Comme un enfant-roi qui piaffe devant le jouet qu'on lui retire, le Parti québécois (PQ) est encore à remettre la question de la souveraineté au coeur de son existence. Les leçons du passé ne porteront pas fruits. Personne ne parle, par exemple, de ce qui arriva entre 1983 et 1987 au sein de cette formation politique.
René Lévesque et Pierre Marc Johnson, ainsi qu'une bonne majorité du caucus ayant pris acte du résultat du référendum du 20 mai 1980, tentèrent à cette époque d'amener le parti dans une forme de renouveau qui fut rejetée par les «purs et durs».
Ces derniers livrèrent bataille sur la base du fait qu'avec toutes ces idées de «beau risque», d'aspiration à une société toujours plus juste, plus ouverte, toutes des choses secondaires auxquelles il fallait continuer de travailler, la «cause» prenait du retard.
M. Lévesque décida alors de quitter le parti, épuisé surtout de cette bataille lancinante sur la souveraineté avec ou sans trait d'union. Quelle fut la part de responsabilité des «enfants-rois» dans ce départ-gâchis? Un homme n'est pas une cause, se dirent-ils. Alors qu'il s'en aille, nous voulons notre hochet.
C'est alors que le parti appela Pierre Marc Johnson en renfort. On savait pourtant où il logeait avec son «affirmation nationale». Qu'à cela ne tienne: il était populaire et moderne! En attendant, on s'en contenterait.
Le temps de perdre un scrutin général et on fit «la job» au jeune premier qui, avouant ne pas avoir le désir de résister à ce genre d'assaut, rentra dans ses terres.
Combien de chefs?
En 22 ans, le PQ aura eu raison de quatre chefs de première envergure, contre deux pour les libéraux en 35 ans (Claude Ryan et Daniel Johnson). Tous les chefs du PQ, sauf Jacques Parizeau, se sont échinés sur la question de la souveraineté. Et encore une fois, cet incroyable parti est à remettre son chef en question, entre autres parce que plusieurs pensent qu'il n'a pas ce qu'il faut pour mener le peuple vers sa destinée et qu'il ne sait pas, lui non plus, s'il va donner son jouet à l'enfant. M. Boisclair a-t-il l'envergure de ses prédécesseurs?
Il n'est pas de la même eau ni de la même génération, ce qui ne le disqualifie pas pour autant. M. Boisclair ressemble à Jean Charest, Mario Dumont, Stéphane Dion et Pauline Marois. Ces gens n'ont connu que la politique ou à peu près. Cela ne les rend pas inaptes à gouverner, au contraire.
Mais voyez-vous, quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Et si ce qui arrive était avant tout la faute du parti? Où est-il, ce PQ qui aurait pu faire en sorte que des gens comme Lévesque, Johnson, Bouchard et Landry continuent de donner le meilleur d'eux-mêmes en attendant le pays?
Pendant ses 20 premières années, le Parti québécois a incarné une option réaliste de centre-gauche, social-démocrate. Par la suite, obnubilé par la question nationale, il a mangé à tous les râteliers et a mis de côté ce qui faisait en sorte que bien des gens votaient pour lui. Ceux-là votent aujourd'hui pour les verts, pour Québec solidaire, ou alors ils restent chez eux.
Le problème du PQ, c'est son programme, son projet gouvernemental confus et, de ce fait, sa position sur l'échiquier politique québécois.
Je ne sais pas si André Boisclair peut réussir à rénover son parti comme l'avait admirablement fait Daniel Johnson père avec l'Union nationale au début des années 60. Mais ce qui compte vraiment, c'est que le parti choisisse ce chantier mille fois plus urgent que celui de se retrouver «au concert des nations» avec un «coffre à outils».
Je ne sais pas si le PQ le veut. Il réfléchit présentement à la date du prochain référendum. Il suce encore son pouce, 20 ans plus tard. Bientôt marginal, le PQ? Peut-être bien. Encore un grand parti? Le temps presse.
Benoît Gignac, Membre du Parti québécois et ex-attaché politique dans les cabinets de Jacques Parizeau, Pierre Marc Johnson et Rodrigue Biron
Un parti «gâté pourri»
Par Benoît Gignac
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