Nouveaux chiffres, nouveaux records : l’accès au régime d’assurance-emploi s’est encore resserré l’an dernier, révèle le rapport de contrôle annuel du système. Moins de 40 % des chômeurs ont ainsi pu recevoir des prestations d’assurance-emploi, un plancher historique.
Mis en ligne discrètement sur le site d’Emploi et Développement social, le Rapport de contrôle et d’évaluation de l’assurance-emploi 2012-2013 montre que le ratio prestataires/chômeurs s’est établi à 38,8 % durant la période visée.
L’an dernier, le même rapport situait à 41,3 % cette proportion, et soulignait qu’il s’agissait du « plus faible ratio depuis le début du siècle ». Jusqu’au début des années 90, près de 85 % des chômeurs touchaient des prestations. Les différentes réformes menées par les gouvernements Mulroney, Chrétien et Harper ont réduit de plus de la moitié le taux de couverture.
Autre indicateur d’un accès plus restreint : le ratio entre les chômeurs dont la cessation d’emploi répondait aux critères de l’assurance-emploi et ceux qui ont touché des prestations. Il s’est établi à 53,9 % l’an dernier, en baisse de 1,2 point par rapport à 2011, et de près de neuf points par rapport à 2010.
Ce ratio est « jugé plus pertinent que les autres mesures de l’accessibilité, car il tient compte uniquement des chômeurs qui font partie des clients visés par l’assurance-emploi », indique la Commission de l’assurance-emploi du Canada (CAEC). Celle-ci estime que le ratio prestataires-chômeurs a certes l’avantage de la « simplicité et de la disponibilité des données historiques » permettant les comparatifs. Mais il « englobe beaucoup de personnes qui ne répondent pas aux critères du régime », dit-on.
Filtres
En chiffres absolus, on note qu’il y a eu 1,31 million de chômeurs en 2012-2013 (une baisse de 2,6 % attribuable à l’amélioration de la situation économique au Canada). De ce nombre, 808 000 personnes avaient contribué au régime — première étape pour se qualifier. Les autres, un peu plus d’un demi-million, étaient des chômeurs de longue date ou des travailleurs autonomes.
Parmi ceux ayant cotisé au régime, 180 000 avaient quitté leur emploi volontairement, ce qui les rendait inadmissibles. Au final, moins de la moitié des chômeurs (48 %, soit 629 000 personnes) avaient eu un emploi assurable et une cessation d’emploi valide.
Un autre filtre — le nombre d’heures travaillées — a disqualifié 113 000 personnes. La CAEC établit donc à 515 000 le nombre officiel de chômeurs admissibles à recevoir des prestations (soit un taux d’admissibilité de 82 %). Tout mis ensemble, 339 000 chômeurs ont finalement touché des prestations en 2012-2013. Cela veut dire que 469 000 chômeurs ont payé des cotisations sans retirer de prestations.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer les variations, note le rapport. Le taux d’admissibilité fluctue notamment en fonction des modifications à la composition du marché du travail.
Québec
La CAEC constate encore une fois que les provinces de l’Atlantique et le Québec sont « surreprésentés au niveau des demandes de prestations ordinaires, alors que l’Ontario et les provinces de l’Ouest sont sous-représentés ».
Les chômeurs québécois ont déposé près du tiers (32,2 %) de toutes les demandes de prestations du pays, devant l’Ontario (29,8 %). Or, le marché de l’emploi du Québec ne représente que 22,8 % du total canadien, note le rapport. Au bout du compte, les chômeurs québécois ont touché 29,8 % des prestations versées.
Pour être admissible, un chômeur doit notamment avoir cotisé au régime d’assurance-emploi dans les 12 derniers mois, et avoir travaillé entre 420 et 700 heures assurées, selon la région économique où il habite. Une démission ou un renvoi pour inconduite disqualifie automatiquement un chômeur.
Le rapport de contrôle indique aussi que les prestataires ont touché des chèques pendant 19,9 semaines en moyenne (ces chiffres sont pour 2011-2012), une baisse de près de deux semaines par rapport à l’année précédente. Un peu moins du tiers des prestataires ont épuisé toutes les prestations auxquelles ils avaient droit.
Les effets de la réforme du régime d’assurance-emploi décrétée par le gouvernement Harper seront pleinement mesurés dans le prochain rapport de contrôle et d’évaluation. Les modifications sont entrées en vigueur en janvier 2013, alors que le rapport analyse les données jusqu’à la fin mars.
Ottawa satisfait
À Ottawa, le cabinet du ministre Jason Kenney s’est dit satisfait de l’état de la situation brossé par le rapport. « Il démontre que le programme continue de soutenir les chômeurs dans leur transition au travail, en tenant compte des conditions du marché du travail local », juge-t-on.
Le gouvernement salue le fait que « le volume des demandes de prestations continue de diminuer avec la reprise économique », et soutient que « l’admissibilité à l’assurance-emploi a augmenté en 2013 ».
Pour en arriver à cette conclusion, Ottawa ne tient compte que du taux d’admissibilité — soit essentiellement le ratio entre les chômeurs admissibles à des prestations par rapport au nombre de chômeurs qui se seraient qualifiés, mais qui n’ont pas travaillé assez d’heures. Le rapport indique que ce taux a augmenté entre 2011 et 2012, pour revenir aux niveaux prérécession.
ASSURANCE-EMPLOI
Un régime de moins en moins accessible
À peine 38,8 % des chômeurs ont pu recevoir des prestations en 2012-2013
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