Je viens de lire votre point de vue dans L’Aut’Courriel. Si je suis d’accord avec bien des éléments que vous nous livrez (entre autres, votre présentation des Audet et autres conseillers spéciaux), je récuse toutefois votre analyse sur le fond. Oui, la différence est mince entre le PQ, le PLQ et l’ADQ, mais elle demeure présente.
Le PLQ et le PQ tirent leurs origines et s’alimentent depuis des décennies aux deux grandes tendances politiques présentes au Québec et qu’on pourrait nommer l’une par la famille des affairistes, l’autre par celle des syndicalo-progressistes. Ils ont chacun des visées qui divergent et d’autres qui convergent.
Ainsi, aucun ne remet en question le sacrosaint modèle productiviste de la croissance économique. Par contre, l’un espère en goûter les fruits au seul profit des détenteurs capitalistes intégrés au modèle canadian, l’autre rêve de créer de la richesse pour la répartir en partie dans ses poches et l’autre dans des programmes collectifs mis en place par un pouvoir politique étatique rapatrié.
Pour caricaturer, l’un, «chouayen» 1, s’acoquine depuis des lustres avec les Molson et les Desmarais, l’autre, «patriote», s’inspire de Papineau et de Desjardins.
C’est une différence d’appartenance non seulement économique, mais culturelle. Quand j’entends des ténors du mouvement coopératif, qui ont bien trop souvent l’air de banquiers, déclarer au soir de leur vie qu’ils doivent leur engagement au sein de ce mouvement au fait qu’ils avaient appris à partager enfant dans des familles pauvres et nombreuses, je me dis que ce n’est pas tout à fait la même origine sociale que celle de Pierre-Karl Péladeau.
Quant à l’ADQ, il percole d’un courant populiste inspirant la cohorte essentiellement masculine des nouveaux banlieusards âgés de 35 à 44 ans qu’on pourrait qualifier de « Filionniste». Ce courant remettant en question les acquis sociaux des années soixante se réfugie dans l’individualisme et le matérialisme. Heureusement, il apparaît beaucoup moins présent chez leurs consœurs qui, elles, demeurent beaucoup plus soucieuses d’entraide et de partage.
Je m’arrête ici, vu que vous devez déjà être en désaccord avec ma lecture et que je n’ai pas vraiment de temps à vous faire perdre. Pour en savoir plus sur ce que je pense, je joins un texte sur lequel autant Le Devoir que La Presse ont levé le nez … Libre à vous d’en faire tout autant!
Je n’ajouterai qu’un seul commentaire un peu méchant à votre égard comme à celui de tous nos beaux universitaires. Dans le temps, on avait les curés et autres clercs pour nous dire ce qui était bien ou mal, maintenant les nouveaux clercs gagnent 100 000 $ et plus par année, enseignent 6 heures par semaine, se donnent des airs d’activistes, certains faisant même la grève quand ils apparaissent aux yeux des autres comme des privilégiés, et se prennent pour les guides du bon peuple. Ça me fatigue énormément…
Disséminant mes mèmes,
Pierre-Alain Cotnoir
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Solidaires, nous survivrons.
Pierre-Alain Cotnoir est membre-fondateur des coopératives de solidarité ADAPTE (www.coop-adapte.ca) et WebTV (webtv.coop) Détenant un doctorat en éthologie, il effectue depuis 1977 des enquêtes quantitatives portant sur différentes problématiques liées à la transmission des traits culturels au sein d’une population.
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Nous sommes entrés dans une nouvelle ère, l’anthropocène, celle de la 6e grande extinction induite par l'activité humaine. Notre surutilisation des ressources met en péril l’avenir de l’humanité : déforestation, pillage des mers, pollution, etc. Qui plus est, la gabegie des énergies fossiles est en voie de perturber radicalement le climat de la planète.
Pourtant, nous appartenons à la Terre. Avec toutes les autres espèces vivantes qui l’habitent, nous composons la biosphère, ce système fragile défiant l’entropie de l’univers. Un système ouvert en échange continuel d’informations et de matière avec son environnement et maintenant avec celui-ci un équilibre instable en perpétuel recalibrage.
Le changement constitue l’élément moteur propre à cette homéostasie entre le vivant et son milieu. Or, l'adaptation d'un système vivant au changement repose sur deux grands principes. L’assimilation en constitue le premier. Elle s'exprime au niveau de l'individu et implique une certaine élasticité de ce dernier vis-à-vis des forces qui agissent sur lui.
Ainsi, pressé de s’adapter à des conditions climatiques défavorables, tel organisme mettra en branle des mécanismes de régulation thermique qui lui permettront d’affronter ces nouvelles conditions.
Que ces conditions inclémentes persistent ou s’aggravent, l’individu rendu aux limites de son potentiel biologique n’y résistera plus et disparaîtra.
Cependant, dans la population d’origine survivront peut-être des individus présentant une meilleure résistance aux variations thermiques qui eux transmettront à leurs descendants ce nouveau potentiel.
C’est le deuxième principe dans ce dernier cas qui alors se sera manifesté, l’accommodation. C’est-à-dire qu’il y aura eu sélection d'individus porteurs de traits assurant une meilleure adaptation avec le milieu. Ces deux grands principes biologiques semblent résumer la plupart des phénomènes où est impliqué le changement.
L’espèce humaine n’échappe pas à ces règles biologiques. Cependant, chez celle-ci, les processus génétiques d’adaptation ont été supplantés par une nouvelle stratégie adaptative : la mémoire culturelle a pris le pas sur la mémoire génétique, les mèmes se superposent aux gènes. Les principes d’assimilation et d’accommodation agissent également sur cette mémoire culturelle. La capacité des communautés humaines de pouvoir s’adapter à des environnements changeants dépend en large partie de la flexibilité des traits culturels (mèmes) possédés par leurs membres.
Lorsque la résilience d’une culture permet ainsi à des individus de faire face à de nouvelles contraintes provenant de changements survenant dans leur milieu, c’est l’assimilation qui alors se manifeste.
Mais passé un certain seuil, ces contraintes peuvent induire des modifications en profondeur du pool de traits culturels permettant à une société d'échapper à son effondrement. C’est l’accommodation qui prend alors le relais.
Toutefois, ces processus d'accommodation culturelle subis par les sociétés de temps à autre au cours de l’histoire humaine s’imposent comme autant de chocs, révolutions ou autres transformations rapides des sociétés.
À l’aube de la seconde décennie de ce siècle, nous entrons de plain-pied dans une série de crises dont l’amplitude sera sans doute modulée par des efforts préalables de mitigation. La capacité de notre civilisation à assimiler le changement pourrait en atténuer pour un temps les effets.
Néanmoins, compte tenu de l’envergure des moyens technologiques (la dimension matérielle de notre mémoire culturelle) déployés, on peut envisager que cette période de crise sera d’une ampleur inégalée et affectera l’ensemble de la planète.
Pour prendre une allégorie tirée de l’alpinisme, notre chute pourrait ne pas être que de quelques mètres, comme par le passé, mais bien de plusieurs centaines de mètres. Nous serons donc tous concernés, durement et durablement.
Il est illusoire de s’imaginer un seul instant que les scénarios peu ou prou angéliques de conscientisation planétaire, permettant sur un horizon d’à peine une ou deux décennies de prendre les virages requis, se concrétisent.
Passagers d’un Titanic titanesque, on ne doit plus se demander si nous pouvons éviter l’iceberg, mais plutôt comment y survivre collectivement.
Notre survie passe inévitablement par un ensemble de traits déjà présents au sein des cultures humaines qui pourraient s’avérer décisifs pour assurer une mutation en profondeur de notre civilisation. Comme le soulignent certains[i], l’économie solidaire pourrait être l’un des ferments pouvant assurer ce passage obligé.
Mais, on ne peut être certain que ce soit cet ensemble de traits qui l’emporte. La nature n’est pas téléonomique, elle bricole de manière opportuniste. Il est donc possible que ce soit des traits culturels fort différents qui dominent finalement.
Par exemple, on ne peut écarter la propension des nations et des classes dominantes au maintien musclé de leurs privilèges économiques, avec ce qui en résulterait : un glissement vers des sociétés de plus en plus autoritaires et antagoniques.
Une certitude demeure : l’accommodation culturelle s’appuiera sur des traits déjà présents au sein de nos sociétés même si ceux-ci apparaissent, au moment présent, minoritaires dans leur rayonnement.
Il importe donc de disséminer, parmi ces traits, ceux que nous avons la clairvoyance de percevoir comme un progrès pour l'humanité en leur donnant dès maintenant toute la visibilité requise.
Or, l’économie solidaire représente au Québec plus de 6 000 entreprises, un chiffre d’affaires de plus de 20 $ milliards. Elle constitue une réponse née de notre histoire et de nos valeurs à l’exclusion sociale et économique.
Pourtant malgré sa réussite économique et la profondeur de son enracinement culturel, les valeurs et les manières de faire de l’économie solidaire sont très mal connues de l’ensemble de nos concitoyens.
Cette situation conduit notre société à ce paradoxe où notre plus importante force d’intégration sociale et de développement économique se voit reléguée, dans l’espace public, à la marginalité, quand elle n’est tout simplement pas ignorée.
Pourtant, plus que jamais, la coopération, la solidarité et la recherche du bien commun doivent être mises de l'avant comme des alternatives à l’individualisme et au matérialisme. Les entreprises de l’économie solidaire, dont au premier chef le Mouvement Desjardins, ont un rôle essentiel à jouer dans la promotion de ces valeurs, le Québec ayant développé une expertise singulière qui doit être mieux connue de sa population, tout autant que plus largement partagée avec les autres peuples.
Car si aucun de ces traits marqués par l’entraide n’émergeait, nous permettant de rétablir un équilibre en cette ère anthropocène, alors Homo sapiens risque fort de se condamner à n'avoir été qu’un court intermède du monde vivant.
[i] Claude Béland (2009), Plaidoyer pour une économie solidaire, éd. Médiaspaul, Montréal, 155 p. – Thierry Jeantet (2008), L’économie sociale, une alternative au capitalisme, éd. Economica, Paris, 75 p. – Hervé Kempf (2009) Pour sauver la planète, sortez du capitalisme, éd. Seuil, Paris, 151 p.
Tout le monde est pareil…
Nouvelle Gauche - La social-démocratie revisitée
Pierre-Alain Cotnoir10 articles
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