Marion Maréchal-Le Pen à Washington

7812826ca16323c94798f1a1cb25fd39

Marion Maréchal-Le Pen saura-t-elle mener la révolution conservatrice en France ?

La foule était nombreuse pour assister au grand retour de Marion Maréchal-Le Pen, bien loin de son ancienne circonscription de Carpentras. Après huit mois de diète médiatique et politique, l’ex-député de Vaucluse intervenait lors du CPAC, rendez-vous incontournable des milieux conservateurs américains.


S’exprimant en anglais, elle a salué ses « fellow conservatives » et multiplié les références à l’amitié franco-américaine, lors d’un discours ponctué de nombreux applaudissements et de « Vive la France ! » provenant d’un public conquis.


Rappelant les liens historiques qui unissent la France et les États-Unis, Marion Maréchal-Le Pen a souligné que nos deux pays étaient côte à côte dans la défense des mêmes libertés : liberté économique et politique, liberté de conscience et d’expression.


En une dizaine de minutes, Marion Maréchal-Le Pen a ainsi dressé un panorama des principaux enjeux auxquels doivent faire face les conservateurs français. Dans un vibrant plaidoyer pour la souveraineté française, elle a dénoncé la mainmise de l’Union européenne sur la législation nationale. Gardant en trame de fond les idées de liberté et de souveraineté, elle a dénoncé tour à tour l’immigration massive et l’islamisation, les ravages du politiquement correct et la tyrannie médiatique, les dérives bioéthiques et le transhumanisme, ainsi que la déchristianisation et la perte de sens.


Défendant son projet d’école de commerce et de sciences politiques, Marion Maréchal-Le Pen a invité les conservateurs à investir les champs des médias et de la culture, dans l’idée de faire précéder la reconquête politique d’un combat métapolitique. Elle a recommandé de ne jamais « sous-estimer le peuple », en citant plusieurs démonstrations récentes de réveil populaire (Manif pour tous, Brexit, élection de Donald Trump). Reprenant la phrase (attribuée à Gustav Mahler) selon laquelle « la tradition est la transmission du feu, non la vénération des cendres », elle a déclaré que les États-Unis avaient allumé une étincelle qui allait embraser la renaissance conservatrice française.


Intervenant entre deux tables rondes, Marion Maréchal-Le Pen aura réveillé l’assistance par son dynamisme et son aplomb, qui tranchaient avec l’aspect parfois très formel du grand raout annuel qui voit défiler les huiles républicaines. Bien loin des frilosités françaises, elle a su employer des termes adaptés au contexte américain. L’usage répété du terme « conservateur » et la place centrale accordée à la liberté montraient bien sa connaissance de la rhétorique de nos alliés d’outre-Atlantique.


Surtout, l’assistance aura remarqué l’accent très « trumpien » du discours de l’ex-député de Vaucluse, qui a repris à son compte des thèmes chers au président américain, parmi lesquels la dénonciation de la mondialisation sauvage et la défenses des intérêts nationaux. N’a-t-elle pas déclaré qu’elle souhaitait une France first again ?


L’éditorialiste politique d’un grand magazine conservateur nous confie avoir été agréablement surpris par le ton de l’intervention de la nièce de Marine Le Pen.


Plusieurs spectateurs nous avouent également avoir découvert une nouvelle figure européenne – le nom Le Pen étant davantage associé à Jean-Marie ou à Marine dans l’esprit des conservateurs américains.


Il faut dire que l’intervention de Marion Maréchal-Le Pen intervenait après plusieurs jours de polémique. Alors que plusieurs commentateurs et activistes dénonçaient l’« étatisme », voire le « socialisme » du Front national, le président de l’ACU Matt Schlapp a défendu sa main tendue à la jeune Française. Sur Fox News, il a défendu le « libéralisme classique » et le « conservatisme » de la jeune Française qui a espéré, lors de son intervention, être « moins terrifiante » sur scène que dans les médias.


Notons que le CPAC 2018 intervient dans le contexte d’une profonde remise en question du parti républicain, à l’âge du « trumpisme » qui se distingue de l’establishment par son discours assumé sur l’immigration et par ses positions moins dogmatiques sur le libre-échange ou la politique étrangère.


Enfin, il faut souligner le caractère inédit de l’intervention d’une personnalité française lors de la convention organisée par l’American Conservative Union, qui se bat depuis 1964 pour que la liberté, la responsabilité personnelle et les valeurs traditionnelles soient défendues à Washington, D.C. Espérons que la grand-messe conservatrice aura contribué à mettre fin aux décennies d’incompréhension mutuelle et de préjugés réciproques qui divisent les vraies droites des deux rives de l’Atlantique.


« How lucky you are », nous lance notre voisin, qu’un discours de dix minutes aura suffi à débarrasser de son appréhension suscitée par le nom Le Pen. Ayant réussi à convaincre un public ultra-politisé aux États-Unis, Marion Maréchal-Le Pen saura-t-elle mener la révolution conservatrice en France ?