Voilà le cri du cœur de plusieurs femmes occidentales de culture musulmane, faisant suite aux accusations d’islamophobie et au retrait de la lettre du chirurgien pédiatrique Dr Sherif Emil publiée dans le Journal de l’Association médicale canadienne, laquelle dénonçait l’utilisation d’une petite fille d’à peine 5 ou 6 ans portant le hijab pour illustrer son numéro du 8 novembre 2021.
Selon lui, l’utilisation de cette photo était malavisée et perpétuait une pratique souvent traumatisante et nuisible. Il faisait valoir que «le respect ne doit pas altérer le fait que le hijab, le niqab et la burka sont aussi des instruments d’oppression pour des millions de filles et de femmes dans le monde qui n’ont pas la possibilité de faire un choix».
Une campagne virale sur les médias sociaux
À la suite de la publication de cette histoire par CBC News le 23 décembre dernier, puis par TVA Nouvelles, la Canadienne Yasmine Mohammed (auteure de Unveiled: How Western Liberals Empower Radical Islam) et la journaliste et militante politique américaine d’origine iranienne Masih Alinejab ont lancé la campagne #LetUsTalk (#LaissezNousParler) sur les médias sociaux. Elles y dénoncent qu’elles se font accuser en Occident de provoquer de l’islamophobie lorsqu’elles racontent leur histoire. Elles affirment, en tant que femmes du Moyen-Orient, craindre l'idéologie islamique et demandent d’être entendues.
Cette campagne, qui a incité les femmes originaires du Moyen-Orient à partager des photos d’enfance en hijab forcé et à s’exprimer sur l’idéologie islamique, est devenue virale partout en Occident.
Cette campagne arrive à point nommé, car le premier ministre Justin Trudeau vient de demander à trois de ses ministres de s’attaquer au discours haineux. Ainsi, le ministre de la Justice et procureur du Canada, David Lametti, et le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, se sont vu confier le mandat de déposer un projet de loi afin de lutter contre la haine en ligne.
Le ministre du Logement et de la Diversité et de l’Inclusion, Ahmed Hussen, a quant à lui la mission d’élaborer un plan d’action national de lutte contre la haine et les crimes haineux.
De son côté, le Conseil national des musulmans canadiens, un des organismes à l’origine de la plainte contre le Dr Emil, réclame des mesures concrètes pour lutter contre l’islamophobie associée à des crimes haineux.
Le droit de critiquer
L’exemple du traitement subi par le Dr Sherif Emil pour avoir dénoncé certaines pratiques religieuses sexistes démontre hors de tout doute l’importance de s’assurer que la critique des religions soit toujours permise au Canada et ne soit pas considérée comme du racisme ou un crime haineux. La critique des pratiques religieuses sexistes est indispensable pour l’avancement des droits des femmes et le respect de l’égalité entre les sexes au Canada.
Au Canada, nous avons le droit de critiquer des idéologies. C’est l’encouragement au recours à la violence contre les tenants d’une idéologie (discours haineux) qui est interdit. Il est primordial que les initiatives du gouvernement fédéral pour lutter contre les crimes haineux protègent la critique des religions. Agir autrement mettrait non seulement en péril notre liberté d’expression, mais risquerait aussi d’avoir un impact important sur les droits des femmes, souvent malmenés par les religions.
– Marie-Claude Girard, retraitée de la Commission canadienne de la personne, Cantley