[->34869] Dans un livre récemment paru, l'ex-président du COVAN impute à Gilles Vigneault la presque absence du français lors des cérémonies d'ouverture des jeux de Vancouver. Monsieur Vigneault aurait imposé des conditions tellement «scandaleuses» (outrageous) à l'interprétation éventuelle de sa chanson Mon pays lors de ces cérémonies, que le comité s'est retrouvé dans l'obligation de trouver, à la hâte, une solution de remplacement. C'est donc bien injustement que l'on a accusé le comité d'avoir montré un certain mépris pour le fait français. Et, le sang de ce brave monsieur Furlong a en conséquence atteint le point d'ébullition.
Le patriote Furlong peut passer à la salle de refroidissement. D'abord, monsieur Vigneault a montré suffisamment d'intelligence pour ne pas tomber dans le piège qu'on lui tendait. Il a tout simplement donné la preuve que ses convictions étaient plus fortes que l'attrait de la vaine gloriole de voir sa chanson interprétée lors des cérémonies d'ouverture. On imaginera la satisfaction du comité s'il avait réussi à entraîner monsieur Vigneault dans une entreprise fondamentalement canadienne. On ne peut pas en dire autant de ceux qui se sont fait prendre au piège de «la nation». Mais, cela est une autre histoire.
Revenons-en plutôt au patriote Furlong qui dit avoir été «humilié» du fait que Réjean Tremblay aurait exigé de lui une réponse en français à une question en français. Monsieur Furlong a l'humiliation facile.
***
Racontons-lui donc une vraie histoire d'humiliation. En 1973-74, donc, le soussigné se retrouve à la faculté de Droit de UBC dans le cadre d'un programme de maîtrise en droit des compagnies. À la recherche d'un directeur de thèse, en début d'année, celui-ci se présente au bureau du directeur du programme des études supérieures, Don McRae, un néo-zélandais. On le dirigea au bureau du professeur Barry Slutsky, qui enseignait le droit des compagnies.
Le soussigné prend rendez-vous et se rend au bureau du savant professeur au moment indiqué. Là, il dut attendre près d'une heure et demi. Le docteur Slutsky était en consultation avec une étudiante de deuxième année, Janis Dillon. Une fois cette dernière sortie du bureau, le soussigné y entra à son tour. Le professeur Slutsky montra , disons, peu d'intérêt à superviser la thèse de ce dernier:«I have had another foreigner as a student last year and that was the hassle of my life.» Le ton était donné.
Lors de son choix de cours, le soussigné voulut répartir sa charge de travail également entre les deux trimestres, de façon à pouvoir mettre du temps sur la préparationde sa thèse. Il défrayait ses dépenses à même son propre argent, sauf une petite bourse de 2 000 $, et ne voulait pas de temps mort dans son programme. Pour abréger l'histoire, disons que le soussigné fut plus ou moins contraint de concentrer ses cours au second trimestre, ce qui signifiait qu'il lui serait difficile de commencer à travailler sur sa thèse avant l'été.
À tout événement, lors du premier trimestre, le soussigné rédigea un travail dans le domaine du droit fiscal sous la supervision du professeur Tony Sheppard. Il y eut six rencontres entre le professeur et l'étudiant au cours du trimestre, chacune se transformant en une séance d'humiliation pour le second : «Ah, you don't know that? That's pretty basic. Well, I'm surprised that you wouln't know this.» C'était humiliant, mais tolérable. Le soussigné eut droit à une note finale de 65 %, la note minimale requise: « I gave you 65 % because I din't want to fail you. I'll give you a chance and allow you to re-write this long paper. You'll have a chance to raise your mark because we never know what might happen to you here Mr. Côté.» Les étudiants anglais n'étaient pas traités de cette façon-là. Loin de là.
À tout événement, l'année s'est déroulée sur le même mode. En avril, le soussigné fut convoqué au bureau de Don McRae qui lui apprit qu'il avait échoué quatre cours sur cinq. Grosso modo, ses notes se situaient autour de 62 %, alors que le note de passage était de 65 %. Voici un extrait de la conversation qui a alors eu lieu entre le soussigné et McRae.
«So, what are you going to do?», demanda McRae. «I'm going to go back to Quebec and get a degree elsewhere... From a decent place, I guess.» répondit le soussigné. «Why don't you appeal your marks and say you were ill at the time of the exams? You could meet each one of your instructors individually and tell them you didn't feel well at the time of the exams.» poursuivit McRae. «I wasn't ill at the time of the exams. I stopped smoking and even gained weight, here.» répondit le soussigné.
McRae savait que le soussigné n'était pas malade au moment des examens. Tout le monde le savait. On lui demandait d'aller au bureau de quatre professeurs (Tony Sheppard, Ken Bagshaw, Bill Dixon et (oublié) Robertson) et de demander la note de passage sur la base d'une affirmation que tous savaient être fausse. Les étudiants anglais n'étaient pas traités de cette façon-là.
«Well, why don't you raise a language problem, then? You can meet your instructors and claim a language problem.» poursuivit McRae. Le sang du soussigné a alors atteint le point d'ébullition: «A language problem? I didn't have a language problem here, ya fucking jerk. I can speak English as well as you do, ya fucking shithead...»
Et le soussigné est retourné au Québec. Il a par la suite obtenu une maîtrise en droit de l'université d'Ottawa où il a complété son programme dans les deux langues. Il a plus tard obtenu le titre de Certified Investment Manager en anglais. Et, il est publié en anglais dans une revue universitaire.
***
À l'époque, le soussigné était fédéraliste décidé, mais pas le dos courbé. Comment les «séparatistes» peuvent-ils parler d'indépendance alors que messieurs Trudeau et Chrétien nous ouvrent les portes du Canada? Le soussigné aurait soulevé un problème de langue de façon presque automatique aux États-Unis, en Angleterre, en Australie, n'importe où, mais pas au Canada. Il n'était pas question qu'il aille se présenter au bureau de quatre unilingues anglophones pour aller soulever un problème de langue dans son propre pays. Ça, c'est de l'humiliation, monsieur Furlong. Le soussigné n'avait jamais caché ses origines francophones lors de sa demande d'admission. Il a même dû se soumettre au TOEFL. On savait très bien, à UBC, que c'est ce qui attendait le soussigné à Vancouver en 1973-74, lorsqu'on l'a admis au programme de maîtrise au printemps 1973. Ça, monsieur Furlong, ce n'était pas un «cheap shot». C'était de l'humiliation préméditée. Et, ne venez pas nous raconter que le Canada a beaucoup changé depuis 1973-74.
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6 commentaires
Archives de Vigile Répondre
17 octobre 2012Considérant le récent rapport du Commissaire aux langues officielles, il serait peut-être pertinent que Vigile ramène ce texte dans l'actualité. À l'époque, monsieur Frappier l'avait publié sous la rubrique Anonyme, même si je m'étais identifié lors de l'envoi de mon texte. I'm not in the habit of writing anonymous material for public consumption. I'm just letting it known to the shitheads at UBC. I have neither forgotten nor forgiven. And, I hate the scuzzy bums even more than I did then.
Louis Côté
Laurent Desbois Répondre
9 février 2011Respectez les faits, M. Furlong
Réjean Tremblay
La Presse
le 09 février 2011
http://www.cyberpresse.ca/chroniqueurs/rejean-tremblay/201102/09/01-4368426-respectez-les-faits-m-furlong.php
Mais quand on est assez grossier pour ne pas écouter l'allocution d'un premier ministre invité d'honneur pendant une dizaine de minutes, vous devez vous attendre à quoi?
Laurent Desbois Répondre
8 février 2011UN MÉPRIS SANS NOM POUR LA CULTURE QUÉBÉCOISE
http://pierrecurzi.org/nouvelle/un-mepris-sans-nom-pour-la-culture-quebecoise
Le député de Drummond a présenté une motion sans préavis à l’Assemblée nationale cet après-midi qui a été balayée du revers de la main par le gouvernement libéral.
Archives de Vigile Répondre
8 février 2011Pour continuer dans la même veine, à la même époque à l'université d'Ottawa au département d'informatique la direction décide de former 2 groupes pour le même cours: 1 groupe francophone et 1 groupe anglophone avec le même professeur- question d'embarquer dans le bilinguisme -.
Le prof, étant un britannique, et malgré toute sa bonne volonté avait un français horrible. A la fin du premier cours nous l'avons supplié de nous donner le cours en anglais avec la promesse que personne le saurait.
Quelle fut pas notre surprise, à la fin de la session, de constater que toutes nos notes avaient été baissées. Pourquoi? - la moyenne du groupe francophone était de 15 points supérieure à la moyenne du groupe anglophone. Le professeur craignait que nous soyons accusé de tricherie par le groupe anglophone.
Tiens toé... prends ton trou
L'engagé Répondre
8 février 2011MERCI pour ce témoignage éloquent.
Anonyme RB Répondre
8 février 2011Le Globe&Mail couvrait en fin de semaine et les commentaires à l'égard de Furlong étaient généralement négatifs. Alors tant pis pour ce grand orgueilleux incapable d'admettre ses erreurs! Il me semble qu'il blâmait *tout le monde* à part lui même, incluant bien sûr le grand Gilles.
Voir http://www.theglobeandmail.com/news/arts/books/vancouver-olympic-ceo-john-furlongs-book-recalls-language-controversy/article1895253/comments/