Le nombre élevé de décès en Suède a finalement forcé le gouvernement à se doter de nouveaux pouvoirs, même s’il refuse toujours d’imposer le confinement appliqué ailleurs en Europe. Pourtant, des Québécois expatriés dans le royaume scandinave vantent le modèle suédois mis de l’avant durant cette crise.
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« Honnêtement, je trouve que c’est un peu exagéré le confinement. C’est un peu extrême », soutient Josée Perron au sujet de la situation au Québec.
Originaire de Sherbrooke, elle réside à Göteborg, deuxième plus grande ville du pays, depuis trois ans.
Pendant l’entrevue en vidéoconférence, sa fille lui demande la permission d’aller jouer chez la voisine.
Mme Perron accepte d’emblée, une scène désormais inusitée ici.
« Elle va à l’école. Alors, aller chez la voisine, il n’y a pas de différence », note la consultante en gestion de projet.
Depuis le début de la pandémie, la Suède a fait le pari de la responsabilité individuelle de ses citoyens.
Les rassemblements de plus de 50 personnes sont interdits, tout comme les visites dans les maisons de retraite.
De plus, les employés doivent rester à la maison dès les premiers signes de la maladie et le télétravail est fortement encouragé.
Les malades et les personnes qui reviennent de voyage, quant à eux, doivent se confiner.
Mais les écoles, les magasins, les cafés, les restaurants et les bars restent ouverts.
Josée Perron craint d’ailleurs les effets pervers du confinement québécois, notamment le ralentissement économique.
Immunité de masse
À ses côtés, son conjoint ajoute que l’approche suédoise permet plutôt de créer l’immunité de masse.
« Afin de vaincre la maladie, il faut créer une immunité dans la population, tout en protégeant les plus vulnérables », estime Per-Olof Björkhede.
Mais voilà, la Suède comptait près de 700 morts au moment de l’entrevue mercredi – il y en avait 187 de plus en date de samedi –, contre 175 au Québec.
Avec ses 10 millions d’habitants, le pays nordique a pourtant une population similaire à la nôtre.
À Stockholm, capitale du pays, Patrice Létourneau appuie lui aussi les mesures du gouvernement suédois et s’étonne de voir les constats d’infraction distribués à Montréal.
Tout comme Josée Perron, il déplore les grands titres internationaux qui dépeignent une Suède négligente.
Par contre, l’escalade du nombre de décès le fait maintenant douter.
« Ça commence à démontrer que le modèle ici, où le gouvernement fait reposer la responsabilité sur les citoyens, ce n’est peut-être pas nécessairement le bon », note ce responsable des Fintech chez Amazon Web Services.
La Suède « ne l’a pas échappé » et ne se dirige pas vers des scénarios comme l’Italie et l’Espagne, estime M. Létourneau.
« Mais on peut se demander si on n’a pas sacrifié les gens à risque en refusant de mettre en place des mesures plus sévères », convient-il.
C’est justement ce qui a poussé le Québec à imposer des mesures plus restrictives, expliquait le directeur national de santé publique cette semaine.
« Dans nos valeurs québécoises, nos aînés, qui ont bâti notre pays, ont autant d’importance que les plus jeunes », insistait le Dr Horacio Arruda lundi.
Nouveaux pouvoirs
Devant cette hausse rapide des décès, le premier ministre suédois Stefan Löfven a finalement déposé cette semaine un projet de loi lui accordant temporairement plus de pouvoirs.
« Nous allons compter les morts par milliers », a-t-il confié au quotidien Dagens Nyheter.
Une pétition signée par plus de 2300 scientifiques, médecins et professeurs l’enjoint également d’imposer plus de restrictions.
Entre-temps, la situation ne semble pas trop inquiéter la population suédoise, surtout les plus jeunes.
À Göteborg et Stockholm, les deux expatriés québécois ont encore aperçu des terrasses bondées cette semaine.