À son point de presse de jeudi suivant le caucus présessionnel du PQ, Pauline Marois a lancé cette phrase plutôt étonnante: «J'ai invité mon équipe à de la cohérence, de la cohésion, de l'unité, de la discipline, de la solidarité et de la confiance. Et je crois que tous les membres de l'équipe ont accepté mes mantras.»
Pourtant, aucune formule incantatoire ne saurait faire disparaître la grave crise que traverse le Parti québécois depuis quelques mois déjà.
Plus tard, en anglais, Mme Marois ajoutera même que la crise est terminée...
Cette dénégation de la réalité n'est pas non plus sans rappeler une déclaration similaire faite par la chef péquiste à la sortie du caucus de la fin juin: «l'hémorragie est stoppée».
La multiplication des souverainistes «hors-PQ»
Pourtant, quelques semaines plus tard, le Nouveau mouvement pour le Québec (NMQ) - un groupe intergénérationnel d'indépendantistes opposés à la «gouvernance souverainiste» - allait se créer en plein coeur d'été pendant que plusieurs souverainistes «hors-PQ» demandaient des États généraux...
Sans compter la chute fulgurante du PQ dans les sondages et l'arrivée accélérée des Legault & Sirois occupés à faire les yeux doux à une ADQ qui ne demande que cela...
Bref, la crise n'est pas terminée. Et aucun «mantra» ne peut la résorber.
Comme je l'écrivais cette semaine dans ma chronique «La mise sous tutelle», le chemin de croix de Pauline Marois n'est pas encore terminé...
Aucun débat sur l'«essentiel»
Et même si Mme Marois, comme elle l'avait déjà dit en juin, permettra des votes libres dans certaines circonstances pour tenter de calmer les dissensions au sein de son caucus autour du controversé projet de loi 204 sur la gestion de l'amphithéâtre de Québec, le fait est que sur l'essentiel - soit la véritable cause de cette crise qui perdure- , la chef du Parti québécois ne bouge pas d'un millimètre.
L'essentiel étant cette «gouvernance souverainiste» - le rapatriement de pouvoirs d'Ottawa plutôt qu'une promotion active de l'option du PQ -, à laquelle s'opposent quatre de ses députés démissionnaires, des présidents de comtés, militants, Jacques Parizeau, le NMQ et toute une série de groupes souverainistes «hors-PQ».
Sur cette question centrale - en fait, au-delà du PL204, elle fut la véritable bougie d'allumage de toute cette crise -, Mme Marois déclarait jeudi que «la stratégie du PQ est arrêtée». Point. Prochain appel.
Traduction: même si elle dit approuver la tenue d'États généraux - tel que réclamés par de nombreux groupes hors-PQ, dont le NMQ -, et jure que le PQ ne les organisera point, ni ne les contrôlera -, voilà qu'elle raye déjà de l'ordre du jour LE sujet à l'origine même de cette demande: la «gouvernance souverainiste».
En d'autres termes, quant à l'essentiel - soit quoi faire de l'option souverainiste si le PQ prenait le pouvoir - Mme Marois dit d'avance à ces États généraux: causez toujours mes lapins.
Ce qui, en chemin vers une éventuelle élection générale, ne fera rien pour rallier une «famille» souverainiste de plus en plus désunie.
Car de fait, depuis les démissions des Lapointe, Aussant, Curzi et Beaudoin; le divorce politique entre M. Parizeau et Mme Marois; l'amertume visible et audible des députés restants envers les démissionnaires; de même que l'apparition de groupes souverainistes «hors-PQ» opposés à la «gouvernance souverainiste», cette division s'accentue de semaine en semaine.
Pendant ce temps, pour la chef péquiste, son refus de discuter de l'essentiel ferait montre de «leadership» et de «détermination».
Le problème étant que pour plusieurs, cela risque d'être plutôt vu comme de l'«entêtement» et la source de cette division croissante.
D'autant plus qu'il est peu probable que le mot d'ordre de Mme Marois quant au refus de débattre de la «gouvernance souverainiste» soit suivi à l'extérieur du PQ.
Ce qui pourrait alors alimenter cette crise de plus belle plutôt que de calmer le jeu.
«Redevenir» l'alternative...
Cette volonté de balayer ce débat de fond en invoquant les «mantras» de la cohésion et de la discipline - un message envoyé tout autant à ses députés qu'à la constellation de groupes souverainistes hors-PQ -, est une manière fort risquée de tenter de ramener l'attention sur les dossiers «chauds» que sont ceux de l'opposition officielle.
Surtout à deux semaines de la rentrée parlementaire...
«Risquée», parce qu'en alimentant ainsi la division au sein du camp souverainiste élargi, le PQ n'en sera que plus faible politiquement face au gouvernement.
Rien de plus avantageux pour un gouvernement qu'un adversaire dont le camp est divisé...
Ce qui rendra d'autant plus compliqué de faire porter l'attention sur les critiques de cette même opposition officielle sur les dossiers du transport, des personnes âgées, des ressources naturelles et de cette «corruption» et «collusion» dans la construction qui se font tout à coup oublier.
En cela, Mme Marois a eu une autre formule - celle-là particulièrement révélatrice du degré d'inquiétude qui règne au sein de son caucus en vue de la prochaine élection et de la chute du PQ dans les sondages: nous devons «redevenir» l'alternative au gouvernement.
Traduction: pour le moment, le PQ n'est PLUS cette alternative.
Messieurs Legault & Sirois le sont...
Et contre cela, les mantras, quels qu'ils soient, risquent de ne pas suffire à la tâche...
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@ Photo: CBC
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