Un tiens vaut peut-être mieux que deux tu l’auras

Chronique de Louis Lapointe

Si l’on en croit tous ses détracteurs, Pauline Marois serait tout à coup en grave difficulté et son leadership n’aurait jamais été autant menacé. La venue d’un éventuel nouveau joueur en politique lui nuirait. Qu’en est-il au juste?

Dans les faits, l’éventualité annoncée d’un retour de François Legault en politique n’a presque pas eu d’effets sur le degré de popularité de Pauline Marois qui varie peu depuis 2 ans, 25 %, sauf à l’époque de son retour où il avoisinait les 45 %, comme c’est le cas aujourd’hui pour François Legault. Rappelons-nous, André Boisclair avait lui aussi dépassé les 40% dans la faveur des Québécois lorsqu’il avait annoncé la fin de sa retraite. On connaît la suite.

Reconnaissons-le, c’est surtout l’attrait du renouveau qui fait monter la popularité de ces anciens politiciens qui font un retour en politique comme ces vedettes d’Hollywood qui reviennent à la vie publique après avoir maigri, changé leurs implants mammaires ou s’être fait effacer quelques rides. La trêve dure le temps que le public s’habitue à leur nouveau look jusqu’à ce qu’il redécouvre finalement tous leurs vieux défauts.

François Legault et Joseph Facal ne feront probablement pas mieux que ceux qui les ont précédés. Lorsque les Québécois s’apercevront qu’ils répètent toujours leurs mêmes vieilles rengaines sur leur légendaire paresse et leur propension à vivre au-dessus de leurs moyens, ils deviendront rapidement aussi impopulaires que Pauline Marois et Jean Charest.

S’ils aiment les sportifs et les artistes, les Québécois n’aiment pas plus les politiciens que les avocats. C’est connu depuis longtemps. Ils n’aiment pas non plus le mélange des genres. Ces artistes sur le déclin ou ces anciens héros sportifs auraient beaucoup de difficulté à devenir de populaires politiciens, sauf, bien sûr, dans le rôle de sénateur, comme c’est le cas de Jean Lapointe et Jacques Demers, car il est de notoriété publique que ces nominations seront sans conséquence, étant plus de l’ordre de la reconnaissance que le fruit de leurs compétences.

Toutefois, les politiciens qui réussissent le mieux en politique ressemblent étrangement à ces sportifs et artistes qui ont le plus de succès, ceux qui soulèvent les foules en raison de leur charisme, les tribuns, une variété de plus en plus rare en politique et à laquelle n’appartiennent pas les Legault et Facal.

Si François Legault réussit difficilement à toucher son auditoire, Joseph Facal trouve toujours le moyen d’augmenter le nombre de ses ennemis à chaque discours qu’il prononce, personne à part ceux qui partagent totalement sa vision ne trouvant grâce à ses yeux. Bien sûr, cela ne rend pas Madame Marois meilleure, mais malheureusement pour eux, nous sommes obligés de reconnaître qu’ils font moins bien qu’elle. À cet égard, un tiens vaut peut-être mieux que deux tu l’auras !

Étonnamment, lorsqu’il a quitté la politique, François Legault a préféré exprimer sa frustration envers les Québécois pour expliquer sa démission plutôt que de parler de sa propre incapacité de faire cheminer ses idées.

Même si je ne suis pas en totale contradiction avec Joseph Facal, le poil finit toujours par me hérisser lorsque j’écoute un de ses discours, en particulier lorsqu’il dénigre les jeunes. J’ai quatre enfants dans la vingtaine. Une attitude qui horripile encore plus les femmes qui n’aiment pas voir leur progéniture passée à la moulinette.

Dès son retour de sabbatique, plutôt que de remercier les Québécois de lui avoir permis de se ressourcer à leurs frais en Espagne, Joseph Facal a préféré casser encore une fois du sucre sur le dos des jeunes.

Comme l'enseigne la méthode socratique, une démonstration de gratitude bien sentie envers les Québécois aurait certainement pu faire œuvre d’exemple auprès de ces jeunes qui souffriraient de relativisme.

Si Socrate a préféré la mort en avalant la ciguë, plutôt que de se soustraire au jugement des siens en choisissant l’exil, c’est qu’il préférait donné l’exemple de celui qui accepte le jugement des siens, même s’il ne le partageait pas, choisissant d'être cohérent avec le discours qu’il tenait à l’Agora.

À l’image de Socrate, quels sacrifices seraient prêts à faire François Legault et Joseph Facal pour que les Québécois les suivent ?

Le passé étant en général garant de l’avenir, je ne vois pas comment François Legault et Joseph Facal pourraient devenir différents de ce qu’ils étaient avant de quitter l’Assemblée nationale. De bons ministres, certes, mais des politiciens sans trop de charisme qui éprouvent beaucoup de difficultés à partager leurs rêves avec les Québécois et qui préfèrent parler du verre à moitié vide plutôt que verre à moitié plein, une question de perspective.

Ils sont peut-être populaires pour l’instant, comme le furent avant eux plusieurs autres qui semblaient promis à un bel avenir, mais cela ne s’appuie sur rien de tangible. Que des discours et des promesses. Les sceptiques diront que c’est le propre de la politique. Ils ont probablement raison et c’est pour cela que c’est navrant.

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    26 octobre 2010


    Intéressante mise en perspective.
    J'ajoute, par ailleurs, que dans toutes les éventualités pouvant découler de l'action de François Legault et cie, l'objectif indépendantiste risque d'être mal servi.
    Si Legault et/ou Facal n'en restent qu'à une démarche non-partisane, ou encore s'ils réintègrent d'une façon ou d'une autre le PQ, ce parti pourrait s'en trouver conforté dans son désengagement indépendantiste.
    S'ils créent un nouveau parti, il va de soi que cela n'aiderait rien non plus, pour des raisons évidentes.
    Quant aux solidaires, au-delà de la question de leur relative marginalité, on les imagine difficilement s'engager davantage, eux dont le souverainisme semble relever d'une sorte d'obligation clientéliste, motif qui perd de sa force au fur et à mesure que " l'offre " souverainiste s'amenuise ailleurs.

  • Raymond Poulin Répondre

    25 octobre 2010

    Les Québécois en général, comme, d’ailleurs, la plupart des peuples, veulent s’en remettre à un sauveur plutôt que de prendre en mains leur destin collectif, préférant ignorer que le véritable souverain, c’est eux. Alors, ils brûlent leurs représentants chaque fois qu’ils découvrent qu’il s’agit d’humains et non de magiciens. Là-dessus, la majorité des indépendantistes ne semblent pas plus raisonnables que les autres. Lisez ce qu’ils disent même de Lévesque, de Morin, de Parizeau, de Landry. Sans le savoir, ce ne sont pas réellement les erreurs ou le caractère de ces hommes qu’ils blâment, c’est surtout de n’avoir pu accomplir le miracle qui leur aurait évité d’exercer leur responsabilité de citoyens. Beaucoup se gargarisent de démocratie tout en souhaitant un homme fort, ne réalisant pas qu’ainsi, ils favorisent par paresse la dictature, dont ils se désoleront si jamais elle advient.