Dans un rapport traitant de sa doctrine nucléaire militaire, Washington affirme pouvoir en faire usage même en cas d'attaque conventionnelle. Ce rapport suggère de développer des missiles nucléaires de faible puissance, invoquant la «menace russe».
L'administration Trump a dévoilé sa nouvelle doctrine sur l'utilisation des armes nucléaires, le 2 février, détaillant la posture de Washington sur la question dans un document intitulé Nuclear Posture Review (NPR).
On y apprend notamment que les Etats-Unis s'octroient la possibilité de faire usage de l'arme nucléaire dans «des circonstances extrêmes, pour défendre les intérêts des Etats-Unis, ses alliées et ses partenaires».
Les «circonstances extrêmes» en question sont diverses et peuvent inclure «des attaques non-nucléaires stratégiques», qu'elles soient dirigées contre des populations civiles ou des infrastructures des Etats-Unis, de ses alliés ou de ses partenaires. Le fait d'envisager une riposte nucléaire à certaines attaques conventionnelles n'est cependant pas nouveau pour les Etats-Unis. L'administration Obama ayant déjà évoqué cette option en 2010, comme le rappelle le Los Angeles Times.
La «menace russe» invoquée pour justifier le développent de missiles nucléaires de faible puissance
Par ailleurs, dans la droite ligne de la nouvelle «stratégie de défense nationale» américaine, Washington entend adapter sa stratégie nucléaire au «retour déterminé à la concurrence entre grandes puissances» que souhaiterait la Russie.
Washington trouve ainsi «troublant» l'adoption par la Russie de stratégies et de capacités militaires qui reposeraient sur «l'escalade nucléaire». Les autorités américaines s'alarment aussi du fait que Moscou «développe et déploie de nouvelles têtes nucléaires et de nouveaux lanceurs», selon le rapport NPR.
Commentant ce rapport devant la presse, Greg Weaver, le responsable des capacités stratégiques au sein de l'état-major américain, a estimé qu'il existait aujourd'hui une «disparité» entre les capacités russes et celles des Etats-Unis et de l'OTAN. «Nous avons conclu que notre stratégie et nos capacités actuelles étaient clairement perçues par les Russes comme potentiellement insuffisantes pour faire de la dissuasion», a-t-il précisé, dans des propos rapportés par l'AFP.
Pour répondre à cette «menace russe», la NPR propose donc de développer un nouveau type de missiles nucléaires de faible puissance, qui seraient susceptibles d'être lancés depuis des sous-marins. Les Etats-Unis possèdent déjà de nombreuses armes nucléaires de faible puissance, mais aucune n'est embarquée. Le fait que ces missiles soient placés à bord de sous-marins éviterait, notamment, qu'ils soient stockés sur le territoire de pays alliés.
«Nous voulons nous assurer que la Russie ne fait pas d'erreur de calcul», a en outre confié aux journalistes le secrétaire adjoint à la Défense chargé de la politique nucléaire, Robert Soofer. «La Russie doit comprendre que lancer une attaque nucléaire, même limitée, ne lui permettra pas d'atteindre son objectif, modifiera fondamentalement la nature du conflit et aura un coût incalculable et intolérable pour Moscou», a-t-il mis en garde.
Ces déclarations s'inscrivent donc dans la stratégie de défense dévoilée par le président américain Donald Trump en décembre dernier, dans laquelle il présentait une «vision stratégique» destinée à protéger le peuple américain ainsi que l'«American way of life». Le document, publié par la Maison-Blanche et paraphé par Donald Trump, présentait la Russie et la Chine comme des «puissances révisionnistes [remettant en cause le système international actuel]», et suggérait la marche à suivre pour protéger le territoire américain, promouvoir la prospérité américaine, préserver la «paix par la force» et faire progresser l'influence des Etats-Unis dans le monde.