Dans ces temps qui apparaissent si troubles pour les militants des premières heures, je me devais, étant citoyen de la Mauricie, d’aller à la rencontre organisée par madame Marois au centre Boréalis sur les rives du Saint-Maurice. J’avais à l’esprit la sortie du député de Jonquière Sylvain Gaudreau contre les militants du RRQ qui étaient à l’assemblée de « Un nouveau Mouvement » qu’il qualifie d’extrémistes. J’aurais bien aimé dire aux gens du PQ que le militant sur place qui parlait un peu en notre nom, Pierre Schneider, est surtout connu comme étant l’ancien directeur à l’information du Journal de Montréal. Cela montre la dérive paranoïaque qui s’est emparée des bonzes péquistes depuis le début de l’été.
Quand je suis arrivé sur place, j’ai remarqué quelques militants du RRQ à qui j’ai serré la main. Ceux avec qui Sylvain Gaudreault ne pourrait pas travailler. Eux aussi venaient voir le show. Car ce n’était pas autre chose qu’une opération de relation publique visant à redorer l’image du chef du PQ. La majorité des participants étaient des membres d’exécutifs de comtés avec quelques représentants des milieux communautaires. La soirée fut très facile pour mme Marois. La question cruciale de l’éclatement du mouvement indépendantiste n’y fut pas abordée ou plutôt elle le fut par des appels dramatiques à l’unité provenant de militants angoissés auxquels mme Marois répondait qu’elle avait les bras ouverts. Mais même de la part des militants les plus désespérés, cet appel à l’unité ne pouvait se faire que d’une seule façon, le retour au bercail au Parti Québécois.
Comme j’étais là surtout à l’invitation d’un vieil ami qui est comme l’âme du mouvement indépendantiste en Mauricie j’ai pris la peine d’échanger avec la garde rapprochée de mme Marois. Très vite, la discussion a tourné autour de Jacques Parizeau que les stratèges internes voient comme le conspirateur en chef qui téléguide les actions de torpillage à l’encontre de mme Marois. Le degré de paranoïa que j’ai découvert dans ce nouvel entourage d’un chef péquiste me fait penser au film Bunker où Hitler s’inventait des armées invisibles qui allaient sauver son régime. La descente aux abîmes et la désintégration politique du Parti Québécois que tout le monde peut voir à l’œil nu ne semble pas créer d’état d’urgence chez les dirigeants du Parti Québécois. Ce petit coup de sonde visant à voir si le PQ allait faire un geste pour se sauver lui-même en acceptant d’ouvrir le dialogue avec l’ensemble du mouvement indépendantiste me confirme le pire. Le navire sombre vraiment. Ajoutez le brin d’arrogance que l’on retrouve au sommet de l’appareil et qui fait que tout le monde sauf la direction péquiste porte les torts de la division, et bien on ne peut arriver qu’à une seule conclusion : on a perdu complètement le sens du réel. Nous ne sommes plus en politique mais dans un film catastrophe.
J’espère ne pas trahir mon ami si je livre ici ses états d’âme. Comme je l’ai écrit dans un autre billet, je n’attends rien du PQ. Mais pour cet ami, un des fondateurs du RIN, un admirable patriote qui a construit au fil des ans un formidable réseau militant, c’est le découragement presque total. Des années de militantisme et de travail acharné vont aboutir d’ici peu de temps à la désintégration accélérée de la force indépendantiste. Ce qui le chagrine le plus, outre le fait que cela se produit sous ses yeux, c’est le fait que les bonzes du PQ ne le voient pas. Ils sont aveugles à la situation politique. Ils ne se rendent pas compte qu’il y a un point de non-retour qui fasse que le Québec en entier reculera pour une génération encore. En faisant la guerre à Parizeau, ils ne se rendent pas compte que c’est à l’inspiration de l’idée d’indépendance elle-même qu’ils s’attaquent.
La semaine dernière, je demandais aux militants de l’indépendance de cesser de demander la tête à Marois. Je le réitère encore. En faisant cela, vous revenez au bercail et par la pire des mystifications, par l’immolation d’un chef. Vous redevenez ce que vous venez de rejeter. Je sais que cela sera dur à entendre pour mon vieil ami mais l’heure est venue de construire autre chose et autrement. Malgré tout ce que je viens d’écrire, je sais qu’il reste important pour l’avenir de la nation québécoise que le PQ opère un redressement. Mais pour les véritables militants de l’indépendance, le temps est venu de suivre une autre route. Pour que cette fois, l’on comprenne bien ce que j’écris, je redis et le dirai toujours fort. Ceux qui veulent la mort rapide du Parti Québécois et sa dissolution devant l’histoire me verront les condamner sans réserve. Que le Parti Québécois s’auto-détruise, nous n’y pouvons probablement pas grand-chose. Mais nous n’avons pas à le précipiter nous-mêmes vers l’abîme, il y va déjà très bien tout seul. Notre travail à nous indépendantistes, c’est de combattre un adversaire digne de nous, la clique prédatrice de Jean Charest et son allié fédéral Stephen Harper.
Assez de distractions, maintenant, il faut reprendre la bataille.
René Boulanger
Chronique du jeudi - René Boulanger
PQ, la pente fatale
l’heure est venue de construire autre chose et autrement
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