiants ont un des leurs dans les institutions.
Sur le plan politique et des rapports de force, le député de QS négocie autant, sinon plus, que les représentants étudiants qui étaient dans les cabinets de ministres les dernières semaines. En bout de piste, la reconfiguration du système partisan dont est issue l’élection du député de QS confère aux mouvements sociaux de la société civile une voix politique plus unifiée et plus forte dans les institutions.
L’émergence d’une forme d’activisme politique plus radical dérange l’ordre institutionnel établi. Les mouvements sociaux contestataires repoussent les frontières de ce qui constitue en démocratie une action politique légitime et acceptée par la société. À quel moment une action politique de revendication devient-elle violente ?
C’est à cette difficile question que la contestation étudiante des derniers mois nous invite à réfléchir. Une société démocratique ne devrait pas laisser à ses policiers le devoir de définir les frontières de la légitimité de la contestation politique.
Dans cet exercice de définition, il est inutile d’opposer la légitimité de l’action politique de la rue à celle de la démocratie parlementaire, comme le fait trop souvent le premier ministre Jean Charest dans ses propos sur la grève étudiante.
Les étudiants qui prennent la rue pour protester, c’est aussi de la démocratie. On ne doit pas forcer les citoyens à choisir entre la démocratie des institutions et celle de la rue. Ces deux formes d’expression démocratique se complètent beaucoup plus en pratique qu’elles ne s’opposent en théorie.
Une nouvelle forme d'activisme politique
Les étudiants qui prennent la rue pour protester, c’est aussi de la démocratie.
Désobéissance civile - Printemps québécois - Amir Khadir
Denis Saint-Martin25 articles
Professeur titulaire science politique UdeM L'auteur est directeur du Centre d'excellence de l'Union européenne de l'Université de Montréal et l'Université McGill.
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