Les images étaient spectaculaires. De la casse à revendre. Des étudiants cagoulés. Un pavillon saccagé. L’antiémeute appelée en renfort par la direction de l’UQAM. La recette parfaite pour ameuter les chaumières.
S’il est vrai que la violence ne peut être cautionnée, il est aussi vrai que la colère qui monte au sein de cette grande université ne tient pas du hasard. Elle s’explique en partie par le bris de confiance évident entre le recteur et une part croissante de la communauté uqamienne.
Pendant que les masques d’étudiants monopolisent l’attention, on oublie celui, plus pernicieux, du gouvernement.
Or, cette colère est aussi le produit de la radicalisation du gouvernement lui-même face à toute remise en question ouverte de ses politiques d’austérité. En rejetant tout dialogue social réel, il nourrit la grogne de ceux et celles qui n’ont plus le moindre espoir d’être entendus.
La crise à l’UQAM est avant tout le reflet brutal de ce climat autoritaire qui finit par tuer le débat public.
Au moment où montent un anti-intellectualisme et un populisme décomplexés, cette polarisation primaire de la société entre «bons» et «méchants» n’en est que plus facile.
C’est pourquoi l’image en boucle de quelques étudiants masqués et d’un pavillon saccagé vaut son pesant d’or pour le gouvernement Couillard. C’est l’occasion rêvée de discréditer les doléances légitimes et pacifiques de nombreux autres étudiants, professeurs et chargés de cours.
Le pourrissement volontaire
Pendant que les masques d’étudiants monopolisent l’attention, on oublie celui, plus pernicieux, du gouvernement. Derrière son discours trompeur sur la «sécurité» des étudiants à protéger se cache une motivation moins honorable: la négation du droit de grève étudiant. Lequel découle pourtant de la liberté d’association – un droit fondamental reconnu par nos chartes.
Le nouveau ministre de l’Éducation, François Blais, laisse maintenant tomber les masques. «Il est clair depuis le début, lançait-il hier, que nous ne reconnaissons pas le droit de certaines personnes, même suite à un processus démocratique, quel qu’il soit, d’empêcher d’autres personnes d’étudier.»
Le gouvernement refuse donc toute reconnaissance, de jure ou de facto, d’un droit de grève étudiant. Et ce, «même suite à un processus démocratique, quel qu’il soit»! C’est tout de même inouï qu’un tel déni de la démocratie ne choque même plus au Québec.
Le vrai problème
La semaine dernière, j’avançais que nous assistions en fait à une offensive tous azimuts contre le principe même du droit de grève étudiant. Voilà la chose bel et bien confirmée.
D’où le ministre Blais qui, récemment, avouait sur les ondes d’une radio de Québec qu’il a conseillé aux recteurs d’expulser deux ou trois étudiants par jour.
En encourageant la manière forte, l’impression s’installe peu à peu d’un pourrissement tout à fait volontaire de la part du gouvernement.
Quoi de plus payant politiquement qu’un conflit étudiant qui, sans issue, risque de verser dans une colère plus forte? Et ce, à quelques mois d’une mobilisation des syndicats contre l’austérité.
Le vrai problème n’est peut-être pas tant le rectorat qu’un gouvernement qui, à ses propres fins, encourage lui-même la répression policière et un pourrissement qui semble bien faire son affaire.
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