Le 3e Non du 7 avril

La fin du Québec libre?

Et puis après?

Le temps des « gougnafiers » !

Le 23 mars dernier un chroniqueur du Journal de Montréal, (un journal certes populaire), M. Mathieu Bock-Côté, a posé une importante question. Au vu de la chamaille politique dans laquelle les Québécois s’enfonçaient juste avant les élections et au vu de la solidarité que la minorité anglaise du territoire manifestait pour conserver ses privilèges, l’auteur est allé jusqu’à se demander en conséquence ce qui suit : «N’est-ce pas à bien des égards (la lutte interne) le signe d’une société EN DÉCOMPOSITION?»

Le mot n’a pas été relevé. Mais il n’est pas insignifiant. Il vient d’un chroniqueur qui a récolté toute une gerbe de diplômes universitaires pertinents et dont la voix se fait entendre fréquemment. Alors moi j’écoute!

C’est la première fois qu’un chroniqueur s’interroge sur la mort éventuelle de notre société. C’est important car un organisme qui est en décomposition ne peut ressusciter que par la magie d’un miracle. Cela n’arrive pas souvent! Jusqu’alors nous nous demandions si notre culture ne s’affadirait pas – un peu, beaucoup – mais jamais on nous demandait de préparer les funérailles. C’est fait.

Je ne suis pas loin de me poser cette même question. Juste avant les élections, j’ai avancé avec toute la conviction dont je suis capable l’idée que l’élection du 7 avril à venir était «PLÉBISCITAIRE». C’est à dire qu’elle répondrait à la question posée par le gouvernement à savoir si l’État serait laïque – neutre - ou pas dans la manifestation vestimentaire visible (de ses seuls employés). Les électeurs ont choisi. Et je perçois cela comme un troisième NON. Un plébiscite est un proche parent du référendum! L’identité nationale des Québécois, par ce choix symbolique, pourrait ainsi se décomposer ; les électeurs n’ont effectivement rien eu à cirer de ce symbole identitaire fort qui leur était proposé. Les symboles c’est pour les rêveurs, avons-nous entendu dire!

Oui, mais il y a des conséquences ; dans l’immédiat, pas nécessairement pour les individus. Les électeurs auraient dit que l’important c’est l’individu et que voilà l’engeance! Mais moi je ne réprouve que le mauvais individualisme. Le bon, celui qui compte et qui se transforme en humanisme, ne rejette pas la collectivité des choses, la solidarité de la famille, la vie du groupe. La nation, pour lui, est un vaisseau qui aide les individus à mieux voyager… Refuser d’utiliser la barque est tragique. Une nation en décomposition est une coque qui coule. A nos chaloupes!

La vie nationale, dans le cadre politique qui nous est imparti, risque donc, selon moi, de se diluer dans les deux autres qui nous investissent. Il est possible qu’à partir de maintenant notre statut de demi-nationaux devienne permanent. Les demi-nationaux forment un groupe d’individus dont le caractère, dans l’univers, n’est reconnu, que comme un fragment historique «en décomposition» éventuelle et dont il n’est pas important de tenir compte. Je le sais pour m’être promené dans le monde et ne pas trop savoir comment décrire ma citoyenneté.

Pour ceux qui cherchent l’affranchissement, dont je suis, il faut se demander s’il est encore temps d’enrichir suffisamment la culture des individus pour que celle-ci s’affirme comme civilisatrice en Amérique et ailleurs. Et par elle-même.

Il me semble, en tout cas, que ce ne sont pas les Chambres de Commerce, celles qui «s’occupent des vraies affaires» comme dit le mouvement «libéral», qui vont nous pousser à y arriver. Du reste bien des signes montrent que l’effritement collectif est en cours.

Sur l’hôtel de la ville de Montréal, jadis une administration municipale québécoise comme une autre, depuis une semaine, c’est le drapeau d’une compagnie privée «le Canadien» qui flotte sur le balcon. Pas d’autre. Et les grands mats qui reconnaissaient l’État sont disparus. Il ne reste, sur l’annexe de l’hôtel, que la bannière de l’Angleterre, cette croix rouge de Saint-George. Nous sommes loin des visions du général de Gaulle et du premier ministre Jonhson! Cette semaine, par ailleurs, c’est le ministre des Affaires municipales, - le nouveau - qui s’est déplacé pour «négocier» - à Montréal - une certaine indépendance de la Métropole par rapport au reste de la Nouvelle-France!

Quant au reste, la rationalisation de l’aménagement urbain et l’enrichissement du corps professoral, deux sujets reliés directement à la culture et à la beauté des formes, et dont il n’a naturellement pas été question durant la campagne électorale, il va falloir attendre. Car l’État ne sera pas là pour s’en occuper… ce sont les gens d’affaires qui veilleront «au grain». Bonne chance.

Un jour peut-être serons-nous gouvernés par les gens qui s’occupent du collectif, du groupe, du national, soient les aménagistes, les architectes, les urbanistes, les biologistes et les écrivains. Les ingénieurs et les médecins, eux, me feraient plaisir s’ils retournaient à leurs règles à calcul et à leurs stéthoscopes. Mais moi je ne serai probablement pas là pour en profiter ; je ne souhaite qu’une chose, c’est que le collectif fasse l’objet d’un nouvel intérêt des honnêtes gens. En attendant je vais me remettre à la lecture de Verlaine et de Voltaire.


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11 commentaires

  • Jean-Louis Pérez-Martel Répondre

    18 mai 2014

    Bonjour Monsieur Bonhomme,
    En vous référant à l’article du 23 mars 2014, écrit par M. Bock-Côté, vous écrivez : « C’est la première fois qu’un chroniqueur s’interroge sur la mort éventuelle de notre société… »
    Permettez-moi de vous faire découvrir cet autre article écrit le 29 mai 2008 traitant du même phénomène de dérive nationale : Québec, la destruction d’une nation

    http://www.vigile.net/Quebec-la-destruction-d-une-nation
    Cordialement,
    JLPM

  • Archives de Vigile Répondre

    18 mai 2014

    De quelle démocratie parlons nous tous celle qui nous fait croire que nous sommes libres oui nous sommes libres de décider par nous même du choix que nous jugeons favorable a notre devenir mais il y a un défaut majeur l'électeur qui élit des élus pour des partis politiques en tout genre des mafieux le citoyen lui est exclu de toute décision qui le concerne lui n'a aucune responsabilité voilà la cause des causes pour en savoir plus sur la constitution et nos responsabilités devant ce fait le tirage au sort est l'un des outils www.Le-message.org pour une société plus juste

  • Normand Bélair Répondre

    13 mai 2014

    Le Québec est rendu là. Il a fait un grand tour depuis l'Union nationale...et la Caq sera le retour de ce concept politique: le conservatisme nationalisme québécois.
    La question à été posée et les cittoyens y ont répondu: Voulons nous être différents des autres ou voulons nous être comme les autres.
    Le dernier a gagné.
    Il semble que les forces souverainistes qui misent sur la différence n'arrivent pas a convaincre les gens du pourquoi de cette différence et donc, nous sommes encore dans un Canada, bien que minoritaire (de plus en plus) et fragile, le choix du «comme les autres» prime tant et aussi longtemps que le pourquoi de faire la souveraineté ne sera pas mise de l'avant...

  • Archives de Vigile Répondre

    9 mai 2014

    Le PQ s'est fait lui-même l'artisan de sa propre défaite. Si je sais encore compter, les forces nationalistes (PQ, CAQ et QS combinées) detenaient collectivement le pouvoir avant le déclenchement des dernières élections. Il suffisait au PQ de bien maneuvrer politiquement pour continuer son mandat.
    La défaite du PQ tient essensiellement à son incapacité à rechercher des compromis et les Québecois ont bien compris (je pense) qu'il sera difficile de faire avancer le Québec sans une certaine souplesse.
    J'ai relu l'histoire du Québec cette dernière semaine; pas celle qu'on m'avait enseignée à l'école il y a longtemps, mais une histoire plus récente écrite par des Québecois qui ont émigré aux Etats-Unis et qui ont recherché l'histoire de leurs ancètres les Lemieux et les Marsolais: "A Tale of Two Families" par Susan Marsolais-Lemieux et Harold Marsolais.
    J'en retiens que les Québecois venus de France ont toujours et depuis le début fait face aux Anglais et autres que ce soit à Tadoussac, Québec, Montréal, la Baie-James, ou sur l'ocean. Plusieurs défaites ils ont subies et plusieurs fois se sont relevés.
    En fait les Anglais ont depuis toujours été nos compagnons et nos rivaux. Nos ancêtres Normands ont conquis l'Angleterre et ont été ensuite abandonnés à la France. Plus tard nous nous sommes retrouvés, Anglais, Normands et Bretons tous ensemble réunis au Canada et depuis la joute continue.
    Ce n'est pas un combat à finir, mais plutôt une saine compétion qui nous renforce mutuellement, les Québécois d'origine Anglaise et Francaise. Alors je pense qu'il ne faut pas trop s'en faire mais plutôt rester vigilants. Pour cela il nous faut user des outils de communication de l'Internet de façon plus efficace pour bien s'informer et se coordonner.

  • Jean-Jacques Nantel Répondre

    8 mai 2014

    Absolument pas! Cette élection n'était ni référendaire ni plébiscitaire, mais tout le contraire; c'était une élection tout à fait ordinaire qui ne visait qu'à faire élire des gens qui se préparaient à nous dire, dès le soir de l'élection, qu¨on n'avait pas le pourcentage pour faire un référendum¨.
    Le seul but de ces gens, qui refusaient de parler de souveraineté et qui la cachaient depuis 20 ans, était de se faire élire pour aller se chercher des pensions et des limousines de ministres.
    Bon débarras!
    Maintenant, voyons si on peut obliger les héritiers de ces politicailleurs à se relancer avec vigueur sur le chemin de la souveraineté.
    S'ils refusent de le faire, alors votons contre eux et même travaillons pour les faire battre!
    Ça commence à faire de toujours se laisser exploiter par des gens qui nous prennent pour un électorat captif et qui, par conséquent, ne font jamais rien pour faire avancer notre cause et nos intérêts...

  • Luc Bertrand Répondre

    8 mai 2014

    Monsieur Bonhomme, il était prévisible depuis au moins les premiers jours du gouvernement Marois que le Parti québécois finirait, tôt ou tard, par subir une raclée. Le 7 avril dernier, avec une défaite d'une telle ampleur, les Québécois n'ont pas seulement rejeté le programme du PQ, ils ont également rejeté sa chef et la stratégie pour parvenir à l'indépendance.
    Pour interpréter cette défaite comme un nouveau NON à l'émancipation du peuple québécois, encore faudrait-il que cette élection soit reconnue par les deux parties comme telle et, surtout, que l'option indépendantiste soit vraiment défendue par le parti qui prétend le faire. Or, ce ne fut pas le cas. Philippe Couillard a tenté d'en faire une élection référendaire tout simplement parce que Pauline Marois n'était ni préparée ni désireuse à défendre "son" option et parce qu'il savait - comme beaucoup de Québécois depuis longtemps - que la première ministre n'avait pas la crédibilité ou la conviction pour aller jusqu'au bout.
    Je suis cependant d'accord avec la thèse voulant que la société québécoise est en décomposition. La raison en est bien simple: la fatigue, le cynisme et le fatalisme. Devant son élite qui baisse pavillon aussi docilement devant les jugements d'une Cour suprême non élue, non impartiale et s'appuyant pour ses décisions sur des documents illégitimes et non reconnus par cette même "élite", devant un flot continu d'immigrants que les médias ne prennent même plus la peine d'occulter leur résistance à la francisation et leur non-intégration à la société civile québécoise et devant une élite économique qui contrôle impunément ses gouvernements et abuse de ses privilèges, faut-il s'en étonner?
    Je crains même, comme je l'ai exprimé à plusieurs reprises ici même pour démontrer la désuétude et la candeur du référendum pour signifier la volonté des Québécois de devenir un pays, que nous ayons DÉJA dépassé le point de non-retour pour nos chances de devenir souverains. Les facteurs qui étaient favorables à la cause dans les années 1930-1960 ne le sont plus aujourd'hui et l'atomisation de la société due à la mondialisation achève de dissoudre le ciment liant la société québécoise.
    Devant l'évidence de l'échec de "la génération qui a porté le Parti québécois" à achever notre processus de libération nationale, je préfère me ranger derrière la métaphore de René-Marcel Sauvé pour situer l'avenir du mouvement indépendantiste québécois. La vigueur de la contestation étudiante du printemps érable et l'investissement des partis politiques émergents par cette nouvelle génération de jeunes instruits, idéalistes et solidaires constitue notre meilleur espoir de parvenir à nos fins.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 mai 2014

    Il ne faut surtout pas tomber dans la fatalité! Il y a souvent des discours religieux et d'apocalypse qui viennent nous hanter à chaque défaite. L'autoflagellation. N'avons-nous pas résisté durant toute ces années? Le Québec ne se laissera pas faire, comme toujours. Il y a le Réseau de résistance du québécois, le Conseil de la souveraineté du Québec et ses États généraux de la souveraineté du Québec, Viglie et bien d'autre. Iris qui publie des papiers financier socio-économique NEUTRE, ne font que dévoiler l'intimidation politique du fédéralisme et l'entretien de la peur au sein du peuple québécois. Les états généraux sur la souveraineté du Québec on publié Les blocages de la fédération canadienne sur l'état québécois.
    Il est évident qu'il faut rester uni pour combattre l'assimilation. Aujourd'hui les battailles se font par la justice, la vérité dévoilé au grand publique et les manifestations. Car pour combattre l'ignorance il n'y rien de mieux que l'éduquation. Alors, il faut continuer à éduquer les québécois qui ne connaissent rien ou très peu à la cause. C'est une des façons que l'on peut contrer l'intimidation de la fédération canadienne. Soyez brave comme nos ancêtres ont pu l'être!

  • François Ricard Répondre

    8 mai 2014

    Depuis plus de quarante ans, nous faisons la pédagogie de la souveraineté qui, dans ses fondements et ses applications, consiste à être une province différente des autres.
    D'autant plus que la loi 101, en instaurant un français de façade, a occulté la dimension économico-politique reliée à la nécessité de l'indépendance.
    Nous sommes différents mais nous devons devenir distincts en ayant un pays bien à nous, un pays où nous serons maîtres non seulement de notre culture mais de tous les autres aspects de notre être collectif.
    Une culture qui ne s'appuie pas sur le politique est une culture agonisante.

  • René Marcel Sauvé Répondre

    7 mai 2014

    Si le grain ne meurt, il ne peut produire de fruits. Et s'il meurt, il produit du fruit
    en abondance.
    Chaque fois que quelque chose est mort au Québec, il a été remplacé par quelque chose de neuf.
    Nous avons en effet besoin de recommencer en neuf, avec un nouveau vocabulaire et surtout de nouvelles perspectives dénuées de pessimisme.
    jrms

  • Archives de Vigile Répondre

    7 mai 2014

    J'avoue qu'on est tous pris par ce cynisme mais notre plus grande défaite peu être notre plus grande victoire...Il faut que la souvraineté soie porter par le peuple et une organisation non affilié a un parti politique...le RRQ devrait prendre le flambeau!!!

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2014

    "En attendant je vais me remettre à la lecture de Verlaine et de Voltaire."
    Autre suggestion, François Villon :
    «Alors qu'on voulait ma mort, était il temps de me taire»
    Un poème lui a sauver la vie (la ballade du pendu)
    JCPomerleau