Au cours des derniers jours, des manchettes ont fait état de sommes d'argent qu'Ottawa serait prêt à injecter pour régler le déséquilibre fiscal, d'autres ont soulevé des hypothèses de revendications que Québec serait en train de mettre au point. Pour ajouter du piquant à ce dossier terne, voilà que le Bloc québécois annonce qu'il irait jusqu'à renverser le gouvernement si son prochain budget ne concède pas au moins 3,9 milliards de plus par année au Québec. Et le gouvernement Charest, jusqu'où est-il prêt à aller? Il y a deux sortes de déséquilibre fiscal: celui à cause duquel Ottawa continue d'enregistrer des excédents spectaculaires (12 milliards l'an dernier) pendant que les provinces peinent à boucler leur budget; et celui qui sépare les provinces riches des provinces moins riches.
Dans la fédération canadienne, c'est au gouvernement central qu'il appartient de redistribuer la richesse entre les provinces, sinon pour éliminer les écarts, du moins pour permettre à chacune d'offrir des services essentiels de qualité à peu près équivalente, comme l'exige la Constitution.
Depuis que le gouvernement Landry a lancé l'hypothèse de l'existence d'un déséquilibre entre la capacité financière d'Ottawa et celle des provinces, plusieurs rapports sont venus confirmer le fait. Le rapport Séguin d'abord, commandé par Québec, puis en avril dernier le rapport du Conseil de la fédération et finalement, en juin, celui d'un groupe d'experts financé par Ottawa. Tous trois ont proposé des correctifs majeurs, mais comme le dossier est éminemment politique, le risque est grand que la montagne accouche d'une souris.
À ce jour, aucun accord n'a été possible, et la rencontre des premiers ministres qui devait avoir lieu cet automne a été annulée. Alors que l'Ontario s'oppose à ce qu'Ottawa ajoute des sommes importantes à la péréquation parce qu'elles seraient perçues chez elle, province riche, les régions productrices de pétrole refusent quant à elles qu'on prenne en compte les revenus de leurs ressources dans la formule de calcul. Terre-Neuve, par exemple, ne veut pas perdre ses revenus de péréquation même si l'activité pétrolière accroît sa capacité de lever des impôts. C'est absurde, mais c'est comme ça.
La dernière rumeur lancée par le National Post, jeudi dernier, faisait état d'une enveloppe supplémentaire de trois milliards à répartir entre toutes les provinces, riches et pauvres. Selon cette manchette, les provinces se partageraient deux milliards pour l'éducation post-secondaire au prorata du nombre d'habitants, alors qu'une somme d'un milliard irait à la péréquation au profit des provinces moins fortunées.
À première vue, ces montants peuvent paraître élevés, mais ils représentent bien moins que le strict minimum. Le rapport du Conseil de la fédération proposait plutôt 10,5 milliards pour l'ensemble du pays. Faute de consensus entre les provinces, le gouvernement Harper devra trancher après avoir cherché un terrain d'entente avec chaque gouvernement. Il faut donc s'attendre une fois de plus à du bricolage conçu pour séduire les uns et faire taire les autres en prévision des prochaines élections.
En menaçant de voter contre le gouvernement Harper s'il ne réservait pas au moins 3,9 milliards au Québec dans son prochain budget, le Bloc ne se trompe sans doute pas beaucoup de cible. Le hic, c'est qu'il est loin d'être assuré que le gouvernement Charest se maintiendra à cet objectif déjà ciblé par son ministre des Finances, même au risque d'un affrontement avec Stephen Harper.
j-rsansfacon@ledevoir.com
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