OTTAWA | Il y aura deux ans ce jeudi, les Canadiens élisaient un gouvernement libéral majoritaire. Justin Trudeau arrivait au pouvoir déclarant apporter avec lui ses «voies ensoleillées».
Alors que les libéraux arrivent à mi-mandat, plusieurs disent constater que l’ambiance a changé.
«On sent un gouvernement qui est plus sur la défensive», analyse le professeur Éric Montigny du département de science politique de l’Université Laval.
Les dernières semaines n’ont pas été faciles pour le gouvernement. Sa proposition de réforme fiscale du ministre des Finances a entre autres été fortement critiquée.
Malgré des changements qui seront annoncés lundi au terme d’une réunion spéciale du caucus libéral, le professeur Benoît Pelletier estime que l'image du gouvernement a été endommagée.
«Je pense que le gouvernement s’est beaucoup fait mal,» dit l’ex-ministre québécois.
À la réforme fiscale, il faut ajouter la politique culturelle de la ministre du Patrimoine canadien qui est elle aussi très mal accueillie au Québec. La décision de ne pas imposer la taxe de vente aux services de Netflix a été dénoncée tant par les regroupes culturels que le gouvernement Couillard.
«La licorne volante de Justin Trudeau est en pleine tempête» titrait cette semaine le prestigieux magazine britannique «The Economist,» ajoutant que des «erreurs et des mésaventures» commencent à faire mal au gouvernement.
Nouveaux ténors de l’opposition
Pour le professeur Montigny, un autre élément fondamental a changé depuis l’avènement au pouvoir de Justin Trudeau: les deux principaux partis d’opposition ont maintenant choisi leurs chefs en vue des prochaines élections. Andrew Scheer mène maintenant la charge des conservateurs aux Communes, alors que Jagmeet Singh vient de remplacer Thomas Mulcair à la tête du NPD.
Les vis-à-vis des libéraux risquent donc de se faire entendre davantage au moment où Justin Trudeau doit livrer la marchandise dans plusieurs dossiers complexes.
Nombreux dossiers à régler
Le premier ministre a aussi promis la réconciliation avec les peuples autochtones, mais l’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées est plutôt mal partie. Les démissions et départs se multiplient depuis le début de l’année.
«C’est plus facile de faire de beaux discours, d’exprimer de bons sentiments, de créer des commissions d’enquête, mais à un moment donné il faut agir», affirme le politologue Christian Dufour.
Les libéraux doivent aussi trouver des solutions aux menaces qui planent sur l'Accord de libre-échange nord-américain, sur l’industrie du bois d’œuvre et à la guerre commerciale que livre Boeing à Bombardier.
Beaucoup de travail reste également à faire en prévision de la légalisation de la marijuana promise pour l'été prochain.
De plus, après deux ans au pouvoir, le gouvernement Trudeau n’a toujours pas trouvé de solution aux ratés du système de paie Phénix des fonctionnaires fédéraux. «Qu’un gouvernement libéral ne soit pas capable d’arranger le système de paie, c’est déplorable, c’est vraiment une honte», dénonçait Michel Lépine du Syndicat des Travailleurs de la Santé et de l’environnement, il y a quelques jours.
D’autres décisions se font aussi toujours attendre: l’avenir de la livraison du courrier par Postes Canada et le déploiement de militaires et policiers dans le cadre d’une opération de maintien de la paix des Nations Unies.
«Monsieur Trudeau est encore un premier ministre confortablement assis. Mais je dirais que le véritable test est devant lui», conclut Christian Dufour.