Bien que la Coalition Avenir Québec ait bel et bien perdu quelques points dans les sondages, il n'en demeure pas moins qu'elle a encore de bonnes chances de se retrouver au pouvoir le 1er octobre prochain.
François Legault multiplie d'ailleurs l'annonce de ses candidats qu'il a choisis lui-même — rien de très démocratique, là-dedans — afin que ces derniers soient officiellement engagés avant que le parti ne perde des plumes, ce qui empêcherait certains opportunistes de quitter le navire, voyant qu'ils n'auraient plus les mêmes chances d'être élus...
Nous l'avions compris dans la montée de la CAQ dans les sondages; les Québécois se cherchent une solution de rechange à l'austérisme cynique des libéraux et la formation de François Legault a réussi à atteindre ces attentes en profitant du coup de couteau que Québec solidaire a planté dans le dos du Parti québécois pour se loger premier dans cette logique.
D'ailleurs, quand je fais allusion à l'austérisme cynique libéral, je me rapporte ici à la technique employée par les grandes pétrolières au sujet du prix de l'essence.
Exemple : Le prix de l'essence au litre est à 1,00 $ et, comme par hasard, avant un congé relativement long, celui-ci augmente à 1,30 $. Bien évidemment, les gens crient au scandale et avec raison. Pourtant, quelques jours plus tard, nos bons oligarques de l'industrie pétrolière décident de baisser le prix du litre à la pompe de 15 cents, pour qu'il se vende à 1,15 $. À ce moment, les gens s'exclament : «enfin le gaz coûte moins cher!»
Oui, il est moins dispendieux qu'à 1,30 $ le litre, mais il est encore de 15 cents en haut du prix précédent qui était de 1,00 $ le litre.
En somme, on se fait encoure rouler...
C'est le même modus operandi avec les libéraux. On coupe 1 milliard et on réinvestit 500 à 600 millions — il s'agit d'un exemple — pendant l'année électorale et les gens s'exclament : «enfin, on réinvestit du côté gouvernemental!»
Il n'en demeure pas moins que les sommes ne sont pas les mêmes qu'au départ, mais bon, la technique fonctionne encore et on a ainsi des chances de se faire réélire...
Revenons à la Coalition Avenir Québec maintenant.
Du côté de certains candidats caquistes, on dénonce les coupes gouvernementales qui ont eu lieu sous les libéraux.
Jusque-là, je n'ai aucun problème contre cette position. Cependant, permettez-moi de douter de la sincérité de ce parti politique en matière de coupures.
En effet, cette semaine, le chef de la Coalition Avenir Québec François Legault a annoncé la candidature de l'économiste Youri Chassin dans Saint-Jérôme — un homme qui s'est fait connaître pour ses propositions de droite en matière économique.
Juste pour clarifier, disons que Youri Chassin et ses propositions bien arrêtées en faveur d'une réduction de l'intervention de l'État, de même que son désir de privatiser la Société des alcools (SAQ) et en partie Hydro-Québec ne donnent évidemment pas un signal crédible quand vient le temps de dénoncer les coupes libérales, n'est-ce pas? Sans oublier sa volonté d'exploiter le pétrole du Québec.
C'est clair, Youri Chassin est un néolibéral avoué dans toute sa splendeur qui ferait passer l'actuel ministre de l'économie libéral, Carlos Leitao, pour un servant de messe...
Comment peut-on après penser qu'on est crédible lorsqu'on dénonce l'austérité libérale d'une main et que, de l'autre, on engage possiblement comme futur ministre un des plus grands partisans du néolibéralisme de la province?
D'ailleurs, si François Legault estime que sa formation est de centre, qui engagera-t-on à gauche pour contrebalancer la candidature de Youri Chassin?
Offrira-t-on un comté à Françoise David?
Il était par ailleurs très drôle de voir patiner l'idéologue Chassin à l'émission 24/60 sur ses propositions passées et le plan brouillon caquiste. On aurait facilement pu lui offrir une place sur l'équipe de patinage artistique canadienne à le voir patiner ainsi...
À l'inverse, Jean-Martin Aussant n'a pas fait trois triples saltos arrière pour répondre. Ses réponses étaient claires et limpides.
On se demande également encore comment la CAQ va affirmer son nationalisme au sein de la Fédération canadienne en demandant entre autres d'obtenir les pleins pouvoirs en matière d'immigration.
Nous l'avons vu récemment, le premier ministre Couillard n'a qu'effleuré la réouverture de la Constitution canadienne, qu'il s'est fait fermer la porte à double tour par Trudeau, et ce, la même journée.
Que penser d'ailleurs du refus d'Ottawa de payer les 146 millions pour les demandeurs d'asile?
Pensez-vous qu'il va uniquement falloir s'asseoir avec Ottawa pour qu'il nous octroie cette demande, quand les libéraux fédéraux dominent le Québec en ayant le plus grand nombre de députés, et que la Coalition Avenir Québec n'a pas de levier de négociations pour faire pression, ayant rejeté l'indépendance du Québec pour épouser le fédéralisme?
Tout le monde sait qu'on négocie quand on a quelque chose à perdre et à plus forte raison, s'il y a une entité qui le sait, c'est bien le gouvernement libéral.
En résumé, le nationalisme de la Coalition Avenir Québec n'est que de la poudre aux yeux et une illusion qui vise essentiellement à leurrer la population afin de prendre à tout prix le pouvoir, et ce, pour continuer l'œuvre libérale, mais avec des acteurs différents.
Alors, quand on vous joue la cassette du changement du côté de François Legault et ses disciples, soyez alertes. Rappelez-vous que si le changement équivaut à des politiques identiques et même plus drastiques en terme économique et social et à dire une chose et son contraire tout dépendant dans quelle région du Québec le chef se situe, le changement attendu ne pourra qu'en décevoir plus d'un, croyez-moi...
«Les ennemis le plus à redouter ne sont jamais ceux qu'on s'apprête à combattre: ce sont les illusions par lesquelles on se laisse aveugler. Ce sont elles qui égarent les gouvernements et les peuples, les partis et les hommes.» Émile de Girardin ; Pensées et maximes (1867)