Le sondage Léger Marketing sur les valeurs et les religions, dont rendait compte Le Devoir de ce mardi, confirme la tendance observée avec constance depuis 1998 quant aux attentes des Québécois concernant la place de la religion dans l'enseignement à l'école: la majorité privilégie un enseignement non confessionnel et culturel de la religion.
Les sondages révèlent en effet une structure de l'opinion assez stable entre les trois arrangements possibles, particulièrement discutés depuis la parution en 1999 du rapport du Groupe de travail sur la place de la religion à l'école (rapport Proulx) (voir tableau 1): un enseignement de la religion de type culturel reçoit la faveur de la majorité des Québécois, tandis que les tenants d'une école n'offrant aucun enseignement religieux ou sur la religion se disputent la seconde place avec les tenants d'un enseignement confessionnel. Les scores ont varié entre 16 % et 44 % chez les «confessionnalistes» et entre 9 % et 29 chez les «laïcistes».
Un sondage de 2004 mené pour le compte du Centre de recherche et d'information du Canada (CRIC) attire particulièrement l'attention en raison de la grande similarité des réponses avec le récent sondage du Devoir (tableau 2).
Une tendance confirmée
Par ailleurs, un sondage mené en 1999 pour le compte de la Coalition en faveur du droit des parents de choisir l'école de leur préférence, mais avec des questions formulées autrement, avait confirmé la tendance observée lors de l'enquête menée en 1998 pour le compte du Groupe de travail sur la place de la religion à l'école.
On avait en effet posé la question suivante: «Le Rapport Proulx recommande que l'enseignement moral et religieux (confessionnel) qui existe aujourd'hui dans les programmes scolaires au primaire et au secondaire soit supprimé et remplacé par un enseignement culturel des religions obligatoire pour tous. Diriez-vous que vous êtes ... avec cette recommandation?». 55 % des répondants s'étaient déclarés entièrement (22 %) ou plutôt d'accord (33 %) et 43 % avaient affirmé leur désaccord. À une seconde question, 56 % d'entre eux avaient estimé ce changement souhaitable.
La même Coalition avait demandé aux parents d'enfants d'âge scolaire: «En dispensant l'enseignement culturel des religions, l'école répondrait-elle tout à fait, assez, peu ou pas du tout à ce que vous souhaitez transmettre à vos enfants?» Une majorité d'entre eux, soit 57 % avaient déclaré positivement, soit «tout à fait», 17 %, et «assez», 20 %, alors que 28 % avaient répondu: «peu» et 13 % «pas du tout».

Minoritaires
Ces données diverses sont très vraisemblablement connues de ceux qui militent pour le maintien d'un enseignement confessionnel à l'école ou de leurs leaders. Se sachant minoritaires dans l'opinion, ils militent plutôt pour la liberté de choix où ils sont en terrain relativement plus favorable. En soi, la liberté est en effet toujours préférable à la contrainte. C'est ainsi que des sondages ont révélé jadis que les Québécois de langue française sont pour le libre choix en matière de langue d'enseignement, mais favorables à l'imposition de l'école française aux immigrants !
En décembre 2007, CROP a posé pour le compte de La Presse la question suivante: «À partir de septembre 2008, un cours d'éthique et de culture religieuse conçu par le ministère de l'Éducation sera obligatoire pour l'ensemble des élèves québécois. Le cardinal Ouellet propose que les parents aient le choix entre l'enseignement religieux confessionnel et le cours d'éthique et de culture religieuse. Êtes-vous en accord ou en désaccord avec cette proposition?» Cinquante-sept pour cent se sont déclarés d'accord, ce qui n'est pas une surprise.
Pour justifier les contraintes qu'impose l'État par la loi, il faut évidemment de bonnes et légitimes raisons. Tout le débat est là. Mais ce débat a déjà été fait et conclu.
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Jean-Pierre Proulx, Professeur à la faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal

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