La règle du «50% + 1» : Couillard vs Bourassa?

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Le Brexit fait tomber les masques





Le Brexit – la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne votée à 51,9% par référendum -, continue à faire des vagues au Québec. Par ailleurs, autant chez les souverainistes que les fédéralistes.


Une réaction se distingue par contre des autres. Et pas nécessairement pour les bonnes raisons.


Ce matin, en entrevue avec Le Soleil, la ministre des Relations internationales du Québec, Christine St-Pierre, tient des propos aussi étonnants que détonants.


Que la ministre dise qu’«on est toujours plus forts unis que désunis» est une déclaration tout à fait cohérente avec une perspective fédéraliste.


Là où le bât blesse cependant est dans ce passage-ci :


«À Alexandre Cloutier, candidat à la direction du Parti québécois, qui a noté que tous les leaders du monde, y compris Justin Trudeau, ont reconnu «le résultat du vote de 51,9 %», Christine St-Pierre rétorque qu'une «victoire ne veut pas dire un mandat fort» pour négocier la suite des choses. Tout dépend de l'ampleur de cette victoire, insiste-t-elle. «On ne peut pas dire "50 % plus un", et croire que tout va se faire magiquement et que ça va être très, très facile.»»


Oh, la.


La ministre, parlant bien entendu au nom de son gouvernement, serait-elle en train de dire que la règle universelle du 50% +1 ne s’appliquerait plus aux yeux du Parti libéral du Québec dans l’éventualité d’un autre référendum sur la souveraineté?


Serait-elle en train de reprendre la thèse fallacieuse avancée par la loi fédérale dite sur la Clarté voulant qu'une victoire serrée de l'option souverainiste ne constituerait pas un mandat suffisant pour la réaliser?


Serait-elle en train de qualifier, sans en dire la hauteur, ce qui constituerait ou non, à ses yeux, une victoire claire du Oui?


Serait-elle en train de dire qu'au référendum du 30 octobre 1995, avec 50,6% des voix à peine, la victoire du Non était claire, mais qu'une victoire semblable pour le Oui ne le serait pas?


Bref, serait-elle en train de contredire la position connue et traditionnelle du Parti libéral du Québec sur ce sujet tout de même majeur?


***


Car aussi hypothétique soit l’idée même d’un troisième référendum sur la souveraineté d'ici quelques années, il n’en reste pas moins qu’au Québec, tous partis confondus, la règle du 50% + 1 fait consensus depuis des lustres. Point.


Qu’on pense seulement aux motions unanimes le confirmant et adoptées dans ce sens à l’Assemblée nationale au fil des ans.


Même sous la direction de Philippe Couillard, le 23 octobre 2013, alors que le PLQ formait l’opposition officielle, les députés libéraux, y compris Christine St-Pierre elle-même, l’ont réitéré en votant cette motion adoptée à l’unanimité :


«Que l'Assemblée nationale du Québec réaffirme et proclame unanimement les principes fondamentaux formulés dans la Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec;


«Que l'Assemblée nationale réaffirme que les Québécois et les Québécoises ont le droit de choisir leur avenir et de décider eux-mêmes de leur statut politique;


«Que l'Assemblée nationale réaffirme que lorsque les Québécois et Québécoises sont consultés par référendum tenu en vertu de la Loi sur la consultation populaire, la règle démocratique alors applicable est celle de la majorité absolue, soit 50 % des votes déclarés valides plus un vote;


«Que l'Assemblée nationale réaffirme que seule l'Assemblée nationale du Québec a le pouvoir et la capacité de fixer les conditions et modalités entourant la tenue d'un référendum conformément à la Loi sur la consultation populaire, y compris le libellé de la question référendaire;


«Que l'Assemblée nationale réaffirme qu'aucun Parlement ou gouvernement ne peut réduire les pouvoirs, l'autorité, la souveraineté et la légitimité de l'Assemblée nationale, ni contraindre la volonté démocratique du peuple québécois à disposer lui-même de son avenir;


«Que l'Assemblée nationale condamne l'intrusion du gouvernement du Canada dans la démocratie québécoise par sa volonté de faire invalider les dispositions contestées de la Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec;


«Que l'Assemblée nationale réclame que le gouvernement du Canada s'abstienne d'intervenir et de contester la Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec devant la Cour supérieure du Québec.»


***


Pensons aussi, il va sans dire, à la déclaration solennelle faite par Robert Bourassa le 22 juin 1990, alors qu’il était premier ministre du Québec et chef du PLQ, devant l’Assemblée nationale au moment de  la «mort» de l’Accord constitutionnel du Lac Meech :


«Quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse, le Québec est, aujourd'hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d'assumer son destin et son développement».


***


Par ses propos, la ministre St-Pierre entendrait-elle s’éloigner de cette position pourtant réitérée à maintes reprises au Québec par tous les partis politiques siégeant à l'Assemblée nationale?


Si oui,  son premier ministre est-il d’accord ? Ce qui, de toute évidence, serait complètement inconcevable.


Si non et si les propos rapportés sont bel et bien les siens, la ministre serait sage de les rectifier.


 




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