Réjean Hébert, dans La Nouvelle du 24 juillet, y va d’un commentaire politique tranché sur l’avenir du Parti Québécois. «Il faut qu’on se branche: est-ce qu’on est un parti socio-démocrate ou une coalition? On ne peut pas rester entre les deux. Si c’est une coalition, ça ne m’intéresse pas. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de faire avancer le Québec vers la social-démocratie. Pour moi, l’indépendance, c’est un moyen, pas une fin en soi.»
Il y a quelque chose d’insensé dans une telle déclaration. Il faudra manifestement le répéter souvent : dans un Québec souverain, à certains moments, la gauche sera au pouvoir, à d’autres moments, ce sera la droite. On appelle ça une démocratie. Faut-il comprendre que si jamais, cinq ans après l’indépendance, la droite l’emporte à Québec et que le NPD est au pouvoir à Ottawa, Réjean Hébert plaidera pour le rattachement au Canada?
Conditionner la souveraineté à la social-démocratie, cela consiste à dire que l’indépendance d’un peuple n’est valable qu’à condition d’être à gauche. C’est une idée insensée, et il serait tout aussi insensé, évidemment, de conditionner l’indépendance à un projet «de droite». Cela consiste à enfermer un peuple dans une prison idéologique. On conteste, par-là, le droit de ce peuple, une fois souverain, à façonner autrement son avenir.
Le propre d’une coalition souverainiste, c’est justement de rassembler les souverainistes sur l’essentiel, au-delà de ce qui les divise. Et l’essentiel, c’est la possibilité pour le Québec de faire ses propres choix, de se gouverner lui-même, de façonner librement son avenir, qu’il soit social-démocrate ou non. Cela a une valeur en soi. La patrie, faut-il le rappeler, ne se laisse jamais enfermer dans une idéologie étroite, et ceux qui prétendent la servir doivent garder cela à l’esprit.
Faut-il finalement rappeler que les souverainistes, plus que jamais, sont dispersés sur la scène politique et que le PQ va réussir bien difficilement à rassembler les nationalistes de centre-droit, passés à la CAQ, en leur expliquant très clairement qu’il ne veut pas d’eux, parce que même s’ils sont fidèles au Québec d’abord, et pourraient dire Oui un jour à la souveraineté, ils n’y diraient pas Oui pour les raisons souhaitées par Réjean Hébert?
Apparemment, Réjean Hébert a des temps libres cet été. Il pourrait en profiter pour relire sur les origines de son parti. Il découvrirait qu’il fut fondé en 1968 comme une coalition entre la gauche et la droite, et c’est lorsqu’il s’est montré fidèle à cette vocation de rassemblement national qu’il s’est montré en bonne santé et conquérant.
Réjean Hébert ou l’art de se tirer dans le pied
« L’essentiel, c’est la possibilité pour le Québec de faire ses propres choix, de se gouverner lui-même, de façonner librement son avenir… »
Mathieu Bock-Côté1347 articles
candidat au doctorat en sociologie, UQAM [http://www.bock-cote.net->http://www.bock-cote.net]
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