Le gouvernement Harper avait suscité de grandes attentes autour de la mise à jour économique du ministre fédéral des Finances Jim Flaherty. On s’attendait à d’importantes baisses d’impôts et une à intervention économique majeure.
Finalement, cet énoncé ne contient rien d’autre de substantiel que l’annonce de la baisse de la TPS de 6 % à 5 %. Une mesure qui aurait pu être présentée dans un communiqué de presse de quelques pages. Tout le reste ressemble beaucoup à du remplissage pour donner une apparence de substance à une intervention qui, autrement, aurait été bien maigrichonne.
Pour une année complète, la baisse de la TPS représente en effet 6 milliards des 9 milliards de baisses d’impôt annoncées. La réduction de l’impôt sur le revenu des particuliers est en effet modeste, et les baisses d’impôts des sociétés sont étalées dans le temps.
Il n’y a rien non plus là-dedans qui contribue de façon particulière à stimuler l’emploi ou à répondre de près ou de loin aux problèmes économiques qui confrontent le Canada. Certainement rien qui permette de parler de vision ou, comme le disait hier le ministre Lawrence Cannon, de « leadership économique ».
Pourquoi alors se dépêcher pour annoncer cette mesure qui avait déjà annoncée dans le discours du Trône ? Essentiellement par calcul politique. Parce que la baisse de la TPS est une marque de commerce de ce gouvernement soucieux de tenir ses promesses et qui, en campagne électorale, s’était engagé de la faire passer de 7 % à 5 % en deux étapes. Et parce que cette initiative rapide permet de mettre les libéraux encore davantage dans l’embarras en les forçant à appuyer la baisse de la TPS pour éviter le déclenchement des élections. On n’est pas dans la stratégie économique, mais dans la tactique partisane.
La manoeuvre est d’autant plus agaçante qu’on voit mal pourquoi on devrait être reconnaissant pour cette générosité fiscale. Les conservateurs, après tout, ne font pas de cadeau, ils ne font que remettre leur propre argent aux citoyens. Et cette générosité n’est pas le fruit d’un tour de force, d’efforts de gestion surhumains pour dégager une marge de manoeuvre fiscale. Non, l’argent rentre tout seul, grâce à la prospérité économique et au boom albertain.
Il faut cependant rendre hommage au gouvernement Harper pour sa sagesse et sa retenue. Les pressions sont fortes pour un gouvernement qui nage dans l’argent de dépenser cet argent, quitte à s’inventer des besoins. Les conservateurs, en réduisant la dette et en baissant les impôts, font la seule chose qui les protège efficacement de la tentation. Il faut noter que la réduction de la dette, 10 milliards pour cette année, est significative, quoique le ministre Flaherty en ait beaucoup moins parlé que de ses baisses d’impôts.
Ce qui est également dommage, c’est que le gros des ressources va à la réduction de la TPS. Au plan fiscal, les économistes s’entendent là-dessus, c’est une mauvaise décision, qui va à contre-courant des tendances occidentales, parce que la TPS est une bonne taxe, qui a peu d’effets économiques négatifs. Mais encore là, on est dans le politique. La réduction de la TPS s’inscrit dans la doctrine conservatrice et les stratèges du gouvernement estiment sans doute, à tort, que c’est la baisse de taxes que M. et Mme Tout-le-Monde remarqueront le plus.
Et voilà pourquoi il est vraiment dommage que la ministre des Finances du Québec, Mme Monique Jérôme-Forget, ait déjà annoncé qu’elle n’avait pas l’intention de récupérer cette baisse de la TPS en augmentant d’autant sa propre TVQ. Il semble que l’idée lui plaisait, mais que le premier ministre Charest a, encore une fois, fermé cette porte.
Et pourtant, l’idée est parfaitement défendable. Ce minibudget illustre de façon saisissante la réalité du déséquilibre fiscal. Pas le débat politique émotif, mais le simple fait que les surplus fédéraux dépassent toutes les prévisions, et que les provinces, sauf l’Alberta, ne disposent pas d’une telle marge de manoeuvre et que leurs obligations dépassent nettement leurs moyens.
Le fait que le gouvernement central réduise les impôts permet aux provinces d’occuper ce champ fiscal sans pénaliser l’économie et sans alourdir le fardeau fiscal des citoyens. Il s’agit d’un transfert des ressources d’un niveau de gouvernement à l’autre, une mesure qui s’inscrit parfaitement dans l’esprit du fédéralisme, beaucoup plus souple que les débilitantes négociations avec Ottawa.
En outre, en ce faisant, le gouvernement du Québec aurait préservé la place des taxes à la valeur ajoutée dans notre espace fiscal.
Ce n’est sans doute pas simple à faire, surtout pour un gouvernement minoritaire, si la manoeuvre est mal comprise. Cela aurait exigé du courage et du talent politiques. Encore une fois, voilà un rendez-vous raté.
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