1980, 1995, 201....

Stratégies et référendumS

il me semble que cette option, une consultation populaire pré-référendaire, devrait être prise en considération

Une pétition de 1M de signatures exigeant un référendum sur l'indépendance!

Puisqu'on en est à «célébrer» le 10e anniversaire du référendum volé de 1995, j'aimerais, moi qui étais trop jeune pour voter en 1995, faire un retour en arrière pour voir le chemin parcouru depuis 1980.
D'abord, 1980. D'un point de vue sociologique, qu'est-ce qui peut expliquer la défaite de 80? Il me semble, et vous me corrigerez si je me trompe, que le poids des Canadiens-français a sans doute fait pencher la balance du côté du non. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur l'option du oui, la souveraineté-association, pour constater à quel point les plus convaincus ne l'étaient pas tant que ça au final.
En 1995, le portrait sociologique du Québec a sensiblement changé. Le sentiment d'être Québécois plutôt que Canadien français s'est définitivement imposé dans la population du Québec. Le Québec, depuis 1980, a fait état à plusieurs reprises de sa vigueur intellectuelle, économique et artistique. Il me semble que l'option du oui en 95 traduit cette confiance des Québécois : désormais, il est question d'indépendance pure et simple.
Des flots d'encre ont coulé sur les causes de la défaite de 95. Oui, le référendum a été volé. Mais pourquoi au fond il a été perdu? Quelle est la raison principale? Parizeau a déjà affirmé (en fait, il me semble que c'est Lisée qui le dit dans «Point de rupture») que le référendum a été perdu une demi-heure avant la fin, à Québec. Parizeau l'a dit dans une entrevue récente, il y a certainement plusieurs choses à revoir pour éviter de se faire avoir comme la dernière fois par le fédéral. Mais pourquoi ne pas s'assurer, d'abord et avant tout, du support des nationalistes qui ont voté non lors du dernier référendum?
Rappelez-vous du «tournant» de la campagne en 95. Après des semaines de surplace, la campagne du oui décolle lorsque Bouchard prend le devant de la scène. Bouchard, c'est le tribun populiste, celui qui va vers le peuple (contrairement à Parizeau) et qui lui donne l'impression que le projet d'indépendance, c'est SON projet et non celui du P.Q.
Je serais prêt à mettre ma main au feu que l'écœurement de la population vis-à-vis l'idée d'un nouveau référendum sur l'indépendance tient au fait que l'idée est trop directement associée au P.Q. qui s'est discrédité autant aux yeux des gens à droite que des gens à gauche. Je laisse de côté les années au pouvoir du P.Q. post-95 pour me concentrer sur le danger de s'en tenir à une version «améliorée» (style Parizeau) de la stratégie de 95.
À chaque fois qu'une révolution populaire a eu lieu dans un pays, les élites sont apparues après les faits pour donner forme au sentiment populaire. On n'a qu'à penser au Tea Party des Américains, à la Bastille française ou à l'Octobre rouge des Russes. Bien sûr, un travail de terrain a précédé ces soulèvements, mais c'est le peuple qui a donné le coup d'envoi et souvent, les hommes d'action ont été pris de court, eux qui, pourtant, attendaient le «bon moment». C'est le peuple, dans les rues qui a pris son destin en main.
Évidemment, la voie insurrectionnelle est fermée au Québec depuis 1970 et c'est tant mieux. Alors, comment est-il possible d'élaborer une nouvelle stratégie référendaire qui cadre avec les aspirations, légitimes, des individus à la liberté et à l'autonomie? Je ne suis pas un chaud partisan de l'«étapisme», mais il me semble que cette option, une consultation populaire pré-référendaire, devrait être prise en considération.
Vous savez peut-être que dans certaines démocraties occidentales, les citoyens peuvent signer un registre pour exiger la tenue d'un référendum sur une question. Pourquoi ne pas faire de même, ici, au Québec et fixer le seuil, disons, à un million de signatures? De cette façon, les partis politiques sont déchargés du poids de la question à savoir quand déclencher le référendum : c'est le peuple qui va décider quand. Il suffit alors simplement de faire le suivi des registres et de se préparer à l'éventualité d'un référendum. En prime, et là on annule l'impact «Ottawa» dans la balance, l'option du oui bénéficie d'une campagne pré-référendaire. Immanquablement, un suspens se créera autour du baromètre et tout le monde parlera d'indépendance sans même que le P.Q. ait à faire campagne. Et surtout, et c'est l'essentiel, c'est le peuple qui prend la décision finale. Exit le P.Q. qui décide pour le bon peuple si les «conditions gagnantes sont réunies», si les «1000 jours» sont écoulés ou autres balivernes dans le genre. En cas d'échec, on ne pourra pas dire que les Québécois ont rejeté l'idée d'indépendance, mais simplement qu'ils ne voulaient pas se prononcer officiellement sur la question : mauvais timing et à la prochaine fois.
Voilà ce qui, à mon avis, tiendrait compte de l'évolution des valeurs au Québec depuis 1995. Il me semble avoir déjà entendu esquisser une position semblable dans les médias. Pourquoi est-elle disparue? Les options sur la table sont-elles plus populaires et consensuelles?


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9 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    2 novembre 2010

    Le Parti Indécis du Québec (PIQ)
    En 1995, il y a 15 ans, on nous offrait de devenir un pays. 49,4 % d’entre nous ont voté OUI et 50,6 % ont voté NON.Collectivement, nous avons réussi à répondre « PEUT-ÊTRE ».
    Les leaders de l’époque dans les deux camps n’étaient pas aussi inspirants qu’ils auraient dû l’être.Ils étaient aussi attachant qu’un parcomètre et dégageaient tout le charisme d’un pétoncle.

    Politiquement,les francophones sont un peu comme un métrosexuel dans un club échangiste, on veut garder toutes nos options ouvertes.

    Pour rallier tous les Québécois,je vous propose le Parti Indécis du Québec (PIQ),avec un beau logo rayé rouge et bleu. Un parti visant à nous assurer une absence d’avenir, qui nous fera envisager nos lendemains comme si c’était hier.
    Les membres répandraient l’absence totale d’idéologie dans la population,au cri de « SO-SO-SO… SOMNAMBULISME » .
    le PIQ aurait comme leader un québécois,un vrai.Un homme de gauche qui porte à droite.Un leader qui,en siégeant à l’Assemblée nationale,utilisera tout son poids pour prendre position et le transférera d’une fesse à l’autre s’il est mal assis.
    Source ; Sylvain Laroque,24 hMontréal,1/11/2010

  • Archives de Vigile Répondre

    30 octobre 2010

    Dois-je vous dire qu'il ne s'agit pas du député de Lac St-Jean, mais d'un autre Alexandre Cloutier, contrairement à ce qu'affirme Michel David dans Le Devoir ce matin.

  • Alexandre Cloutier Répondre

    29 octobre 2010

    Comme le précise M. Beauregard, la formule n'a rien d'étrange en soi. De plus, dans la mesure où la consultation serait amorcée par le parti (ou la coalition, il faut envisager l'idée) au pouvoir, ce serait à lui de définir ce qui est recevable ou pas. Soit dit en passant, le modèle ne diffère pas tellement d'une pétition. Conséquemment, une «contre-initiative» n'aurait aucun sens dans la mesure où : a) elle ne serait pas soutenue par le pouvoir à Québec et b) elle serait anti-démocratique. En effet, ce serait l'équivalent référendaire d'une pétition contre la tenue d'une élection et ça, c'est absurde.
    On aurait tort de voir ici une forme de surétapisme. Le surétapisme, à mon avis, consiste à élire un P.Q. qui n'ose pas enclencher le processus référendaire parce qu'il n'a pas «l'assurance morale de gagner» ou, pire, de faire réélire le parti libéral à cause d'un manque de vision. Il suffit de se rappeler à quel point le slogan de Charest : «On en veut pas de référendum» a fait des ravages au sein de l'électorat, voire même au sein du P.Q.
    À mon humble avis, nul besoin de médias à la solde de l'idée d'indépendance. D'un point de vue philosophique, cela ressemble un peu trop à de la propagande, ce qui heurte l'arendtien en moi. Je crois qu'on doit faire confiance au peuple. À mon avis, lorsqu'on lui donne la chance, il prend les bonnes décisions. Pour preuve, il y a le référendum gagné par le peuple en 95 et volé par les fraudeurs (50 000!). D'ailleurs, la consultation populaire référendaire n'a d'autre but que de redonner confiance au peuple en lui laissant la chance de toucher à l'indépendance en gagnant la première bataille. Quant aux médias, il suffit de faire leur job à leur place pour qu'ils travaillent pour l'indépendance. Et vous pouvez être assurés que ce genre de consultation attirera bien plus d'attention sur le projet que n'importe quel autre groupe de pression.
    Enfin, je voudrais préciser une chose. Cette stratégie, plutôt que de nous éloigner du projet, nous en rapproche. En effet, elle engage moralement le parti (ou la coalition) qui l'enclenche à tenir un référendum en cas de réussite sans pour autant tordre le bras aux partis. Si le P.Q. était forcé par ses membres à tenir un référendum à la prochaine élection, cela aurait pour effet de donner l'impression que les «extrémistes», que ce soit vrai ou non, contrôlent le P.Q. Et ça, ça ne peut qu'attiser la méfiance des nationalistes mous et des indécis. En adoptant l'approche consultative, les partis indépendantistes pourraient alors montrer qu'ils s'occupent des problèmes des Québécois sans mettre de côté l'idée d'indépendance. «Ce sera au peuple d'en décider.»
    Il suffit alors de forcer l'exécutif des partis indépendantistes à s'engager à consulter la population sur la tenue d'un référendum. Et, non, une élection ne permet pas de faire l'économie de ce processus. Combien de fois j'ai entendu répéter dans les médias qu'il y avait des gens qui n'étaient pas indépendantistes et qui votaient pour le P.Q. pour son programme: 20, 100, 1000?

  • Archives de Vigile Répondre

    28 octobre 2010

    L'idée d'un mouvement de base, comme les Tea Party, n'est pas mauvaise du tout. Mais on va s'appuyer sur quel média pour relayer le message?

    Les Tea Party peuvent compter sur les Rush Limbaugh et Fox News qui sont sur la même longueur d'ondes. Au Québec, on n'a aucun média de notre bord pour souffler dans notre trompette.
    J'en ai souvent parlé: ce fut la pire erreur des souveranistes en 50 ans. De ne pas avoir pu compter sur un média pour relayer le message. D'avoir tout laisser aux Feds.
    L'urgence c'est de mettre sur pied une radio souverainiste capable de matraquer quotidiennement notre message. Idéalement, une station d'information continue comme Fox. Mais là on rêve.
    SVP: ne revenez pas sur le référendum perdu à Québec. C'est une légende urbaine. Le référendum a été perdu dans l'Outaouais; pas à Québec.

  • Archives de Vigile Répondre

    28 octobre 2010

    Le référendum d'initiative populaire, c'est l'idée du SPQ-Libre qui eux l'ont repris de la Suisse. Et le PQ a laissé au SPQ-Libre une fin de non-recevoir comme trop souvent auparavant!

  • Gilbert Paquette Répondre

    28 octobre 2010

    Il reste que M. Cloutier a raison de souligner que l'indépendance doit devenir un projet du peuple, pas d'un parti politique. Il faut dépéquiser l'indépendance. Ce n'est pas un projet partisan. Pour cela, il faut créer un mouvement citoyen, une coalition non partisane pour l'indépendance. C'est ce que sera Cap sur l'indépendance qui s'organise actuellement dans plusieurs régions du Québec.
    Cessons de discuter stratégie et écoutons les aspirations et expliquons pourquoi l'indépendance est urgente, nécessaire et réalisable en 2010 pour nous sortir de notre dangereuse et nébilitante dépendance politique.

  • Archives de Vigile Répondre

    28 octobre 2010

    Bonjour,
    à des fins de précisions, permettez-moi de vous préciser que l'auteur de l'article n'est pas le député Alexandre Cloutier mais bien une autre personne qui porte le même nom.
    Pierre Bouchard
    Attaché politique du député Alexandre Cloutier

  • Marcel Haché Répondre

    28 octobre 2010

    Votre proposition n’a aucun sens. De référendiste, le P.Q. deviendrait simplement pétitionniste. Les Québécois, déjà perplexes à l’égard de votre parti, ne le prendraient plus au sérieux. Ce serait quelque chose comme le début de la fin.
    Votre proposition témoigne de la nécessité d’un redressement national. Il témoigne surtout de la nécessité d’un redressement au P.Q. lui-même.
    Wake up Mme Marois…

  • Félix Pinel Répondre

    28 octobre 2010

    Pour moi, il s'agit d'une forme de sur-étapisme. Pire que la forme précédente. Non seulement dans cette propositon le référendum est nécessaire à l'enclenchement du processus menant à la réalisation de l'indépendance, pis encore le gouvernement serait désengagé de mettre en branle lui-même le processus. Il s'agit purement et simplement d'ajouter une étape de plus, comme s'il n'y en avait pas assez.
    Imaginez que pendant que les indépendantistes essaient de faire signer leur pétition pré-référendaire, les fédéralistes du West Island et de l'Outaouais commencent une pétition exigeant la non-tenue d'un référendum, et qu'ils se rendent plus rapidement à l'objectif fixé en nombre... c'est plausible, ils sont plus concentrés sur le territoire.
    Désolant.
    Merci de me publier.
    FP