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Hélène Buzzetti - Ottawa — Les nouveaux câbles diplomatiques américains divulgués par WikiLeaks lèvent le voile sur ce que les États-Unis considèrent comme le complexe d'infériorité des Canadiens envers les Américains, mais ils trahissent du même coup le sentiment de supériorité de ces derniers envers le Canada. Ainsi, les diplomates américains s'étonnent que chaque électeur canadien n'ait pas les relations canado-américaines à l'esprit en allant voter et croient que la visite du président Obama a aidé le gouvernement conservateur à faire adopter son budget en 2009!
Les quatre nouvelles communications entre l'ambassade américaine à Ottawa et Washington, étalées sur la place publique hier, offrent davantage de détails croustillants que du contenu substantiel à se mettre sous la dent. Un câble daté du 22 septembre 2008, soit en pleine campagne électorale fédérale, relate à quel point les États-Unis ne font pas partie des enjeux discutés par les chefs politiques. Au grand étonnement de l'ambassadeur américain en poste à Ottawa, David Wilkins.
M. Wilkins offre quelques explications à cette situation. «Un complexe d'infériorité canadien presque inhérent conditionne peut-être les leaders politiques canadiens à parler d'enjeux intérieurs du quotidien [bread and butter issues] plutôt que de faire porter cette élection sur les États-Unis (comme lors de la campagne sur le libre-échange de 1988)», écrit-il. Les États-Unis sont donc, conclut-il, «le proverbial éléphant de cette élection: omniprésent, mais potentiellement trop menaçant pour en parler».
L'ambassadeur comprend d'autant moins ce «silence assourdissant» que les deux pays ont une intense relation politique et économique. «Logiquement, estime-t-il, la capacité d'un candidat, d'un parti et encore plus d'un chef de parti à gérer cette relation essentielle devrait être un facteur-clé que les électeurs ont à l'esprit en allant voter.»
L'autre expression de ce sentiment d'importance se lit dans le câble envoyé le 22 janvier 2009 par Terry Breese, chargé d'affaires à Ottawa, préparant le président Barack Obama à sa première visite à Ottawa. «Votre voyage aidera à assurer la survie du gouvernement lors du vote de confiance début février sur le budget fédéral, par lequel le Canada affichera son premier déficit en plus d'une décennie à cause d'un plan de relance de 30 à 40 milliards de dollars», écrit
M. Breese. Nulle part n'est-il fait mention que le gouvernement a dû proroger le Parlement avant Noël pour éviter d'être renversé par la coalition et que les partis d'opposition rendaient sa survie conditionnelle à la qualité du plan de relance proposé.
Antiaméricanisme à la CBC
Une autre communication, datée de janvier 2008 et signée de l'ambassadeur Wilkins, prévient Washington de l'image de plus en plus négative que les séries dramatiques diffusées à CBC renvoient des États-Unis. L'ambassadeur s'inquiète des émissions Border, Little Mosque on the Prairie, Intelligence et H2O, dans lesquelles on observe des références peu subtiles à Maher Arar, à la «No-Fly-List» ou encore aux enlèvements pour interrogatoires musclés de la CIA.
Un autre câble relate que, lors de leur première rencontre bilatérale, Hillary Clinton a demandé à son homologue français Bernard Kouchner si l'Europe était prête à accueillir certains prisonniers de Guantánamo. M. Kouchner a répondu oui, mais sur la base du «cas par cas». À la fin de la rencontre, est-il écrit, «il a remis un papier à la secrétaire d'État à propos d'Omar Khadr, un musulman de 15 ans d'origine canadienne. La secrétaire a accepté de revoir le dossier».
Notons enfin que les esprits s'échauffent concernant le site WikiLeaks. Tom Flanagan, un ancien conseiller très proche de Stephen Harper, a déclaré sur les ondes de CBC que le responsable de cette fuite massive devrait être «assassiné». Il s'est fait l'écho de Mike Huckabee aux États-Unis.
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