En date du 22 mai, le site internet du Nouvel observateur
rapportait que depuis l'explosion du 20 avril sur le Deepwater horizon dans
le Golfe du Mexique causant onze morts et quatre blessés graves, 492
millions de litres de pétrole brut ont été déversés dans le golfe au large
de la Louisiane. D'autres sources affirment que chaque jour, 19 000 barils
de pétrole brut s'échappent du site de forage géré par le partenariat de
l'improvisation et de la bêtise corporative : BP, Transocean et Halliburton
qui se blâment l'un et l'autre pour cette catastrophe sans précédent qui
aura des conséquences délétères sur l'écosystème du Golfe et les côtes de
plusieurs états américains. Cette catastrophe pourrait s'étendre des côtes
du Mexique, jusqu'aux Bahamas et avoir des impacts environnementaux pendant une vingtaine d'années.
Certains estiment que ça prendrait jusqu'au mois d'août pour creuser un
puits de secours afin de colmater la fuite bien en-dessous du plancher
océanique. Le Nouvel observateur rapportait aussi les propos de Darryl
Felder, biologiste à l'université Lafayette de Louisiane : « Même s'il y a
cinq milliards de gouttes d'eau pour une de pétrole dans le Golfe du
Mexique, c'est déjà trop pour l'écosystème. D'autant plus qu'une bonne part
va recouvrir des couches profondes, comme s'il se glissait sous le tapis,
ménageant des surprises pour l'avenir. » BP annonce retirer
quotidiennement 795 000 litres, autant qu'il s'en déverse. D'après la
compagnie, la moitié de ce qui fuit dans la nature est du gaz. Je crois
qu'on peut se permettre d'en douter.
Le 16 mai, Le New York Times a cité une chercheuse de l'université de
Géorgie, Samantha Joye, qui affirmait « qu'il y a une quantité abominable
de pétrole dans les profondeurs en comparaison avec ce vous voyez à la
surface. Il y a une énorme quantité de pétrole sur plusieurs couches, qui
s'étagent sur trois, quatre ou cinq niveaux. »
Un courant en boucle d'une largeur de 200 à 300 km et d'une épaisseur d'une
moyenne de 100 mètres pénètre le golfe du Mexique entre l'île de Cuba et la
péninsule du Yucatan, ce qui apporte de l'eau un peu plus chaude des
Caraïbes au Golfe. Ce courant en boucle peut remonter aussi loin que le
delta du Mississipi ou la plaque continentale de la Floride, selon le temps
de l'année. Par intervalles pouvant varier de six à onze mois, il provoque
un remous de quelques centaines de km de large qui se détache
tranquillement du courant pour évoluer de trois à cinq km par jour vers le
Texas ou le Mexique. C'est ce remous qui va répandre le pétrole sur les
côtes à l'ouest de la fuite. Ce remous alimente aussi les ouragans quand
ils passent par là. Ce courant en boucle qui peut engendrer ce remous dans
le golfe du Mexique longe ensuite la côte de la Floride vers le sud-est
pour devenir le courant de la Floride quand il franchit les Keys. Ce
courant poursuit sa course à 0,8m seconde vers les Bahamas pour se joindre
au Gulfstream.
Avec la saison des ouragans qui s'approche, ces nappes de pétrole vont se
répandre très loin. Des écosystèmes aussi loin qu'en Virginie pourraient
en être affectés selon certains observateurs.
« Drill baby drill » était un slogan qui sortait très souvent de la bouche
de Sarah Palin et de son équipe de navets lors de la campagne électorale de
2008. La même année, le sénateur Obama avait pris l'engagement solennel
qu'advenant son accession à la présidence, il maintiendrait le moratoire
actuel sur l'exploration au large des côtes américaines pour des raisons de
protection environnementale. Cependant, en date du 31 mars 2010, le
président Obama, que certains ont renommé « Obummer », levait le moratoire
lors d'un discours en Virginie.
Plus proche de chez nous, Pauline Marois avait tellement été emballée par
sa visite des plateformes de forage norvégiennes en 2008 qu'elle a donné
publiquement son appui aux projets de prospection et de forage dans
l'estuaire et le Golfe du Saint-Laurent et ce, au nom de l'indépendance
énergétique.
Radio-Cadenas rapportait en date du 29 mai que de la Nouvelle-Écosse, la
compagnie Corridor Ressources entend poursuive ses recherches sismiques et
forer le fond de Old Harry, aussitôt qu'en 2011. C'est ce qu'a laissé
savoir le président de cette compagnie, Norm Miller, qui se veut rassurant
: « Cette opération ne comporte aucun risque, les puits seront moins
profonds et la pression sera moins élevée, ce qui rendra les installation
plus sécuritaires. »
Mélanie Gauthier, citoyenne des Îles de la Madeleine, s'exprimait ainsi sur
l'industrie pétrolière et les gouvernements sur le site internet La vie
rurale en date du 9 novembre 2008 : « Les milliards de dollars de
redevances, pour lesquels nos gouvernements se disputent comme des enfants
d'école, leur ont bien vite fait « oublier » les effets extrêmement nocifs
et très réels de ce genre d'industrie partout dans le monde, mais aussi
chez nous et chez nos voisins des Maritimes. Pas besoin d'aller aussi loin
que la Norvège pour faire une recherche sur les effets de l'explosion d'un
puits sur une plateforme pétrolière ou le bris majeur d'un pipeline comme
il s'est produit près de l'Île de Sable, au large de la Nouvelle-Écosse en
1984. Et puis a-t-on déjà oublié la catastrophe du IRVING WHALE, chargé de
plus de 4 200 tonnes de pétrole lourd et 6 800 litres de carburants
combustibles contenant 7 tonnes de BPC, qui s'est échoué dans le golfe
St-Laurent, le 7 septembre 1970 ? 38 ans plus tard, presque jour pour jour,
on en subit encore les conséquences aux Îles-de-la-Madeleine, l'érosion
nous remettant fréquemment en pleine face les sacs de mazout qui étaient
enfouis sous le sable de nos belles dunes (200 000 sacs contenant des
résidus de mazout contaminé aux BPC provenant du naufrage furent enfouis
sous le sable en 1970, 25 ans avant que ne devienne publique l'aveu de la
Cie IRVING que la barge contenait des BPC). »
Un moratoire s'impose pour ces dangereuses initiatives d'une industrie qui
ne connaît pas de limites, même après une catastrophe de l'importance de
celle du Golfe du Mexique.
Daniel Sénéchal
Montréal
Marée noire dans le golfe du Mexique
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Archives de Vigile Répondre
3 juin 2010Le forage de Chevron, dans le secteur du bassin Orphan, au large de Terre-Neuve.
[ « Chevron a commencé cet ambitieux projet il y a deux semaines et prévoit forer à une profondeur de 2,6 km, soit environ un kilomètre de plus que le fameux puits que British Petroleum n'arrive pas à colmater dans le golfe du Mexique.
Le député bloquiste Bernard Bigras a souligné que Chevron ne semble pas avoir de plan pour réagir rapidement à un éventuel accident de forage.
Selon les estimations de fonctionnaires, il faudrait en effet faire venir une foreuse du golfe du Mexique capable de creuser un puits de secours en cas d'accident.
M.Bigras a dit : «Cela pourrait prendre 11 jours avant de faire venir cette foreuse et de quatre à cinq mois pour forer un puits de secours.»
Le ministre fédéral des Ressources naturelles, Christian Paradis a affirmé durant un récent débat aux Communes sur cette question :
«Pour le moment, on a en place un cadre réglementaire robuste et solide. Comme tous les Canadiens, je suis scandalisé et très préoccupé par la catastrophe dans le golfe du Mexique. Cela me choque de voir l'ampleur des dommages environnementaux et des coûts économiques d'un tel déversement. Comme tous les Canadiens, notre gouvernement conservateur veut s'assurer qu'un tel désastre ne surviendra jamais ici, au Canada.»
M.Paradis a tenu ces propos durant un débat sur une motion du NPD qui exhortait le gouvernement fédéral «à entreprendre immédiatement une révision exhaustive, au niveau fédéral, des lois, règlements et politiques qui régissent la mise en valeur des sources non conventionnelles de pétrole et de gaz, dont les sables bitumineux, les gisements pétroliers et gaziers en eau profonde et le gaz de schiste».
L'objectif de cette révision est, toujours selon la motion, de «doter le Canada des règles de sécurité et de protection de l'environnement les plus rigoureuses du monde».
Cette motion a été adoptée à l'unanimité .
Le chef du NPD, Jack Layton, a demandé au ministre Paradis quand il comptait se plier aux obligations fixées par cette motion. M.Paradis a assuré que cette révision sera faite dans la plus grande transparence.
Le ministre fédéral des Ressources naturelles, Christian Paradis a dit : « Aucun projet, ici au Canada, ne verra le jour tant et aussi longtemps que l'office ne sera pas convaincu que la sûreté, la sécurité des travailleurs et la protection de l'environnement sont assurés ». ]
Source ; Joël-Denis Bellavance,La Presse,3 juin 2010