Les beaux parleurs

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La gauche souverainiste ne comprend pas que si elle perd, c'est justement parce qu'elle est à gauche

Les derniers sondages révèlent que le discours de la CAQ séduit un fort pourcentage d’électeurs en cette période de campagne électorale. Il y a toutefois lieu de se rappeler la grande leçon de la fable « Le renard et le corbeau » à l’effet que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute. Ce n’est pas parce que la CAQ s’est efforcée de cacher son naturel au cours des derniers mois, qu’il ne reviendra pas au galop le lendemain des élections avec tous ses effets indésirables advenant une prise du pouvoir.


Le Québec est pourtant riche de souvenirs amers où l’action postélectorale des gouvernements ne correspond pas aux promesses faites en cours de campagne. En 2014, les libéraux s’étaient engagés à ne pas augmenter les tarifs pour les services de garde, mais cela ne les a aucunement gênés lors de leur arrivée au pouvoir de procéder à une augmentation modulée qui a affecté principalement les jeunes de la classe moyenne. Ils prétextaient que l’économie était leur priorité afin de préserver les services publics et les programmes sociaux, mais le sabrage dans ceux-ci a été tel qu’il serait honteux de prétendre que la qualité n’en a pas été affectée.


En 2003, nous avions sensiblement eu droit au même film avec Jean Charest qui promettait de prendre le parti de la classe moyenne avec sa réingénierie de l’État mais celle-ci s’est principalement avérée profitable pour les amis du pouvoir. Ces derniers ont trouvé des avantages dans les infrastructures pendant que les droits des travailleurs étaient charcutés et que le peuple hurlait dans la rue en scandant qu’il n’avait pas voté pour cela.


Du côté péquiste, ils sont nombreux à leur reprocher d’avoir toujours eu tendance à gouverner plus à droite que la gauche annoncée dans leurs plateformes électorales. Les contingences du pouvoir ne leur permettaient peut-être pas d’être aussi progressistes qu’ils le souhaitaient, mais on leur attribue tout de même une gouvernance plus sociale-démocrate que celle des libéraux au cours des dernières décennies.


Il est habituel pour la plupart des partis en campagne électorale de se montrer sous ses meilleurs attributs et de rester cois sur les éléments de leur programme qui heurtent un large spectre de la population. Loin de vouloir refléter du cynisme, je rejoins le propos de certains collègues qui trouvent tout à fait normal ce comportement chez un parti qui veut se faire élire et ils considèrent que c’est faire preuve de réalisme et de pragmatisme. Un tel constat devrait cependant amener l’électeur à dépasser les slogans de campagne électorale et à appréhender la gouvernance d’un parti sur la base de ses prises de position échelonnées sur plusieurs années et sur l’idéologie qui l’anime.


La leçon est implacable, la gouvernance est à l’image du parti qui forme le gouvernement. La CAQ est la formation la plus à droite sur l’échiquier politique québécois et ses mains tendues des dernières semaines seront nécessairement empreintes de cette tendance. Si certains se croient à l’abri des portions plus rugueuses de son programme, le réveil pourrait être brutal avec un gouvernement caquiste.