IDÉES

Le français comme langue publique commune

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En droit, il s'agit de faire du français la langue d'État du Québec, et le reste coulera de source






Dans Le Devoir du 24 août, Monelle Guertin pose des questions légitimes auxquelles je souhaite répondre (« Langue française : savoir lire les indicateurs avant de partir en peur »). Pourquoi devons-nous nous intéresser à des données statistiques portant sur la langue maternelle ou la langue parlée à la maison si notre objectif est de faire du français la langue publique commune ? Par « langue publique commune », je n’entends pas seulement la langue de l’espace public, car il y a plusieurs langues publiques au Québec qui doivent être reconnues et financées par l’État, mais bien tout d’abord la langue qui est principalement parlée dans nos institutions publiques communes. À l’Assemblée nationale, devant les tribunaux, à la Bibliothèque nationale, dans les musées nationaux, à la télévision et à la radio de Radio-Canada, la langue de prédominance doit être le français. La plupart des écoles, collèges, universités, hôpitaux et CLSC doivent être de langue française.


 

Réaliser l’objectif de faire du français la langue publique commune, cela veut dire aussi que, même si les personnes parlent différentes langues à la maison et ont une variété de langues maternelles, le français est la langue qui devrait être communément partagée et effectivement parlée entre eux dans la société. Si tel est notre objectif, pourquoi alors s’intéresser à la langue maternelle et à la langue parlée à la maison ?


 

On doit s’intéresser à la langue maternelle surtout pour la comparer avec la langue parlée à la maison. Si une personne a X comme langue maternelle et Y comme langue parlée à la maison, il se peut que l’on soit en face d’un cas de transfert linguistique vers Y. Mais pourquoi s’intéresser à la langue parlée à la maison si l’important est la langue d’usage dans les lieux publics ? La raison essentielle concerne la langue spécifique qui est parlée à la maison. Si la personne parle le vietnamien, l’arabe, le créole ou l’espagnol à la maison, mais a le français comme principale langue officielle parlée (PLOP), c’est-à-dire parlée dans son voisinage, avec les amis, dans les lieux publics et sur le marché du travail, il n’y a pas de problème. Il ne s’agit donc pas de stigmatiser nos concitoyens allophones.


 

Mais si c’est l’anglais qui est parlé à la maison, il y a de fortes chances que la PLOP de cette personne soit l’anglais. Or, si le nombre de personnes qui parlaient le français à la maison au Québec entre 2011 et 2016 est passé de 87 % à 87,1 %, l’anglais comme langue parlée à la maison a augmenté de près d’un point de pourcentage (de 18,3 % à 19,2 %), même si, en même temps, l’anglais comme seule langue parlée à la maison a baissé d’un dixième de 1 %.



 Le sort de la langue publique commune est intimement lié à la principale langue officielle parlée



 

La principale langue officielle parlée


 

Il s’agit d’un signal important concernant l’évolution de la PLOP au Québec, surtout si l’on tient compte du fait que l’anglais exerce une attraction socioéconomique importante, que c’est une langue appuyée financièrement par l’État et que la citoyenneté canadienne peut être accordée à une personne unilingue anglaise, y compris lorsque cette personne est domiciliée sur le territoire du Québec. À Montréal, c’est près de 40 % de la population qui a l’anglais comme PLOP. Ces données sont inquiétantes parce qu’elles posent des défis de taille au projet d’instaurer le français comme langue publique commune au Québec. Le sort de la langue publique commune est intimement lié à la principale langue officielle parlée.


 
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Michel Seymour25 articles

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Michel Seymour est né en 1954 à Montréal. Très tôt, dès le secondaire, il commence à s’intéresser à la philosophie, discipline qu’il étudie à l’université. Il obtient son doctorat en 1986, fait ensuite des études post-doctorales à l’université Oxford et à UCLA. Il est embauché à l’université de Montréal en 1990. Michel Seymour est un intellectuel engagé de façon ouverte et publique. Contrairement à tant d’intellectuels qui disent avec fierté "n’avoir jamais appartenu à aucun parti politique", Seymour a milité dans des organisations clairement identifiées à une cause. Il a été l’un des membres fondateurs du regroupement des Intellectuels pour la souveraineté, qu’il a dirigé de 1996 à 1999. Pour le Bloc québécois, il a co-présidé un chantier sur le partenariat et a présidé la commission de la citoyenneté. Il est toujours membre du Bloc, mais n’y détient pour l’instant aucune fonction particulière.





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