Les chartes, québécoise et canadienne, ont été écrites afin de guider le législateur dans son pouvoir d’édicter et d’imposer toutes les autres lois du pays. Ces chartes sont plus que des guides : elles sont des compléments à la constitution même du pays qui les ont adoptées pour construire sur du solide toute cette charpente sociale et civile sur laquelle nous nous appuyons, citoyennes et citoyens, pour réussir à nous épanouir et à vivre heureux. Elles renforcent ce désir fondamental d’éliminer la violence.
Les chartes ont cette immense qualité de permettre à tout un chacun la possibilité d’inventer son bonheur sans que le regard des autres (ou d’une majorité) accuse ou condamne quiconque par abus d’autorité ou de démocratie. Sans ces documents, tous les autres documents législatifs n’ont qu’une faible portée sur l’organisation égalitaire, harmonieuse et équilibrée du pays. Non pas que sans ces chartes un pays est impossible, mais sans elles, la construction du pays demeure instable, délicate, fragile, faible, vulnérable. Écrire une loi en invoquant une dérogation aux chartes constitutionnelles du pays devient à plus ou moins brève échéance une brèche dangereuse à l’écroulement de l’édifice qu’est ce pays.
Évidemment, aucune nation, aucun édifice, aucune personne ne naît pour vivre éternellement : un jour ou l’autre, la mort nous guette et la fin commande de faire alors table rase pour recommencer la construction en prenant soin d’éviter les erreurs du passé afin de faire mieux, si possible. Mais voilà : faire mieux demeure aléatoire, toujours un essai et jamais la garantie de réussir n’y sera accolée. Les humains n’ont rien de divin : nous sommes tous imparfaits; l’histoire nous l’a bien enseignée. Il faut apprendre de notre passé sinon…
Ainsi, ce qui ressort de cette courte réflexion c’est que sans la liberté, la construction de quoi que ce soit est d’une vulnérabilité accrue et repose sur une fondation hasardeuse. On élève et l’on instruit toujours les enfants dans ce but d’en faire des êtres libres et responsables. Ainsi va la construction du pays.
Ce n’est pas par hasard que ces premières lois se nomment « Chartes des droits et libertés ». Le mot "liberté" est le maître d’œuvre, celui qui favorise la fabrication continuelle du droit et du mieux… si possible. Être à l’extérieur des chartes de la liberté, c’est s’exclure de la construction sur du solide d’un pays où il fait bon vivre, se réaliser et s’actualiser au meilleur de nos talents et de notre être.
Les chartes nous demandent le respect de la liberté de toutes et de tous. La liberté, comme la justice, est à faire, car ni l’une ni l’autre n’existent de soi.
Aimons nos chartes : ayons ce suprême souci de les maîtriser, surtout celle du Québec, celle qui nous constitue comme personne et comme citoyen du pays; elle fait du Québec l’oasis de paix que nous sommes responsables de toujours construire, et de laquelle il ne faut jamais se soustraire, qui que nous soyons.
François Champoux
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5 commentaires
François Ricard Répondre
22 janvier 2022La démocratie, ce n’est pas l’affaire de quelques-uns qui décident pour tous mais l’affaire de chacun décidant de son destin avec tous. La charte canadienne et la constitution canadienne nous ont été tous les deux imposées. Malgré notre volonté. Ce fut un recours à la violence. Un recours qui persiste puisque nous refusons toujours de signer. Pourquoi devrait-on sacraliser une domination illégitime?
François Champoux Répondre
24 janvier 2022Je partage votre point de vue sur la démocratie; j'y ajouterais ceci: je pense que la démocratie est une forme de loi du plus fort; c'est la loi du nombre: les plus nombreux remportent la victoire sur les minorités. C'est là que les Chartes viennent faire une importante différence contre les abus des plus nombreux, particulièrement celle du Québec où il est mentionné en clair que notre province est laïque. Nous sommes par la Charte de 1975 un État laïc.
Ce n'est pas parce que tout le monde le fait ou le dit que c'est vrai; la vérité est toujours à chercher, jamais acquise. C'est pour cela que je pense que la Loi 21 qui exclue des gens de façon arbitraire abuse de son pouvoir sous le sceau démocratique, et cela en ignorant sa propre charte de la liberté.
Marc Labelle Répondre
21 janvier 2022La disposition de dérogation fait partie de la Constitution canadienne (article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés) ; le gouvernement du Québec est donc libre d’y recourir dans le régime actuel.
François Champoux Répondre
24 janvier 2022Merci et bravo pour votre précision de l'article 33 de la Charte canadienne. Évidemment que c'est permis puisque le gouvernement du Québec l'a utilisé et que François Legault implore les fédéralistes de ne pas débouter la Loi 21 par la Charte canadienne.
Je parlais plus de la Charte du Québec dans le respect des citoyennes et citoyens qui cherche à faire vivre et naître cette notion de liberté, laquelle notion est comme la justice: toujours à faire.
Si on exprime sa liberté en excluant l'autre, on fait exactement ce qu'on tenté de faire des dictatures (nazisme d'Hitler, communisme de Staline, apartheid en Afrique du Sud...); Camus nous a bien enseigné que la fin ne justifiait pas les moyens: si on souhaite être libre, c'est avec l'autre que nous devons l'être, avec tout autre.
Marc Labelle Répondre
24 janvier 2022En revanche, je ne vous féliciterai pas pour votre argument reductio ad Hitlerum.