Le PQ, sous René Lévesque, disait que la maison canadienne était une
«maison de fous» et que forcément il fallait sortir de cette maison qui
rendit tout le monde plus ou moins fou. Le Québec est toujours dans «la
maison de fous», et il s’en est même ajouté quelques-uns de plus.
Le PQ, à l’origine (j’y étais…) vibrait, chantait, espérait. Le PQ, dès son
enfantement, bouillonnait, claironnait, stimulait, rayonnait. Le PQ
demandait de quitter son statut de locataire pour devenir propriétaire.
Maintenant, il ne propose plus d’être propriétaire : il veut réaménager son
statut de locataire en se donnant des airs de propriétaire (ex. : la
gouvernance souverainiste).
Il fait quelques pas sur le perron de la maison à quitter, mais regarde
dans le salon du complexe qui le tient prisonnier, épris d’une nostalgie
qui l’attache à son passé. Le PQ veut faire comme si le pays était né,
mais, en même temps, il fait tout pour faire avorter le pays dont il n’ose
plus parler.
Les indépendantistes rêvaient de sortir de «la maison de fous». Ils ne
voulaient pas d’un réaménagement des lieux, un agrandissement d’une partie
de la maison où ils étaient depuis si longtemps bien campés: ils voulaient,
avec des plans bien d’ici, ériger l’habitation pour les gens d’ici. Ils ne
voulaient leur maison ni trop grande ni trop petite, ni extravagante ni
négligeable. Ils la voulaient simple, pratique, avec des espaces
accueillants, des lieux d’échanges, des carrés de partage. Ils la voulaient
charmante, avec des grandes fenêtres ouvertes sur le monde, avec des aires
de lumière, des environnements de charmes concoctés avec l’ambiance du
lieu, des faisceaux de lumière organisés, des cercles pour marier les
différences. Il voulait la normalité.
Au début, les indépendantistes voyaient leur maison, petit à petit
s’ériger. Chacun y entrait librement, plein d’enthousiasme, plein de rêves
partagés, sans estampille dans le front, sans douanier pour tout contrôler.
Soudain quelqu’un est venu et a brûlé le rêve; il a saccagé les espoirs
nouveau-nés; il a remisé et encadré les travailleurs acharnés. Quelqu’un a
mis le rêve au rancart, a mis l’espoir au frigo pour des années. Quelqu’un
a volé la clé qui donnait accès à l’entrée de la porte de la liberté.
Ce quelqu’un a changé les plans de la nouvelle maison espérée. Ce
quelqu’un, sans consulter les habitants de la nouvelle maison en
construction, a modifié la donne. Il a dit qu’on pouvait faire semblant de
se gouverner comme si on était chez soi tout en restant locataire dans la
maison du voisin qu’on voulait quitter. La foule, enthousiaste, rassemblée
un certain week-end, s’est emballée. Elle a remisé le rêve; elle a remisé
l’ultime changement pour adopter un petit plan de réaménagement de «la
maison de fous» qu’elle voulait jadis quitter. Et les plus fous de tous,
c’est ceux qui ont crû que c’était possible, que c’était un beau rêve, que
c’était cela que le Québec voulait : se taire, faire semblant d’habiter sa
propre maison tout en demeurant locataire.
Il n’y a plus personne dans la maison abandonnée. Il n’y a plus de clé pour
pénétrer dans les lieux oubliés, presque abandonnés. Quelqu’un qui
possédait la clé l’a tout simplement perdue ou la garde comme une relique
du passé.
Hier, j’entendais le timonier de nos rêves oubliés. Il est presque
octogénaire. Il vibre encore. Il explique encore. Il reconnaît les bons
coups des uns, corrige les avancées des autres, plantent les balises de la
cartographie des espoirs à réaliser. Il a toujours la bonne clé, mais la
route lui est barrée. À cause de l’avancement du temps. A cause de la
fatigue de ses luttes esseulées.
Il semble dire à ceux qui ont encore un peu de feu dans leur cheminée, de
brasser la braise, d’ajouter les fagots oubliés, d’espérer que la flambe
danse à nouveau dans l’âtre refroidi, faute de gens pour s’en occuper.
La clé ? Le poète du Grand Nord l’a déjà forgée. Elle est au tréfonds de
soi. Elle n’a ni président ni roi. Il reste à chacun de s’en servir et
d’ouvrir la porte du grand changement souhaité. Il faudrait quelqu’un pour
reprendre aussi la tête du peloton. Il faudrait quelqu’un pour souffler et
transmettre l’espoir. Il faudrait plus que des cris et des ouvertures sur
le merdier du scandale et de la corruption à nettoyer. Il faudrait une
stature. Des armures. Des combattants. Malheureusement, il ne reste qu’une
armée décimée.
I have a dream ! Qu’on retrouve la clé au fond de soi, la clé de la dignité et du don de soi-même. Malheureusement, il ne reste que la chimère qui bat aux vents des circonstances et des aléas journaliers.
La maison ne s’élève plus dans l’azur bleu du pays à faire. On a même perdu
les plans qui devaient la faire surgir en terre d’Amérique. L’architecte
est mort. Et sur le terrain, il ne reste que des matériaux délabrés, en
train de signer à la face du monde que ce peuple n’a pas pu faire sa
liberté parce que ceux qui devaient la créer ont tout fait pour qu’elle
soit enterrée.
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1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
23 novembre 2011C'est l'hiver...
Ensuite ce sera le printemps...
Qu'elles sont longues nos saisons!!!
Vivement l'été...
;)