On ne me fouettera jamais pour avoir écrit ce texte. Raif Badawi, lui, a été condamné à 1000 coups de fouet et 10 ans prison pour avoir blogué.
Les médias ont cloué au pilori les ténors péquistes qui, la semaine dernière, se demandaient si l'inaction et le profond malaise dont fait preuve le premier ministre Philippe Couillard dans le dossier de la laïcité et de la lutte à l'intégrisme n'étaient pas symptomatiques de son séjour de quatre ans en Arabie saoudite en tant que conseiller du ministre de la Santé, le prince Abdullah bin Abdulaziz Al-Rabeeah. Ils n'étaient peut-être pas si loin de la réalité.
Voici ce que rapportait la journaliste Martine Turenne suite à une entrevue que lui accordait Philippe Couillard en octobre 2003:
Le médecin apprend l'arabe grâce à un collègue jordanien qui deviendra son meilleur ami. «Je pouvais faire mes consultations externes sans interprète», dit-il fièrement. Il lit sur l'islam, Mahomet, le Coran. Amateur d'opéra, il court les meilleurs muezzins de la ville. «Leurs appels étaient très beaux, très poétiques.» Il laisse pousser sa barbe noire, aujourd'hui poivre et sel. La rumeur court dans l'hôpital que le Dr Couillard s'est converti à l'islam. «Les Arabes étaient bien contents!», dit-il. [...]
La vie d'expatrié est totalement artificielle. «On veut toujours rester plus longtemps pour faire plus d'argent, dit Couillard. Toutefois, si on attend trop, plus personne ne nous connaît au retour, ne s'intéresse à ce qu'on a fait. Je ne voulais pas ça. Et ma fille déclarait à qui voulait l'entendre qu'elle était saoudienne! On est revenus d'abord pour ça, puis pour ma carrière. Je savais que si je ne revenais pas, je serais irrécupérable.» (L'Actualité, 15 octobre 2003, Philippe Couillard - Quitte ou double).
Philippe Couillard craignait de devenir irrécupérable! Ses déclarations des derniers jours montrent qu'il l'est effectivement devenu.
Après avoir affirmé sur la scène internationale qu'il était «ridicule» de voir un lien entre la laïcité et la lutte contre l'intégrisme, après s'être entouré de confessionnalistes musulmans comme conseillers dans la mise en place d'un organisme de surveillance de l'intégrisme, voici qu'il déclare qu'il n'a pas de problème avec l'intégrisme religieux «tant que [ça] n'enfreint pas les droits des autres». Wow! C'est un premier ministre qui nous dit ça! Quel homme d'État!
Que peut-on attendre d'un tel politicien qui dit vouloir contrer l'intégrisme? Le propre de l'intégrisme, c'est de refuser toute évolution du dogme religieux et du fait même refuser de subordonner les croyances, les pratiques et la tradition au concept des droits fondamentaux dont l'égalité des sexes et la séparation des religions et de l'État.
Quant aux liens politiques et économiques avec les théocraties islamiques comme l'Arabie saoudite, Couillard dit que le Canada doit les maintenir.
Questionné, en 2011, à propos des tortures pratiquées par l'Arabie saoudite, Philippe Couillard s'était alors limité à dire qu'il s'agissait d'«un contexte culturel différent du nôtre». Certaines cultures développent le chant, d'autres la danse et d'autres la torture. Tout simplement.
En 2011, même le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) s'était inquiété des liens de Couillard avec l'Arabie. Rappelons que notre premier ministre siégeait alors sur le Comité canadien de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS) dont le mandat est de surveiller le SCRS. Selon ce que rapportait le National Post, les liens de Philippe Couillard avec les Saoudiens ont été qualifiés de «complètement inappropriés» par l'ancien chef des opérations stratégiques du SCRS, David Harris.
Couillard avait été nommé sur le CSARS par son deuxième meilleur ami, Arthur Porter, qui était alors le président de cet organisme. Porter a été contraint de démissionner après que ses liens avec des lobbies internationaux impliquant la Russie et le Sierra Leone eurent été révélés. Sous mandat d'arrestation, il est présentement accusé par l'UPAC d'une fraude de 22,5 millions de dollars alors qu'il était directeur du Centre universitaire de santé McGill.
La neutralité n'est pas la laïcité
Philippe Couillard n'a pas l'intention d'adopter une loi sur la laïcité de l'État. Écoutez bien son discours: il ne parle jamais de laïcité, mais bien de «neutralité». Ce n'est pas la même chose. La neutralité, c'est le sécularisme anglo-saxon qui, au nom du multiculturalisme, accorde à toutes les religions les mêmes privilèges au lieu de les tenir toutes à l'écart des affaires de l'État.
C'est au nom de la neutralité que le parlement d'Ontario récite en alternance pas moins de huit prières confessionnelles (chrétienne, autochtone, bouddhiste, hindouiste, musulmane, juive, bahaïe et sikhe).
C'est au nom de la neutralité que la Cour suprême des États-Unis accepte que des représentants de diverses communautés religieuses récitent, à tour de rôle, leurs prières dans les assemblées municipales. C'est encore au nom de cette même «neutralité bienveillante» que la Cour d'appel du Québec a accepté la récitation d'une prière «oecuménique» dans les assemblées municipales de Saguenay.
Cette approche, opposée à la laïcité qui vise à dresser un «mur de séparation» entre l'État et les religions afin de gouverner uniquement à la lumière des principes de l'humanisme laïque, est le corollaire du multiculturalisme auquel Philippe Couillard a toujours prêté foi.
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