Note de l'auteur. Cet article fut rédigé le jour même des attaques. Il fut publié par le Centre de recherche sur la mondialisation (CRM) le 12 septembre 2001. Version abrégée pour l'aut’journal
***
Quelques heures après les attaques terroristes du 11 septembre au World Trade Center et au Pentagone, l'administration Bush concluait, sans preuve à l'appui, qu'Oussama ben Laden et son organisation, Al-Qaeda, étaient les suspects les plus probables. Le directeur de la CIA, George Tenet, déclarait que ben Laden « a la capacité de planifier plusieurs attaques sans avertissement ».
Le secrétaire d'État Colin Powell qualifiait de son côté les attaques à Washington et à New York de « déclaration de guerre », ce que George Bush confirmait dans son discours à la nation le soir même en affirmant qu'il ne « fera aucune distinction entre les terroristes qui ont commis ces actes et ceux qui les ont soutenu ».
L'ancien directeur de la CIA James Woolsey insinuait pour sa part la complicité de un ou plusieurs gouvernements étrangers. Et l'ancien conseiller à la sécurité nationale Lawrence Eagelberger déclarait dans une entrevue télévisée: « Je crois que nous allons démontrer que, lorsque nous sommes attaqués de cette façon, nous pouvons réagir d'une manière brutale avec force et détermination ».
Suite aux déclarations officielles, les médias occidentaux n'ont pas tardé (sans preuves à l'appui) à approuver le déclenchement d'actions punitives contre des cibles civiles au Moyen-Orient et en Asie centrale.
Le premier suspect des attaques de New-York et Washington, le Saoudien Oussama ben Laden, qui est déjà désigné comme un « terroriste international » par le FBI pour son rôle présumé dans le bombardement d'ambassades étatsuniennes en Afrique, ironiquement fut au point de départ recruté par la CIA pour combattre les Soviétiques durant la guerre soviéto-afghane.
En 1979, la « plus grande opération secrète de l'histoire de la CIA » fut lancée en réponse à l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques afin de soutenir le gouvernement pro-communiste de Babrak Kamal.
La Jihad islamique était appuyée par les États-Unis et l'Arabie saoudite, une grande partie du financement provenant du commerce de la drogue dans le Croissant fertile.
La CIA, utilisant les services de renseignement pakistanais, jouait un rôle clé dans l'entraînement des moudjahidine. À son tour, la guérilla soutenue par la CIA fut intégrée avec les enseignements de l'Islam :
Les thèmes prédominants étaient que l'Islam est une idéologie socio-politique complète, que l'Islam sacré avait été violé par les troupes soviétiques athées et que le peuple islamique d'Afghanistan devrait réaffirmer son indépendance en se débarrassant du régime socialiste afghan soutenu par Moscou.
Les Service de renseignement pakistanais - Inter Service Intelligence (ISI) - furent utilisés comme « intermédiaire ». L'appui de la CIA à la Jihad fut réalisé par l'entremise de la ISI,
Motivés par le nationalisme et la ferveur religieuse, les guerriers islamiques n'étaient guère conscients qu'ils se battaient contre l'Union soviétique pour le compte de l'« Oncle Sam ». Alors que des contacts furent établis et entretenus aux échelons supérieurs des services de renseignement, les commandants des rebelles islamiques sur le terrain n'avaient aucun lien direct avec Washington ou la CIA.
Avec le soutien de la CIA et l'aide militaire américaine, la Inter Services Intelligence (ISI) pakistanaise s'est rapidement transformée en une « structure parallèle exerçant d'énormes pouvoirs sur tous les aspects de gouvernement ». La ISI possédait un personnel, composé de militaires, d'agents de renseignement, de bureaucrates, d'agents doubles et d'informateurs, estimé à 150 000 personnes. Entre-temps, les opérations de la CIA contribuaient également à renforcer le régime militaire pakistanais dirigé par le général Zia Ul Haq.
Le vaste réseau militaire des Services de renseignement pakistanais ne fut pas démantelé au lendemain de la Guerre froide. Par ailleurs, la CIA continuait d'appuyer la Jihad islamique par l'entremise du Pakistan. De nouvelles initiatives secrètes furent lancées en Asie centrale, dans le Caucase et dans les Balkans. L'appareil militaire ainsi que les Services de renseignement pakistanais ont essentiellement « servi de catalyseur pour la désintégration de l'URSS et l'émergence de six républiques musulmanes en Asie centrale ».
En parallèle avec ces actions en sous-main de la CIA, des missionnaires islamiques de la secte wahhabi d'Arabie saoudite s'étaient installés dans ces républiques, de même qu'à l'intérieur de la Fédération russe, empiétant sur les institutions de l'État et de la société civile. En dépit de leur idéologie « anti-ÉUA », les actions des fondamentalistes islamiques ont pourtant servi les intérêts stratégiques de Washington en ex-URSS...
La guerre civile afghane s'est poursuivie suite à la retraite des forces soviétiques en 1989.
En fait, il semblerait que, suite au retrait des troupes soviétiques, les différentes formations armées dans la guerre civile en Afghanistan ont continué à recevoir une aide en sous-main de la CIA par le biais des Services de renseignement pakistanais.
En d'autres mots, soutenus par l'ISI pakistanais lui-même contrôlé par la CIA, l'État islamique taliban a grandement servi les intérêts géopolitiques de Washington. Le commerce de la drogue dans le Croissant fertile a également servi à financer et équiper l'Armée musulmane bosniaque, dès le début des années 1990, et l'Armée de libération du Kosovo (UCK).
Au cours des derniers mois, des mercenaires moudjahidine combattaient dans les rangs des terroristes de l'UCK impliquée dans la guerre civile en Macédoine. Et il est avéré que l'UCK est non seulement appuyé par l'Otan, mais elle est également en partie financée par la mission des Nations unies au Kosovo.
Cela explique sans l'ombre d'un doute pourquoi Washington a fermé les yeux sur le règne de terreur imposé par les Talibans, impliquant notamment des dérogations flagrantes aux droits des femmes, la fermeture des écoles de filles, le congédiement des employées de la fonction publique et l'imposition de la « loi pénale de la Sharia ».
Depuis l'ère de la Guerre froide, Washington a sciemment soutenu Oussama ben Laden, tout en le plaçant sur la liste des « personnes les plus recherchées par le FBI ».
Alors que les moudjahidine sont impliqués dans des insurrection armées pour le compte des États-Unis dans les Balkans et en ex-URSS, le FBI, a pour mandat de mener aux États-Unis une guerre au terrorisme. De toute évidence, il s'agit là non seulement d'actions contradictoires, mais d'une politique qui s'avère mensongère à l'endroit des citoyens. Car la CIA, depuis la guerre URSS-Afghanistan, appuie le terrorisme international par l'entremise de ses opérations secrètes.
Cruelle ironie, la même Jihad islamique, présentée par l'administration Bush comme « une menace contre l'Amérique », responsable des assauts terroristes contre le World Trade Center et le Pentagone constitue un instrument clé des opérations militaires stratégiques de Washington dans les Balkans et en ex-URSS.
Au lendemain des attaques terroristes de New York et de Washington, la vérité sur les liens entre le gouvernement américain et le terrorisme international doivent être dévoilés à l'opinion publique afin d'empêcher l'administration Bush et ses partenaires de l'Otan de se lancer dans une aventure militaire qui menace l'avenir de l'humanité.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé